Le classement des surfaces d’assolement en zone à bâtir

ATF 145 II 32 | TF, 21.11.2018, 1C_46/2017*

Les cantons sont en droit de classer des surfaces d’assolement en zone à bâtir moyennant une pesée de tous les intérêts en présence ; les critères posés à l’art. 30 al. 1bis OAT doivent être pris en considération dans le cadre de cette pesée. Une obligation de compensation des surfaces d’assolement ne saurait être imposée que lorsque le canton ne dispose pas d’une réserve suffisante de ces surfaces.

Faits

Une société envisage de réaliser un projet-pilote de géothermie profonde dans le canton du Jura. Ce projet implique le passage de surfaces d’assolement (SDA) en zone à bâtir. Cette perte de SDA est partiellement compensée.

Des opposants contestent notamment le déclassement des SDA. Ils soulèvent que le canton du Jura ne dispose que d’une réserve de SDA limitée et que le principe du maintien ou de la compensation intégrale de ces surfaces devrait prévaloir. Le Conseil d’État du canton du Jura, puis la Cour administrative du canton du Jura, approuvent le projet et rejettent les oppositions.

Les opposants forment un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur le classement des SDA en zone à bâtir (art.Lire la suite

La surveillance des télécommunications par les services secrets (CourEDH) (I/III)

CourEDH, 13.09.2018, Affaire Big Brother Watch et autres c. Royaume-Uni, requêtes nos. 58170/13, 62322/14 et 24960/15

En tant que telle, l’interception massive de communications n’excède pas la marge d’appréciation laissée aux Etats pour préserver leur sécurité nationale. Il n’est pas indispensable que la mise en œuvre d’une telle surveillance face l’objet d’un contrôle ex ante par une autorité indépendante. Les bases légales et la procédure nationales doivent cependant présenter une densité normative suffisante et garantir la proportionnalité.

Faits

À la suite des révélations d’Edward Snowden, plusieurs personnes physiques et morales contestent la conformité de la surveillance électronique déployée par les services secrets du Royaume-Uni au droit à la vie privée garanti par la CEDH (art. 8 CEDH).

Après avoir épuisé les voies de droit nationales, les requérants agissent devant la Cour européenne des droits de l’homme.

Dans ce contexte, la CourEDH examine la conventionnalité de trois types de surveillance : (I) l’interception massive de communications ; (II) le partage de renseignements avec les services secrets étrangers ; et (III) l’obtention de données de communications auprès de fournisseurs de télécoms.

Le présent résumé s’attache au premier de ces trois types de surveillance.

L’interception massive de communications consiste à intercepter un nombre indéterminé de communications pendant leur transmission (p.… Lire la suite

La compensation des surfaces d’assolement en lien avec la revitalisation des eaux

ATF 145 II 11 | TF, 19.11.2018, 1C_130/2017*

Lorsqu’un projet de revitalisation d’un cours d’eau engendre la perte de surfaces d’assolement, la compensation de ces surfaces doit intervenir dans la planification sectorielle, et non pas dans la procédure du projet de revitalisation à l’origine des pertes.

Faits

La commune de Port-Valais met à l’enquête publique un projet de revitalisation d’un cours d’eau. Des surfaces d’assolement (SDA) sont touchées par le projet. Un rapport, établi à l’appui du projet, précise que la commune a défini les SDA de remplacement afin de compenser les SDA perdues.

Des opposants contestent la compensation des SDA, notamment au motif que les SDA de remplacement ne sont pas d’une qualité équivalente. Le Conseil d’État valaisan, puis le Tribunal cantonal valaisan, rejettent les oppositions.

Les opposants forment un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral qui doit se prononcer sur la procédure de compensation des SDA en lien avec un projet de revitalisation d’un cours d’eau.

Droit

Les SDA font partie du territoire qui se prête à l’agriculture. Elles sont garanties par des mesures d’aménagement du territoire (cf. art. 26 al. 1 OAT, art. 6 al. 2 let. a LAT et art. 3 al.Lire la suite

La preuve de la qualité de victime LAVI en l’absence d’une procédure pénale

ATF 144 II 406 | TF, 26.11.2018, 1C_705/2017*

Lorsqu’il s’agit d’établir, en cas d’absence ou d’échec de la procédure pénale, l’infraction impliquant une victime et le statut qui en découle dans une procédure LAVI, le degré de preuve requis se limite à la vraisemblance prépondérante.

Faits

Une victime, qui prétend avoir été victime d’abus sexuels, forme une demande d’indemnisation auprès de l’autorité compétente LAVI. A l’appui de sa demande, elle produit plusieurs certificats médicaux et témoignages écrits de ses proches. Les infractions alléguées n’ont toutefois fait l’objet d’aucune procédure pénale.

L’autorité d’indemnisation LAVI rejette sa demande. Ce refus est confirmé par la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud, qui considère qu’en l’absence de toute enquête pénale, les déclarations de la victime ainsi que les rapports médicaux ne permettent pas de démontrer au degré de la vraisemblance prépondérante le statut juridique de victime.

La victime forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur les exigences en matière de preuve de l’infraction et du statut de victime dans l’examen de la demande d’indemnisation LAVI en l’absence de toute procédure pénale.

Droit

À titre liminaire, le Tribunal fédéral rappelle que l’échec ou l’absence d’une procédure pénale n’exclut pas le droit à l’aide aux victimes (cf.… Lire la suite

Le droit d’être entendu des initiants lors du contrôle par l’exécutif cantonal

ATF 145 I 167 | TF, 26.11.2018, 1C_136/2018*

Lorsque le Conseil d’État contrôle la validité d’une initiative avant la récolte des signatures, les initiants disposent d’un droit de se déterminer sur d’éventuels éléments que l’autorité aurait établis à l’aide d’une instruction. A moins qu’elle envisage de fonder sa décision sur une norme ou un motif juridique dont les initiants ne pouvaient supposer la pertinence, l’autorité n’a en revanche pas à soumettre par avance aux parties le raisonnement qu’elle entend tenir.

Faits

Le Conseil d’État du canton de Vaud invalide l’initiative « Immigration libre et frontières ouvertes ». Cette initiative prévoit que « l’État et les communes accordent la priorité de l’emploi aux citoyens suisses et aux titulaires d’une autorisation d’établissement » et que « [l]’emploi d’un travailleur étranger donne lieu à une imposition fiscale de l’employeur si [certaines] conditions sont remplies ». Ces conditions visent en substance les personnes étrangères sans autorisation d’établissement et soumises à l’impôt à la source sur le revenu depuis moins de cinq ans.

Un membre du comité d’initiative recourt contre cette décision, d’abord auprès de la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal, puis auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur le respect du droit d’être entendu (art. 29 al. Lire la suite