Le recours abstrait contre la Loi sur la police bernoise (I/III)

ATF 147 I 103TF, 29.04.2020, 1C_181/2019*

Les frais d’intervention de la police peuvent être mis à la charge des organisateur·ice·s d’une manifestation à débordements violents, ainsi qu’à la charge des personnes ayant participé auxdits actes de violence ou refusé de s’éloigner sur sommation de l’autorité. Cette règle est compatible avec les art. 16 al. 2 et 22 Cst. dans la mesure où la LPol/BE prévoit des conditions et des garanties suffisantes du point de vue de l’art. 36 Cst..

Faits

Le 27 mars 2018, le Grand Conseil du canton de Berne vote une révision totale de sa Loi sur la police (ci-après : LPol/BE). De nombreuses associations – notamment le Parti socialiste bernois, Les Verts (BE) et Unia – forment un recours abstrait en matière de droit public contre cette loi auprès du Tribunal fédéral. Les recourantes requièrent l’abrogation des nouvelles dispositions sur (1) la répartition des frais engendrés par les manifestations avec actes de violence, (2) les mesures de renvoi et d’interdiction d’accès et (3) les mesures de surveillance.

Le présent résumé traite du premier point. À ce propos, la nouvelle loi bernoise introduit la règle selon laquelle, en cas d’actes de violence commis dans le cadre d’une manifestation, les communes peuvent mettre les frais de l’intervention policière à la charge des organisateur·ice·s de ladite manifestation, lorsque ceux-ci ne bénéficiaient pas de l’autorisation nécessaire ou n’ont, volontairement ou de manière gravement négligente, pas respecté les conditions de l’autorisation.… Lire la suite

L’intervention de communes dans le lancement et la récolte de signatures d’un référendum cantonal

ATF 146 I 129TF, 06.04.2020, 1C_673/2019*

La garantie de la libre formation de la volonté des citoyennes et citoyens (art. 34 al. 2 Cst.) s’applique également aux récoltes de signatures. Une commune peut intervenir dans le lancement et la récolte de signatures d’un référendum cantonal si elle peut se prévaloir d’un motif pertinent et si elle respecte les principes d’objectivité, de proportionnalité et de transparence. Une irrégularité sur ce point ne justifie l’annulation de l’aboutissement du référendum que si elle est grave et si elle a pu exercer une influence décisive sur le résultat de la récolte des signatures.

Faits

Après avoir légalement exploité une gravière, la Sablière du Cannelet SA (la SA) exploite sans autorisation depuis 1994 des installations de recyclage et de traitement de déchets de chantier sur des parcelles sises en zone agricole dans la commune d’Avusy. Dans le but de régulariser cette situation, le Grand Conseil du canton de Genève adopte en 2018 une loi de modification des limites de zone affectant les parcelles en question à une zone industrielle et artisanale consacrée à des activités de recyclage de matériaux.

Les communes d’Avusy, de Laconnex, de Soral, de Chancy et de Cartigny ainsi que les associations Grain de Sable de la Champagne, Pro Natura Genève et AgriGenève soumettent au Service des votations et élections (SVE) une formule de référendum contre la loi en question.… Lire la suite

La violation du droit à la vie en cas de suicide d’un détenu (CourEDH)

CourEDH, 30.06.2020, Affaire Frick c. Suisse, Requête no. 234505/16

En laissant seul dans une cellule sans surveillance pendant quarante minutes un individu présentant des risques de suicide manifestes, la police méconnaît son droit à la vie (art. 2 CEDH). En refusant l’ouverture d’une procédure pénale à l’encontre des agent-e-s concerné-e-s, les juridictions suisses violent en outre l’art. 2 CEDH dans son volet procédural.

Faits

Au volant d’un véhicule professionnel, un individu cause un accident. La police effectue les contrôles d’usage et constate qu’il est en état d’ébriété et sous l’influence de médicaments. L’homme se montre agité et agressif. Il appelle sa mère, qui le rejoint sur les lieux de l’accident. Il exprime alors des pensées suicidaires, demandant notamment à sa mère de « ne pas être triste s’il crève ici ».

Les agent-e-s l’emmènent à l’hôpital pour obtenir un échantillon de sang et d’urine. L’accidenté devient de plus en plus agité et mentionne à plusieurs reprises son intention de mettre fin à ses jours. Les policiers-ères évoquent alors avec la mère de l’intéressé un éventuel placement à des fins d’assistance. Dans ces circonstances, ils renoncent à libérer l’homme immédiatement et le conduisent à la base routière. Au regard des intentions suicidaires de l’intéressé, les agent-e-s demandent l’envoi d’un médecin à la base.… Lire la suite

L’accès aux informations relatives à un produit défectueux

ATF 146 II 265 | TF, 07.04.2020, 1C_299/2019*

Les art. 10 al. 4 et 12 de la Loi sur la sécurité des produits (LSPro) ne constituent pas des dispositions spéciales au sens de l’art. 4 LTrans. Ils ne font donc pas obstacle à ce que l’autorité fournisse à un particulier, sur demande, des informations relatives à un produit défectueux n’ayant pas fait l’objet d’un avertissement.

Faits

Un particulier sollicite auprès du Bureau de prévention des accidents (BPA) l’accès aux résultats d’un contrôle des règles de sécurité portant sur des tables à langer. Les informations relatives à des produits gravement défectueux pour lesquels un avertissement avait été émis par le Bureau fédéral de la consommation lui sont transmises dans leur intégralité. En revanche, malgré les recommandations du Préposé fédéral à la protection des données faisant suite à une procédure de conciliation, le BPA se refuse à fournir une version non caviardée des informations relatives à cinq produits défectueux, mais n’ayant pas fait l’objet d’un avertissement.

Son recours au Tribunal administratif fédéral ayant été rejeté (arrêt A-5623/2017 du 2 mai 2019), le particulier dépose un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, qui doit déterminer si la Loi sur la sécurité des produits (LSPro) – applicable au contrôle des produits par l’administration – permet de restreindre le droit d’accès aux informations litigieuses fondé sur la LTrans.… Lire la suite

L’exclusion temporaire d’une élève non vaccinée contre la rougeole

TF, 8.06.20, 2C_395/2019

L’exclusion temporaire de l’école d’une élève non vaccinée contre la rougeole après un cas de rougeole déclaré dans sa classe est une mesure proportionnée. L’administration d’immunoglobulines aux autres enfants non vaccinés de sa classe n’entre pas en ligne de compte en tant que mesure moins contraignante, dans la mesure où elle concerne de tierces personnes. 

Faits

En 2017, un enfant d’une classe d’école primaire est atteint de rougeole. La médecin cantonale de Saint-Gall ordonne alors l’exclusion temporaire de l’une de ses camarades de classe pendant deux semaines, au motif que l’élève en question – de même que d’autres élèves de la classe – n’avait pas été vaccinée contre la rougeole et n’avait encore jamais contracté cette maladie.

L’élève exclue, représentée par ses parents, forme recours contre la décision d’exclusion auprès du Tribunal administratif du canton de Saint-Gall, faisant valoir l’absence de proportionnalité de la mesure ordonnée en présence de mesures moins contraignantes, comme l’administration d’immunoglobulines aux enfants ne pouvant pas être vaccinés et n’ayant pas contracté la rougeole.

Déboutée par le Tribunal administratif saint-gallois, l’élève agit devant le Tribunal fédéral. Celui-ci doit en particulier se prononcer sur la proportionnalité de la mesure ordonnée, soit l’exclusion temporaire de l’élève non vaccinée.Lire la suite