L’inscription d’un objet à l’ordre du jour (art. 699 al. 3 CO)

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ATF 142 III 16 | TF, 27.11.2015, 4A_296/2015*

Faits

En se fondant sur l’art. 699 al. 3 CO, un actionnaire détenant 50 % d’une société anonyme à capital-actions de 100’000 francs ouvre action en convocation d’une assemblée générale ordinaire et en inscription de plusieurs objets à l’ordre du jour.

Le Handelsgericht de Zurich donne raison à l’actionnaire et ordonne la convocation de l’assemblée générale et l’inscription des points à l’ordre du jour. Contre cette décision, la société forme un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral.

Dans un premier temps, la société estime que l’actionnaire n’a pas un droit à inscrire des éléments à l’ordre du jour, car il ne détient pas des actions d’une valeur nominale de 1 million de francs. Dans un second temps, la société considère que le Handelsgericht n’aurait pas dû inscrire certains points à l’ordre du jour, car, s’ils venaient à être acceptés par l’assemblée générale, ces points seraient contraires à la loi et donc susceptibles d’être annulés par une action en annulation (art. 706 al. 1 CO).

Le Tribunal fédéral doit ainsi se déterminer sur les conditions qui permettent à un actionnaire d’inscrire des points à l’ordre du jour et sur le pouvoir de contrôle du juge de l’inscription.

Droit

En vertu de l’art. 699 al. 3 CO, « [u]n ou plusieurs actionnaires représentant ensemble 10 % au moins du capital-actions peuvent aussi requérir la convocation de l’assemblée générale. Des actionnaires qui représentent des actions totalisant une valeur nominale de 1 million de francs peuvent requérir l’inscription d’un objet à l’ordre du jour […] ».

La société estime que, conformément au texte de l’art. 699 al. 3 CO, seuls des actionnaires totalisant une valeur nominale de 1 million de francs peuvent requérir l’inscription d’un objet à l’ordre du jour. Or, en l’espèce, l’actionnaire détient 50 % de la société anonyme à capital de 100’000 francs, et totalise donc uniquement 50’000 francs de valeur nominale. De ce fait, il ne pourrait pas ouvrir une action en inscription.

Le Tribunal fédéral rejette cette position. Il interprète l’art. 699 al. 3 CO en ce sens qu’un actionnaire ayant 10 % des actions peut requérir l’inscription d’objets à l’ordre du jour. Ainsi, le droit de demander la convocation de l’assemblée générale et l’inscription d’objets appartient tant aux actionnaires détenant 10 % des actions qu’à ceux ayant des actions totalisant une valeur nominale de 1 million de francs. L’interprétation de la loi que fait la société aurait pour conséquence que seuls des actionnaires de sociétés à capital d’au moins 1 million de francs pourraient demander l’inscription d’objets à l’ordre du jour, ce qui ne peut être la volonté du législateur. En l’espèce, le requérant est un actionnaire qui détient 50 % des actions de la société, et dépasse ainsi le seuil nécessaire des 10 % pour pouvoir demander l’inscription d’un objet à l’ordre du jour.

S’agissant de la seconde question, le Tribunal fédéral considère que le juge de l’inscription doit uniquement procéder à un contrôle formel et vérifier si les conditions de l’art. 699 al. 3 CO sont remplies pour procéder à une inscription d’un objet à l’ordre du jour. En particulier, il doit vérifier si le requérant est un actionnaire qui détient soit 10 % des actions ou soit des actions d’une valeur nominale de 1 million de francs au minimum. Le juge de l’inscription ne procède pas à un contrôle matériel. Il ne doit pas vérifier si les objets qui sont requis pour inscription à l’ordre du jour sont conformes à la loi. Le cas échéant, un tel contrôle aura lieu au stade d’une action en annulation de la décision de l’assemblée générale (art. 706 al. 1 CO). La seule limite à l’absence de contrôle matériel du juge de l’inscription est l’abus de droit de celui qui requiert l’inscription. En l’espèce, la société n’a pas apporté des éléments qui prouveraient un abus de droit du requérant.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Tribunal fédéral rejette le recours.

Proposition de citation : Alborz Tolou, L’inscription d’un objet à l’ordre du jour (art. 699 al. 3 CO), in : www.lawinside.ch/141/