Le mécanisme de la demeure (art. 107 CO) s’applique au droit de retour anticipé du droit de superficie

TF, 12.12.2023, 5A_941/2022*

Le mécanisme de la demeure (art. 107 CO) s’applique au droit de retour anticipé du droit de superficie (art. 779 ss CC). Le créancier a ainsi l’obligation de sommer le débiteur d’exécuter ses obligations contractuelles et de lui fixer un délai de grâce avant de pouvoir exercer son droit de retour.

Faits

Une commune accorde à un exploitant une servitude personnelle de superficie pour une durée de 99 ans afin de construire et d’exploiter un hôtel-restaurant. Le contrat précise qu’en cas de dénonciation du contrat de superficie par la commune en raison d’une faute du superficiant, une commission de trois experts estime l’indemnité équitable due en échange du retour des bâtiments. En 2017, la commune dénonce le contrat de superficie ; elle agit en justice en 2018 et conclut à la radiation du droit de superficie et au paiement de l’indemnité équitable.

Le Tribunal civil de l’arrondissement de la Broye constate que la commune a valablement dénoncé le contrat ; il se déclare incompétent au surplus, renvoyant à la commission d’expert pour chiffrer l’indemnité. La 1Cour d’appel civil du Tribunal cantonal de l’État de Fribourg rejette l’appel du superficiant et confirme le jugement de première instance.… Lire la suite

Les parloirs intimes des personnes détenues

TF, 03.01.2024, 7B_471/2023*

Une disposition cantonale prévoyant des critères de stabilité et de durée d’une relation pour qu’une personne détenue puisse bénéficier de parloirs intimes n’est pas contraire au droit supérieur.

Faits

Après un peu plus d’une année en détention provisoire, un détenu commence à exécuter sa peine de manière anticipée. Par la suite, il demande à pouvoir bénéficier de parloirs intimes avec son amie.

Après la condamnation de l’intéressé en appel à une peine privative de plus de quatre ans, la Direction de la prison dans laquelle il est incarcéré rejette sa demande de parloirs intimes.

La Direction du Service pénitentiaire du canton de Vaud rejette le recours formé par le condamné contre cette décision, ainsi que sa demande d’assistance judiciaire. La Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois en fait de même.

L’intéressé saisit le Tribunal fédéral, lequel est amené à se prononcer sur la conformité au droit supérieur d’une disposition cantonale prévoyant des critères de stabilité et de durée quant à la relation de la personne détenue pour qu’elle puisse bénéficier de parloirs intimes.

Droit

Aux termes de l’art. 82 al. 5 du Règlement vaudois du 16 août 2017 sur le statut des personnes condamnées exécutant une peine privative de liberté ou une mesure (RSPC/VD), pour pouvoir bénéficier d’une rencontre privée, les personnes condamnées doivent justifier d’une relation stable, antérieure à leur incarcération, avec leur partenaire.… Lire la suite

La compétence ratione materiae en cas de versement d’un capital suite à un accident

TF, 31.01.2024, 4A_169/2023*

Le versement d’un capital par une assurance complémentaire en cas d’invalidité suite à un accident ne complète pas les prestations de la LAMal. En conséquence, la compétence ratione materiae d’un tribunal pour connaître du litige ne découle pas de l’art. 7 CPC.

Faits

Un assuré souscrit une assurance auprès d’une entreprise d’assurance privée ; cette dernière prévoit le versement d’un capital en cas de décès ou d’invalidité de l’assuré. En 2020, l’assuré subit un accident. La SUVA lui accorde deux prestations : d’une part, une rente d’invalidité et d’autre part, une indemnité sur la base des art. 24 et 25 LAA.

En 2022, l’assuré actionne son assurance auprès de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton du Valais. Il réclame le paiement d’un montant de CHF 350’000. Le Tribunal déclare l’action irrecevable ; il ne s’estime pas compétent ratione materiae.

L’assuré forme recours en matière civile au Tribunal fédéral, qui est amené à se prononcer sur la compétence d’une Cour cantonale pour traiter d’un litige sur une assurance complémentaire à l’assurance-maladie sur la base de l’art. 7 CPC.

Droit

L’art. 7 CPC permet aux cantons d’instituer un tribunal pour statuer sur les litiges qui portent sur les assurances complémentaires à l’assurance-maladie selon la LAMal.… Lire la suite

La qualité pour recourir des associations professionnelles contre une décision d’adjudication de gré à gré

TF, 07.02.2024, 2C_196/2023*

En matière de marchés publics, une association professionnelle qui souhaite recourir contre une décision d’adjudication de gré à gré, sans être elle-même touchée par la décision entreprise, doit rendre plausible qu’une majorité ou un grand nombre de ses membres seraient à la fois aptes et disposés à soumissionner pour le marché en cause.

Faits

La Direction générale des immeubles et du patrimoine de l’Etat de Vaud (DGIP) lance un concours de projets pour le Gymnase du Chablais. Les lauréats du concours sont désignés. Par la suite, la DGIP adjuge de gré à gré la construction d’un autre gymnase, à savoir le Gymnase d’Echallens, aux lauréats du concours du Gymnase du Chablais.

Deux associations professionnelles composées d’architectes et d’ingénieurs forment un recours au Tribunal cantonal vaudois contre les décisions d’adjudication de gré à gré de la DGIP. Le Tribunal cantonal déclare le recours irrecevable au motif que les associations n’ont pas la qualité pour recourir. Les associations forment alors un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur la qualité pour recourir des associations professionnelles contre une décision d’adjudication de gré à gré.

Droit

La recevabilité du recours en matière de marchés publics suppose notamment que la décision attaquée soulève une question juridique de principe (art.Lire la suite

Reportage de la RTS : violation du principe de pluralité des opinions (art. 4 LRTV)

TF, 20.09.2023, 2C_859/2022

Le reportage intitulé « La haine avant la votation sur la loi Covid » se trouve dans une proximité thématique et temporelle avec les votations ; les exigences en matière respect du principe de pluralité des opinions sont dès lors accrues. Ne donnant que très peu la parole aux opposants à la loi Covid, il ne représente pas de manière appropriée les différentes opinions et la diversité politique. Enfin, il donne objectivement l’impression que les opposants sont majoritairement rustres et violents. Partant, il viole le principe de pluralité des opinions.

Faits

Le 14 novembre 2021, la RTS diffuse dans le cadre de l’émission « Mise au Point » un reportage intitulé « La haine avant la votation sur la loi Covid ». Le reportage a pour objet la dégradation du climat politique en Suisse dans le cadre de la votation sur la loi Covid qui a lieu deux semaines plus tard.

Il se concentre principalement sur l’interview de différents politiciens ayant reçu des messages de haine d’opposants aux mesures prises pour lutter contre le coronavirus. Il donne brièvement la parole à quelques opposants.

L’Autorité indépendante d’examen des plaintes en matière de radio-télévision (l’Autorité de plainte) admet une plainte déposée contre le reportage pour violation du respect du principe de pluralité des opinions.Lire la suite