La notion d’installation globale en matière d’étude d’impact (art. 10a LPE)

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ATF 142 II 20TF, 22.01.2016, 1C_57/2015*

Faits

Le Conseil communal met à l’enquête publique un plan d’affectation spécial prévoyant l’édification d’un complexe comprenant des surfaces d’habitations et de commerces dont un magasin spécialisé OBI et 700 places de stationnement souterraines. Il est prévu que le complexe soit connecté au centre commercial Tivoli par une passerelle piétonne et par le parking. Le Tivoli est lui-même déjà relié aux centres commerciaux Shoppi et Limmatpark ainsi qu’à la Umwelt-Arena (halle dédiée à des manifestations en lien avec l’environnement) par des passerelles piétonnes couvertes.

Suite au rejet de son opposition par le Conseil communal, l’Association transports et environnement (ci-après : ATE) recourt auprès du Département compétent en critiquant l’absence d’étude d’impact prenant en compte les installations Tivoli, Shoppi, Limmatpark et Umwelt-Arena. Le Département annule la décision du Conseil communal et refuse l’approbation du plan. Sur recours du maître d’ouvrage et du Conseil communal, le Tribunal administratif considère que l’étude d’impact aurait dû prendre en compte le Tivoli, mais pas les autres structures. Il renvoie la cause à la Commune. L’ATE saisit alors le Tribunal fédéral qui doit déterminer si l’étude d’impact (art. 10a LPE) aurait dû prendre en compte les autres installations préexistantes.

Droit

L’art. 10a LPE soumet à étude d’impact la construction ou la modification d’installations (al. 1), susceptibles d’affecter sensiblement l’environnement, au point que le respect des dispositions en matière d’environnement ne pourra probablement être garanti que par des mesures spécifiques au projet ou au site (al. 2).

L’art. 8 LPE exige une appréciation d’ensemble des installations qui apparaissent comme une installation globale en raison de leur rapport spatial, temporel et fonctionnel. L’art. 2 al. 4 let. a OPair dispose par ailleurs que les installations agrandies sont considérées comme des installations nouvelles lorsque ce changement laisse présager des émissions plus fortes ou différentes. Dans ce cas, les limitations d’émissions pour l’installation globale doivent être examinées dans l’étude d’impact.

Une unité des installations suppose non seulement une proximité spatiale mais également un lien fonctionnel étroit. Une installation globale doit être reconnue lorsque les installations individuelles coopèrent dans une certaine mesure au-delà de ce qui est prescrit par les instructions des autorités en matière de planification et d’environnement. On doit se montrer restrictif lorsque les maîtres d’ouvrage sont distincts mais on peut reconnaître une installation globale s’il y a une organisation ou une planification commune, p. ex. une unité vis-à-vis de l’extérieur ou des installations en commun.

En l’espèce, le Tribunal administratif a estimé que le marché spécialisé représentait un agrandissement du Tivoli en raison d’un lien fonctionnel et spatial. Il n’a en revanche pas examiné les griefs de l’ATE au sujet d’un complexe global Tivoli/Shoppi/Limmatpark/Umwelt-Arena. Afin de guérir cette violation du droit d’être entendu, le Tribunal fédéral va examiner ces griefs.

Les centres Tivoli et Shoppi sont administrés par la même société et reliés physiquement par un CenterMall. En raison de ce lien spatial, de cette organisation commune et de l’unité créée pour le regard extérieur, le Shoppi et le Tivoli représentent une installation globale. Le nouveau marché OBI représente ainsi un complément au complexe, raison pour laquelle l’étude d’impact doit s’étendre à tout le complexe.

Un lien fonctionnel avec les surfaces commerciales du Limmatpark doit également être reconnu. Certes, la passerelle piétonne entre le Limmatpark et le Shoppi Tivoli résulte d’un concept communal de passerelles et les surfaces ne sont pas administrées par la même société. Toutefois, le site internet et le plan du Shoppi Tivoli présentent les magasins des trois centres sans distinction et donnent l’impression d’une unité, confirmée par la présentation uniforme des lieux. Cela représente une coopération suffisante. Les surfaces de parking présentent également un lien fonctionnel pertinent : les places du Limmatpark sont à disposition des clients du Shoppi Tivoli et appartiennent en partie aux propriétaires du complexe. Pour ces raisons, l’unité entre le Shoppi Tivoli et les surfaces commerciales ainsi que le parking du Limmatpark doit être reconnue. Elle est en revanche exclue en ce qui concerne les surfaces de bureau du Limmatpark.

Enfin, le lien fonctionnel ne peut être reconnu pour la Umwelt-Arena, dont l’utilisation est complètement différente et le lien spatial via des passerelles a été imposé par les prescriptions communales. Toutefois, 380 places de son parking sont prévues pour le Shoppi Tivoli et doivent être incluses dans l’étude d’impact.

Il résulte de ce qui précède que le renvoi à la commune doit être confirmé et complété dans la mesure où l’étude d’impact devra prendre en compte le complexe Shoppi/Tivoli/Limmatpark (sans les surfaces de bureau) ainsi que les 380 places de parking de la Umwelt-Arena.

Proposition de citation : Camilla Jacquemoud, La notion d’installation globale en matière d’étude d’impact (art. 10a LPE), in : www.lawinside.ch/186/