Une dette entre époux peut porter intérêt

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ATF 141 III 49 | TF, 19.01.2015, 5A_473/2014*

Faits

Un époux se porte caution pour une dette contractée par son épouse. À la suite du non-paiement de la dette par l’épouse, le créancier réclame de l’époux qu’il le désintéresse. L’époux s’exécute et est subrogé dans les droits du créancier contre son épouse. Survient une procédure de divorce dans laquelle l’époux fait valoir partiellement sa créance contre son épouse. Le Tribunal cantonal condamne l’épouse au paiement de la créance avec intérêts à 5 % à partir de 2004. Celle-ci fait recours au Tribunal fédéral et conteste être tenue au paiement d’intérêts.

Il se pose la question de savoir si la loi prévoit une présomption selon laquelle une dette entre époux ne porte pas intérêt.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle que la doctrine majoritaire tire d’une interprétation a contrario de l’art. 218 al. 2 CC, le principe selon lequel les créances entre époux ne portent pas d’intérêts. Cette disposition mentionne expressément que la créance en participation porte intérêt. Tel n’est en revanche pas le cas de l’art. 203 CC. Le Tribunal fédéral prend position en affirmant que le droit des régimes matrimoniaux ne modifie pas les règles générales du droit des obligations sur la question des intérêts, à tout le moins lorsque les époux ont adopté, comme dans le cas d’espèce, un régime de séparation de biens. C’est donc sous l’angle du droit des obligations qu’il convient de déterminer si la créance de l’époux contre son épouse porte intérêt. D’après le droit des obligations, la caution est subrogée dans les droits du créancier à concurrence de ce qu’elle lui a payé (art. 507 al. 1 CO). Partant, si le créancier avait une créance portant intérêt contre le débiteur principal, tel doit aussi être le cas pour la créance de la caution contre ce dernier.

En l’espèce, l’époux n’a pas apporté la preuve que la créance principale portait intérêt. Un intérêt moratoire est toutefois dû en cas de demeure simple (art 104 al. 1 CO). Le débiteur tombe en demeure simple dès l’instant où sa dette est échue (art. 102 CO). Les faits ne permettent pas de déterminer si l’épouse est tombée en demeure de payer sa dette et si oui, à partir de quel instant. Le Tribunal fédéral renvoie dès lors l’affaire au Tribunal cantonal.

Proposition de citation : Alborz Tolou, Une dette entre époux peut porter intérêt, in : www.lawinside.ch/2/