La coactivité par négligence est-elle admissible ?

TF, 01.06.2017, 6B_360/2016 et 6B_361/2016*

Une condamnation pour coactivité par négligence est admissible pour autant qu’un projet commun de comportement en violation de certaines règles de comportement/de prudence soit établi. Tel n’est pas le cas en l’espèce, les prévenus n’ayant aucunement concerté leur action.

Faits

Deux jeunes hommes sont reconnus coupables, en tant que coauteurs, d’incendie par négligence (art. 222 CP) et d’infraction à la loi cantonale argovienne sur la protection contre l’incendie, pour avoir provoqué un important incendie (ayant entrainé à peu près CHF 900’000.- de dommage) en faisant partir chacun deux fusées depuis la terrasse d’un appartement au rez-de-chaussée. L’enquête n’a pas permis de déterminer laquelle des fusées a effectivement causé l’incident.

Sur opposition, le Tribunal de district acquitte les prévenus. Ce jugement est renversé en appel.

Les deux jeunes hommes recourent au Tribunal fédéral qui doit déterminer si la condamnation en tant que coauteurs d’un délit commis par négligence était fondée.

Droit

Aux termes de l’art. 222 al. 1 CP, celui qui, par négligence, aura causé un incendie et aura ainsi porté préjudice à autrui ou fait naître un danger collectif, sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.… Lire la suite

Le tabouret de bar de Max Bill est-il une œuvre protégée au sens de la LDA ?

ATF 143 III 373 – TF, 12.07.2017, 4A_115/2017*

Les exigences d’individualité afin qu’une œuvre bénéficie de la protection de la LDA sont plus élevées pour les œuvres des arts appliqués (art. 2 al. 2 let. f LDA) que pour les œuvres qui ne relèvent pas de cette catégorie. Le caractère individuel exigé dépend de la liberté de création dont l’auteur jouit en fonction de l’usage prévu de l’œuvre. Il faut se baser sur l’impression artistique générale et non sur les composants distincts d’une création pour déterminer si celle-ci constitue une œuvre ou non. Le tabouret de bar de Max Bill (« HfG-Barhocker ») suscite une impression générale qui l’individualise lui-même ; il constitue donc une œuvre bénéficiant de la protection d’auteur.

Faits

Une fondation dont le but consiste en la préservation des œuvres de l’artiste Max Bill conclut un contrat de licence avec une fabrique de meubles. En vertu de ce dernier, la fabrique bénéficie du droit exclusif de produire et de distribuer certains meubles dessinés par le designer.

Suite à un conflit avec son cocontractant, la fondation met fin au contrat. La manufacture poursuit néanmoins la production des meubles et notamment la vente du célèbre tabouret de bar conçu pour l’École supérieure de la forme, Hochschule für Gestaltung (HfG), à Ulm en Allemagne. … Lire la suite

Acquis de Schengen : Condamnation pour séjour illégal en cas de concours d’infractions

ATF 143 IV 264 – TF, 16.05.2017, 6B_366/2016*

En cas de concours entre le séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEtr) et l’interdiction de périmètre prononcée en lien avec la procédure de renvoi (art. 74 al. 1 let. b ou c cum 119 al. 1 LEtr), une sanction pénale n’est admissible que dans les limites de la Directive européenne 2008/115/CE (acquis de Schengen). Par opposition, lorsque le séjour illégal entre en concours avec une interdiction de périmètre visant à préserver l’ordre et la sécurité publics (art. 74 al. 1 let. a cum 119 al. 1 LEtr), le cas est soustrait au champ d’application de cette Directive.

Faits

Un demandeur d’asile voit sa requête rejetée. Par la suite, il fait l’objet d’une procédure pénale notamment pour séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEtr) et non-respect d’une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 74 cum 119 al. 1 LEtr). Il est entièrement acquitté en première instance. Sur appel du Ministère public, la Cour de Justice genevoise l’acquitte du chef de séjour illégal, le reconnaît coupable de non-respect d’une interdiction de pénétrer dans un région déterminée et l’exempte de toute peine.… Lire la suite

Le lien de causalité en cas de troubles somatoformes douloureux de la victime indirecte

ATF 142 III 433 | TF, 29.06.2016, 4A_637/2015*

Faits

Un couple est impliqué dans un accident de la circulation provoqué par un conducteur tiers. L’épouse subit une atteinte grave à sa santé. L’époux subi une atteinte à sa colonne vertébrale, qui se guérit. Plus tard, l’époux fait face à des troubles somatoformes douloureux, soit des douleurs dont le diagnostic médical ne permet pas d’en identifier la cause.

L’époux ouvre action contre l’assureur RC du conducteur tiers afin d’obtenir la réparation de ses troubles somatoformes. La dernière instance cantonale rejette l’action de l’époux, en niant l’existence d’un lien de causalité entre les troubles dont il se prévaut et l’accident de la circulation.

L’époux forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur l’existence du lien de causalité adéquat entre les troubles somatoformes douloureux dont souffre l’époux et l’accident de la circulation, au regard de la jurisprudence développée en matière de chocs nerveux.

Droit

Dans un premier temps, le Tribunal fédéral se réfère à sa jurisprudence selon laquelle le tiers, qui subit un dommage indirect ou réflexe seulement à cause d’une relation particulière avec la victime directe, n’a en principe pas droit à une indemnisation.… Lire la suite

La chose confiée dans l’abus de confiance

ATF 143 IV 297 | TF, 07.06.17, 6B_841/2016*

Faits

En première instance, un prévenu est condamné pour plusieurs infractions dont abus de confiance au sens de l’art. 138 CP. D’après les constatations du Tribunal cantonal, le prévenu a pris en leasing une voiture auprès d’un garage. Il a indiqué que le preneur de leasing était une société et a fait signer le contrat de leasing par l’administrateur de cette société. Quelques mois après, le donneur du leasing a résilié le contrat et a exigé la restitution du véhicule. Le prévenu a alors vendu la voiture à un tiers.

Selon les CG du contrat de leasing, le preneur peut mettre à disposition de ses employés le véhicule. En revanche, il ne peut pas laisser utiliser le véhicule par des tiers. Le prévenu n’étant pas employé de la société preneuse du leasing, le Tribunal cantonal du canton de Berne retient que le véhicule ne pouvait pas lui avoir été confié juridiquement. Le Ministère public conteste cette appréciation auprès du Tribunal fédéral, lequel doit clarifier la notion d’« objet confié ».

Droit

Aux termes de l’art. 138 al. 1 ch. 1 CP, celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, se sera approprié une chose mobilière appartenant à autrui et qui lui avait été confiée sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire.… Lire la suite