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L’indemnisation en cas de note de frais tardive

ATF 146 IV 332 | TF, 17.09.20, 6B_130/2020*

Lorsque l’autorité enjoint au prévenu de chiffrer et de justifier ses prétentions selon l’art. 429 al. 2 CPP, celui-ci a un devoir de collaboration. Un comportement passif du prévenu – par exemple en cas de dépôt tardif de la note de frais, soit après l’expiration du délai imparti à cet effet – peut ainsi équivaloir à une renonciation implicite. Dans un tel cas, l’indemnité pour les frais de défense ne doit pas être fixée d’office.

Faits

Suite à une querelle de quartier, le Ministère public du canton de Thurgovie ouvre une procédure pénale à l’encontre de plusieurs individus. Par la suite, la procédure est toutefois classée. Le Ministère public met alors les frais à la charge de l’État, mais ne verse pas d’indemnité pour frais de défense à un prévenu représenté par un avocat et également partie plaignante dans cette affaire.

Le prévenu précité recourt contre la décision du Ministère public, mettant notamment en cause le refus d’indemnisation et concluant à ce qu’il lui soit versé une indemnité à hauteur d’environ CHF 6’700. Le Tribunal cantonal thurgovien rejette le recours, concluant à une renonciation implicite à l’indemnisation en raison du fait que la note de frais de l’avocat n’a été déposée qu’après l’expiration du délai imparti – et prolongé – à cet effet (plus précisément cinq jours après l’expiration du délai fixé par le Ministère public et le lendemain de l’ordonnance de classement). … Lire la suite

Le bachelor en droit suisse comme condition d’admission au stage d’avocat

ATF 146 II 309 | TF, 31.01.2020, 2C_300/2019*

Le bachelor en droit suisse ou un diplôme équivalent est une condition nécessaire à l’admission au stage d’avocat. Le seul master en droit suisse ne permet pas d’assurer que les avocats stagiaires disposent des connaissances minimales en droit suisse nécessaires à l’exercice de leur activité.

Faits

Une Suissesse requiert son inscription au registre vaudois des avocats stagiaires. Celle-ci a obtenu divers diplômes en économie, gestion et droit dans une université française, ainsi qu’un master en droit avec mention « droit international et comparé » à l’Université de Lausanne. L’autorité compétente rejette son inscription au motif qu’elle ne dispose pas d’un bachelor en droit suisse ou d’un diplôme équivalent ; aucun des diplômes obtenus en France par la requérante ne sanctionnant des études de droit suisse.

Considérant que le master en droit suisse est une condition suffisante pour l’accès au stage d’avocat, l’intéressée fait recours au tribunal cantonal, puis au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur la question de savoir si l’art. 21 al. 1 LPav/VD viole le principe de primauté du droit fédéral (art. 49 al. 1 Cst) en posant des exigences plus strictes à l’admission au stage d’avocat que l’art.Lire la suite

La publication d’un blâme à l’encontre d’un avocat, une sanction illicite ?

CDAP (VD), 16.01.20202, GE.2017.0188

La publication d’une décision prononçant un blâme à l’encontre d’un avocat est contraire à la LLCA si le nom de l’avocat, même caviardé, est reconnaissable à la lecture de la décision.

Faits

Dans la cadre d’une procédure disciplinaire, la Chambre des avocats du canton de Vaud prononce un blâme à l’encontre d’un avocat (art. 17 al. 1 let. b LLCA). Selon le dispositif de la décision, celle-ci sera publiée, comme toutes les décisions de la Chambre, sur le site Internet officiel de l’État de Vaud, avec toutefois le nom de l’avocat caviardé.

L’avocat dépose un recours devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal afin que cette décision ne soit pas publiée. La Cour doit alors préciser si la publication d’une sanction caviardée respecte la LLCA.

Droit

La Cour rappelle en premier lieu que l’art. 17 LLCA règle de manière exhaustive les mesures disciplinaires pour les avocats. Or le Tribunal fédéral a reconnu récemment que la publication d’une mesure disciplinaire doit être considérée comme une sanction en soi (ATF 143 I 352, résumé in LawInside.ch/480/). Dès lors que la LLCA ne prévoit pas la publication des décisions prises en application de cette loi, une publication constituerait une sanction supplémentaire contraire à la LLCA dans la mesure où l’avocat sanctionné est reconnaissable.… Lire la suite

L’avocat n’est généralement pas un confident nécessaire (art. 173 CP)

ATF 145 IV 462TF, 09.09.2019, 6B_127/2019*

L’avocat n’est généralement pas un confident nécessaire, de sorte qu’il doit être qualifié de tiers. Son mandant peut donc être reconnu coupable de diffamation ou de calomnie s’il lui confie des faits attentatoires à l’honneur de la partie adverse.

Faits

Lors d’un différend portant sur la construction d’un catamaran, l’acheteur, par l’intermédiaire de son avocat, indique au vendeur qu’il le tient personnellement responsable des déboires et du grave préjudice financier qu’il a subis. En effet, il semble que l’argent versé au vendeur ait été utilisé pour la construction d’autres navires, ce qui pouvait relever d’une infraction pénale. Le vendeur avait en outre astucieusement amené l’acheteur à lui verser le montant de € 125’000.- en lui faisant croire qu’à défaut de paiement, le bateau serait perdu. Enfin, une éventuelle procédure de faillite relèverait de la banqueroute.

Suite à ces propos, le vendeur porte plainte contre l’acheteur pour calomnie, diffamation et injure. Le Ministère public du canton de Genève rend une ordonnance de non-entrée en matière, ordonnance confirmée par la Chambre pénale de recours. Celle-ci a estimé en substance que l’avocat était un confident nécessaire et qu’aucun propos attentatoire à l’honneur n’avait été communiqué à un tiers.… Lire la suite

La réparation du préjudice causé à un avocat par un article de presse

TF, 22.8.2019, 5A_562/2018

L’existence d’un intérêt public à la publication d’un article n’implique pas qu’il soit licite de révéler l’identité de la personne concernée.

Les actions en dommages-intérêts et en réparation du tort moral de l’art. 28a al. 3 CC sont indépendantes par rapport à l’action de l’art. 28a al. 1 CC. Dès lors, la réparation du préjudice fondée sur cette norme ne nécessite pas la formulation d’une conclusion en cessation ou en constatation de l’atteinte, même implicite.  

Faits

En décembre 2012, un journal tessinois fait paraître un article, ensuite repris par d’autres médias, selon lequel un avocat du canton se trouverait dans la tourmente après avoir été mêlé à la conclusion d’un « contrat suspect ». En février 2013, le même journal relaie un communiqué du ministère public selon lequel les soupçons visant l’avocat se sont en définitive révélés sans fondement.

L’avocat ouvre action contre diverses personnes physiques et morales impliquées dans la publication de décembre 2012 pour tenter d’obtenir une réparation de son préjudice.

Ses prétentions ayant été rejetées par les instances cantonales, l’avocat recourt devant le Tribunal fédéral, qui examine l’existence d’une atteinte illicite à la personnalité du recourant.

Droit

Aux termes de l’art.Lire la suite