Entrées par Simone Schürch

La protection des appellations universitaires

ATF 142 I 16TF, 09.02.2016, 2C_297/2014*

Faits

Le Grand Conseil tessinois adopte des modifications de la loi sur l’Université et sur l’Haute école professionnelle de la Suisse italienne et du règlement correspondant. Les modifications visent à protéger les appellations telles que « accademia » (académie), « alta scuola » (haute école), ou encore « campus, college ». Elles sont adoptées en complément de la protection des appellations mise en place par l’art. 29 de la nouvelle loi fédérale sur l’encouragement des hautes écoles et la coordination dans le domaine suisse des hautes écoles (LEHE, RS 414.20), non encore en vigueur au moment de l’adoption des modifications cantonales.

L’ « Università Privata a Distanza » (traduction libre : « Université privée à distance ») saisit le Tribunal fédéral d’un recours abstrait contre les dispositions litigieuses de la loi tessinoise. Du fait de l’absence d’effet suspensif de son recours, la recourante s’est vue contrainte en cours de procédure de changer son nom en « Istitutio Superiore di Studi di Economia Aziendale ». Devant l’instance fédérale se pose en particulier la question de savoir si le nouveau droit fédéral en la matière – non encore en vigueur au moment du dépôt du recours – empêche la mise en place d’un système parallèle visant la protection de dénominations qui ne figurent pas dans la LEHE, mais qui se réfèrent également à l’éducation universitaire.Lire la suite

Le critère de la pertinence vraisemblable dans l’entraide fiscale

ATF 142 II 161

Faits

Un couple de deux ressortissants français est imposé en Suisse de manière illimitée depuis 2010. L’autorité fiscale française soupçonne les époux d’être encore domiciliés en France, où se trouverait leur centre d’intérêts vitaux (activité professionnelle, foyer). De longs séjours dans le pays confirmeraient ce fait. Sur la base de ces indices, le fisc français demande à l’Administration fédérale des contributions (AFC) de lui transmettre toutes les informations relatives à deux comptes dont les conjoints sont titulaires auprès d’une banque en Suisse. Il demande également de lui indiquer si les époux possèdent éventuellement d’autres comptes de manière indirecte auprès de la même banque (par une procuration ou en étant les bénéficiaires économiques). L’AFC admet la demande française et transmet des informations. Sur recours des époux, le Tribunal administratif fédéral annule cette décision en retenant que la condition de pertinence vraisemblable des informations requises fait défaut.

L’AFC interjette recours au Tribunal fédéral qui est appelé à concrétiser la notion de pertinence vraisemblable des informations requises et à déterminer dans quelle mesure des informations concernant des tiers non visés par la demande peuvent également être transmises à l’autorité requérante.

Droit

L’art. 28 par. 1 de la Convention franco-suisse du 9 septembre 1966 en vue d’éliminer les doubles impositions (CDI-F), complété par son Protocole additionnel, dispose que les autorités compétentes des États contractants s’échangent les informations vraisemblablement pertinentes pour appliquer les dispositions de la Convention ou pour l’application de leurs législations internes relatives aux impôts de toute nature, pour autant que l’imposition qu’elles prévoient ne soit pas contraire à la Convention.… Lire la suite

La saisie d’un bien qui fait l’objet d’un séquestre pénal

ATF 142 III 174 | TF, 15.01.2016, 5A_204/2015*

Faits

Une société entame une procédure de poursuite contre une personne physique débitrice d’un montant de près de deux millions de francs. L’office des poursuites compétent saisit plusieurs biens appartenant à l’intéressé, dont certains font l’objet d’un séquestre en garantie d’une créance compensatrice en faveur de l’Etat (art. 71 al. 3 CP) ordonné par le ministère public, qui instruit une enquête contre cette personne. L’office des poursuites réalise une partie des biens saisis, mais refuse de réaliser les biens sous séquestre pénal. Sur recours de la société, l’instance d’appel, qui agit en qualité d’autorité de surveillance, somme l’office des poursuites de procéder à la réalisation de ces biens.

Le débiteur recourt au Tribunal fédéral, qui doit déterminer si des biens saisis qui font en même temps l’objet d’un séquestre conservatoire de l’autorité pénale peuvent être réalisés par l’office des poursuites.

Droit

En vertu de l’art. 70 al. 1 CP, le juge prononce la confiscation des valeurs patrimoniales qui sont le résultat d’une infraction ou qui étaient destinées à récompenser l’auteur d’une infraction, si elles ne doivent pas être restituées au lésé en rétablissement de ses droits. Selon l’art.Lire la suite

L’emplacement d’une antenne pour téléphonie mobile

TF, 08.12.2015, 1C_118/2015*

Faits

Le Conseil d’Etat tessinois adopte deux modifications du règlement de la loi cantonale sur le développement territorial. Il entend obliger les communes à prévoir dans leurs règlements d’urbanisme des dispositions réglant l’emplacement et la construction d’antennes de téléphonie mobile. Le délai dans lequel les communes doivent légiférer est de 10 ans. Une disposition transitoire applicable dans l’intervalle prévoit les emplacements possibles pour la construction de ces installations sous forme d’un ordre de priorité en cascade.

Swisscom, Sunrise et Salt saisissent le Tribunal fédéral d’un recours en matière de droit public en demandant l’annulation de la disposition transitoire précitée. Le contrôle abstrait porte en particulier sur l’admissibilité de cette disposition au regard de l’autonomie communale et de la séparation des pouvoirs.

Droit

Le principe de la séparation des pouvoirs est un droit constitutionnel justiciable. Selon ce principe, le pouvoir exécutif n’a pas le droit de promulguer des règles de droit, sous réserve d’une délégation législative. La délégation législative est valable à condition qu’elle ne soit pas interdite par le droit cantonal, qu’elle soit prévue par une loi au sens formel, qu’elle se limite à une matière déterminée et que la loi au sens formel prévoie les grandes lignes de la future réglementation.… Lire la suite

L’effet suspensif du recours de Uber

TF, 07.01.2016, 2C_547/2015

Faits

En août 2014, Uber informe le Service du commerce du canton de Genève de sa volonté d’offrir ses services dans le canton. Les autorités genevoises mettent d’emblée en garde Uber sur le caractère illégal de ses activités eu égard à la législation cantonale en matière de transport. Malgré cette mise en garde, Uber débute ses activités en septembre 2014.

Par décision du 30 mars 2015, le Service cantonal interdit avec effet immédiat à Uber d’exercer l’activité de transport professionnel de personnes dans le canton de Genève et lui inflige une amende de 35’000 francs. Il déclare la décision comme étant immédiatement exécutoire et retire ainsi l’effet suspensif d’un éventuel recours. Sur recours de Uber, la Cour de justice refuse de restituer l’effet suspensif s’agissant de l’interdiction d’exercer l’activité, mais la restitue quant à l’amende.

Uber saisit alors le Tribunal fédéral en concluant à la restitution de l’effet suspensif de la décision qui lui interdit d’exercer l’activité de transport.

Droit

Ne portant que sur la demande de restitution de l’effet suspensif, la décision querellée est une décision incidente qui ne peut faire l’objet d’un recours au Tribunal fédéral que si elle cause un préjudice irréparable (art.Lire la suite