Les autres motifs qui justifient une défense obligatoire (art. 130 lit. c CPP)

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ATF 143 I 164 | TF, 03.04.17, 1B_338/2016*

Faits

Un automobiliste suit un autre véhicule à une distance de 4m à 6m sur l’autoroute. Le premier véhicule sort de l’autoroute pour confronter l’automobiliste qui le collait. Ce dernier sort alors un couteau. Le conducteur du premier véhicule repart et appelle la police. Pour ces faits, le ministère public met en accusation le prévenu pour violation grave des règles de la circulation routière et pour menaces. Il propose une peine de 50 jours-amende. Le prévenu estime qu’il existait un cas de défense obligatoire et qu’il convient de réadministrer les preuves (cf. art. 131 al. 3 CPP). Le Tribunal fédéral doit ainsi se pencher sur les conditions de la défense obligatoire.

Droit

Selon l’art. 130 lit. b CPP, il existe un cas de défense obligatoire si le prévenu encourt une peine privative de liberté de plus d’un an. L’art. 130 lit. c CPP impose également un avocat quand le prévenu, à cause de son état physique ou psychique ou pour une autre raison, ne peut pas suffisamment défendre ses intérêts dans la procédure pénale.

Contrairement à l’avis du recourant, le Tribunal fédéral estime que la peine déterminante pour retenir une défense obligatoire n’est pas la peine abstraite de l’infraction, mais la peine concrète que risque de purger le prévenu. En l’espèce, le ministère public a proposé 50 jours-amende, de sorte que la limite d’une année n’est pas atteinte.

Le Tribunal fédéral constate ensuite que le recourant n’a pas de problème psychique ou physique.

Il se penche alors sur l’existence d’autres motifs au sens de l’art. 130 lit. c CPP. La doctrine estime qu’une mauvaise compréhension de la langue peut constituer un autre motif si le recours à un traducteur ne suffit pas pour assurer la défense des droits du prévenu. Il en va de même d’une autre raison qui ne conduit généralement pas à une défense obligatoire, mais qui peut entraver de la même manière qu’un problème physique ou psychique la défense du prévenu. Dans le doute, il convient de retenir l’existence d’un tel motif. En revanche, s’il n’y a pas de cas limite, l’admission d’un autre motif doit être admise avec restriction et apparaître suffisamment grave pour administrer à nouveau les preuves en présence d’un avocat.

En l’espèce, la difficulté du cas ainsi que l’éventualité d’un casier judiciaire lors d’une condamnation ne suffisent pas à retenir une défense obligatoire. Par conséquent, il n’existe aucun autre motif au sens de l’art. 130 lit. b CPP.

Le Tribunal fédéral se penche enfin sur les conditions de la défense d’office. Il rappelle que l’art. 132 CPP reprend la jurisprudence de la CourEDH et que l’éventualité de devoir purger une peine privative de liberté (en l’occurrence une peine maximale de 3 ans) ne fonde pas à elle-seule une défense d’office. Le Tribunal fédéral considère que la défense d’office doit être accordée lorsque l’octroi d’un sursis est exclu. S’il existe un cas relativement grave, la défense d’office est octroyée lorsque le prévenu doit faire face à des difficultés en fait ou en droit qu’il ne peut pas surmonter seul. Lors d’un cas évident de peu de gravité (offensichtlicher Bagatellfall), la défense d’office est rejetée. Tel est notamment le cas si l’infraction est réprimée par une amende ou une peine privative de liberté minime.

En l’espèce, le Tribunal fédéral estime qu’il n’existe pas de difficulté en fait ou en droit, de sorte qu’il n’était pas nécessaire pour le prévenu d’avoir un défenseur d’office lors de la phase d’instruction.

Partant, le Tribunal fédéral rejette le recours.

 

Proposition de citation : Julien Francey, Les autres motifs qui justifient une défense obligatoire (art. 130 lit. c CPP), in : www.lawinside.ch/426/