La demande d’entraide française suite aux données volées par Falciani

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ATF 143 II 224TF, 17.03.2017, 2C_1000/2015*

Faits

La Direction générale des finances publiques françaises adresse une demande d’assistance administrative à l’Administration fédérale des contributions (AFC) visant deux résidents français. Ces deux résidents ont été identifiés à l’aide de commissions rogatoires adressées aux autorités belges et uruguayennes suite à la récupération des données volées à la filiale genevoise de la banque HSBC par Hervé Falciani. L’AFC accorde l’assistance administrative, mais le Tribunal administratif fédéral admet le recours des deux résidents français  et annule la décision de l’AFC.

Par la suite, Hervé Falciani est condamné par le Tribunal pénal fédéral (cf. TPF, 27.11.2015, SK.2014.46, résumé in : LawInside.ch/202).

L’AFC interjette un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral qui doit alors déterminer si la demande française viole le principe de la bonne foi en se fondant sur des données volées.

Droit

Concernant la recevabilité, le Tribunal fédéral considère que le cas d’espèce pose une question juridique de principe, indubitablement importante, qui n’a pas encore été tranchée. La condition de recevabilité prévue à l’art. 84a LTF est ainsi remplie.

L’art. 7 let. c LAAF prévoit qu’il n’est pas entré en matière lorsque la demande viole le principe de la bonne foi, notamment lorsqu’elle se fonde sur des renseignements obtenus par des actes punissables au regard du droit suisse.

La doctrine majoritaire considère qu’un Etat qui achète des données bancaires pour déposer ensuite des demandes d’assistance administrative agit de manière contraire à la bonne foi. Aussi, le Tribunal fédéral souligne qu’un avenant entre la Suisse et la France a été ratifié à ce sujet. Cet avenant précise que la France n’utilisera pas les données récupérées par le vol de Falciani dans le but d’adresser à la Suisse des demandes d’entraides.

Le Tribunal fédéral vérifie alors s’il existe un lien de causalité entre les données Falciani et la demande d’assistance administrative. Ce lien de causalité existe même si la demande ne provient qu’indirectement des données Falciani. La Suisse doit ainsi refuser d’entrer en matière sur une demande d’assistance administrative provenant de la France si celle-ci a été rendue possible grâce aux données Falciani, que ce soit directement ou indirectement.

En l’espèce, le fondement direct de la demande provient des informations de la part de la Belgique et de l’Uruguay, informations qui ont permis à la France d’identifier un compte bancaire appartenant aux deux résidents français. Toutefois, la France a pu adresser ces deux commissions rogatoires grâce aux données Falciani. Partant, il existe un lien de causalité entre ces dernières et la demande d’entraide à la Suisse.

Le Tribunal fédéral rejette ainsi le recours.

Note

Cet arrêt doit être mis en perspective avec un autre arrêt récent et destiné à publication du Tribunal fédéral qui casse la décision du TAF et admet la demande d’entraide française (ATF 143 II 202, résumé in : LawInside.ch/405). La distinction avec l’arrêt résumé ici réside dans fait que dans l’ATF 143 II 202, les données n’avaient pas été volées en Suisse, mais provenaient exclusivement de la France. Le Tribunal fédéral a alors retenu que, puisque la transmission d’informations avait exclusivement eu lieu en dehors du sol helvétique, les différentes normes pénales suisses condamnant une telle transmission (art. 47 LB, art. 162 CP et 273 al. 2 CP) ne pouvaient pas s’appliquer à ces actes en vertu du principe de territorialité. Ainsi, il en a conclu que la demande d’assistance administrative ne reposait pas sur des renseignements obtenus par des actes punissables au regard du droit suisse.

Proposition de citation : Célian Hirsch, La demande d’entraide française suite aux données volées par Falciani, in : www.lawinside.ch/429/

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