La question du concours en cas de tentative de lésions corporelles graves et d’omission de prêter secours

TF, 05.06.2024, 6B_1037/2023*

Il n’y a pas de concours réel entre une tentative de lésions corporelles graves (art. 122 CP) et une omission de prêter secours (art. 128 CP) lorsque la seconde ne crée pas le risque d’un résultat allant au-delà de celui des lésions corporelles acceptées par l’auteur de l’infraction.

Faits

À la suite d’une altercation sur un parking, le conducteur d’une voiture accélère et heurte une personne à une vitesse comprise entre 27 et 35 kilomètres à l’heure. Il quitte les lieux de l’accident sans porter secours à la personne blessée ni prévenir la police ou les secours.

Après un acquittement en première instance, l’Obergericht argovien reconnaît le prévenu coupable de tentative de lésions corporelles graves (art. 22 CP cum art. 122 CP) et d’omission de prêter secours (art. 128 CP). Il le condamne à une peine privative de liberté de deux ans et demi, partiellement assortie du sursis.

Le prévenu saisit le Tribunal fédéral, qui doit déterminer s’il existe, dans le cas d’espèce, un concours réel entre la tentative de lésions corporelles graves et l’omission de prêter secours.

Droit

Aux termes de l’art.Lire la suite

La preuve des pertes du client incombe à la banque

TF, 16.07.2024, 4A_301/2023

Lorsque la banque liquide les positions du client et qu’il en résulte un solde négatif, il appartient à la banque de prouver les pertes. À défaut, la banque ne prouve pas l’existence de sa créance à l’encontre du client.

Faits

En 2011, un client utilise la plateforme informatique d’une banque vaudoise afin de spéculer sur la variation du cours USD/CHF. Le 15 janvier, la BNS annonce qu’elle abandonne le taux plancher CHF/EUR. Cela provoque un vent de panique et rend le marché USD/CHF temporairement illiquide. Conformément aux conditions générales, la banque liquide les positions du client et l’informe, quelques jours plus tard, que son compte est d’une valeur négative de USD 929’075.

La banque ouvre action en paiement contre le client auprès de la Chambre patrimoniale du canton de Vaud. Dans ses allégués n°83 à 86, la banque indique que la liquidation automatique des positions du client s’est soldée par une perte de USD 1’125’991.40 et, qu’après déduction des avoirs en compte du client de USD 193’325.62, le débit du compte était de USD 929’075.

Dans sa réponse, le client conteste ces quatre allégués et dépose une demande reconventionnelle afin que le montant de USD 193’325.62, soit le solde de son compte avant la liquidation, lui soit restitué.… Lire la suite

La demande de révision en raison de motifs de récusation découverts après le rendu de la sentence arbitrale

TF, 11.06.2024, 4A_572/2023*

Les motifs de récusation découverts après la clôture de la procédure arbitrale ne peuvent fonder une demande de révision de la sentence arbitrale (art. 190a al. 1 let. c LDIP) que si ces motifs existent déjà au moment du rendu de la sentence.

Faits

Une société des Émirats arabes unis conclut un contrat avec une société iranienne. Cette dernière s’engage à lui livrer et lui fournir du gaz. Cependant, la société iranienne faillit à ses obligations contractuelles et ne livre jamais le gaz escompté ; un premier tribunal arbitral constate cette violation en 2014.

La société émiratie introduit une seconde procédure arbitrale en 2018 ; la procédure vise à obtenir des dommages-intérêts pour compenser le préjudice causé par la violation contractuelle de la société iranienne. Ce second tribunal arbitral se compose de trois membres, dont l’un est l’arbitre Charles Poncet. En mai 2020, le tribunal arbitral rend une sentence incidente : il y constate qu’une résiliation valable du contrat a eu lieu en 2018.

Charles Poncet anime une émission sur une télévision genevoise depuis 2022. Dans une émission de 2023, il présente sous la forme d’un one man show un monologue qui réprime le comportement de certaines personnes de confession musulmane.… Lire la suite

L’obligation d’assainir les chauffages électriques : violation de la garantie de propriété (art. 26 Cst.) ?

TF, 26.04.2024, 1C_600/2023*

L’obligation d’assainir les chauffages électriques ne constitue pas une atteinte grave à la garantie de propriété (art. 26 Cst.) car elle ne rend pas plus difficile ou impossible l’acquisition, l’aliénation ou l’utilisation de la propriété. Dès lors, elle peut être prévue dans une loi au sens matériel (art. 36 al. 1er Cst.). Les objectifs de protection de l’environnement et d’approvisionnement énergétique suffisant constituent des intérêts publics suffisants pour fonder une telle mesure, même si la législation n’impose pas le remplacement par un système fonctionnant aux énergies renouvelables (art. 36 al. 2 Cst.). Enfin, il s’agit en l’espèce d’une atteinte proportionnée à la garantie de propriété puisqu’elle s’accompagne d’un délai suffisant et de dérogations (art. 36 al. 3 Cst.).

Faits

La loi vaudoise du 16 mai 2006 sur l’énergie (LVLEne) a pour but de promouvoir un approvisionnement énergétique suffisant, diversifié, sûr, économique et respectueux de l’environnement (art. 1 al. 1 LVLEne). Sous réserve d’autorisations exceptionnelles, elle interdit depuis 2013 le montage et le renouvellement de chauffages électriques (art. 30a). Le 20 décembre 2022, le Grand Conseil du canton de Vaud adopte une disposition complémentaire (art.Lire la suite

Les autorisations de l’aménagement du territoire à obtenir pour les exploitants de réseau de télécommunication

TF, 21.03.2024, 1C_416/2022*

L’art. 35 LTC garantit une procédure simple et rapide afin d’obtenir une autorisation d’usage accru du sol ; en revanche, la disposition n’exempte pas les exploitants de réseau de télécommunication de l’exigence d’une autorisation de construire conformément au droit de l’aménagement du territoire.

Faits

Une société exploite un réseau de télécommunication dans un village. Pour parer aux risques d’interruption de réseau, la société souhaite construire une ligne de raccordement supplémentaire. Le service de la construction de la commune en question invite alors la société à déposer une demande de permis de construire.

La société demande à la commune d’autoriser l’installation d’une ligne de raccordement souterraine, toutefois sans ouvrir de procédure formelle d’autorisation de construire ; elle se fonde sur l’art. 35 de la Loi fédérale sur les communications (LTC).

La commune rejette la demande. Sur appel, le Regierungsrat du canton d’Obwald rejette également la demande de la société. Cette dernière forme alors recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, qui est amené à interpréter la portée de l’art. 35 LTC en lien avec les exigences de l’aménagement du territoire.

Droit

L’art. 22 LAT pose le principe de l’autorisation de construire à l’égard des installations et constructions à créer ou transformer.… Lire la suite