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La résiliation du bail pour cause de rénovation était-elle abusive ?

ATF 148 III 215 | TF, 04.05.2022, 4A_247/2021*

Le bailleur résiliant un contrat de bail dans le but d’effectuer des rénovations peut indiquer le motif de la résiliation jusque devant le tribunal de première instance. La résiliation n’est pas abusive si le bailleur dispose au moment de la notification du congé d’un projet suffisamment mûr et élaboré permettant de déterminer concrètement que la présence du locataire durant les travaux entraverait leur exécution.

Un congé donné à cause de travaux visant notamment à modifier la distribution des locaux, remplacer des cuisines, des salles de bains et l’ensemble des conduites ainsi qu’à renouveler des sols et revêtements muraux n’est pas abusif, car la présence du locataire durant de tels travaux est de nature à entraîner un accroissement des difficultés, du coût et de la durée de la rénovation.

Faits

En juillet 2019, une bailleresse résilie le bail de durée indéterminée d’une locataire avec effet au 31 mars 2020. Elle ne fournit aucune motivation, en dépit de la requête de la locataire.

En novembre 2019, après avoir reçu l’autorisation de procéder à la suite de son opposition à une proposition de jugement de l’autorité de conciliation, la bailleresse dépose une demande devant le Tribunal des baux vaudois.… Lire la suite

La recevabilité d’une action cumulée à une action en libération de dette

TF, 06.07.2022, 4A_592/2021*

L’action cumulée à une action en libération de dette n’est admissible que si elle n’est pas elle-même soumise à la tentative de conciliation préalable ; la recevabilité devant être examinée séparément pour chacune des deux actions. Néanmoins, il y a lieu de faire une exception pour l’action cumulée en restitution de la cédule hypothécaire lorsqu’elle est un simple accessoire de l’inexistence de la créance objet de l’action en libération de dette.

Faits

Un créancier prête CHF 250’000 à un débiteur moyennant la remise d’une cédule hypothécaire au porteur. À l’échéance du prêt, le débiteur ne rembourse que CHF 200’000 estimant que le créancier lui a remis partiellement la dette pour un montant de CHF 50’000.

Le créancier met le débiteur aux poursuites pour ce montant de CHF 50’000. Suite à l’opposition du débiteur, le créancier en obtient la mainlevée provisoire. Le débiteur introduit dès lors une demande en libération de dette (art. 83 al. 2 LP), laquelle ne doit pas être précédée d’une procédure de conciliation (art. 198 let. e ch. 1 CPC) – et conclut (i) à ce qu’il soit constaté qu’il n’était pas le débiteur du montant de CHF 50’000 et (ii) à ce que le défendeur libère et lui restitue la cédule hypothécaire.Lire la suite

La validité de l’autorisation de procéder délivrée par une autorité de conciliation incompétente à raison du lieu

ATF 146 III 265TF, 17.03.2020, 4A_400/2019*

Le défendeur qui participe à la procédure de conciliation sans remettre en question la compétence ratione loci de l’autorité de conciliation ne peut plus invoquer par la suite la question de l’incompétence de cette autorité. En revanche, lorsque le défendeur fait défaut lors de la conciliation ou conteste, dans le cadre de celle-ci, la compétence ratione loci de l’autorité de conciliation, il peut contester la validité de l’autorisation de procéder lors de la procédure au fond et exiger que la conciliation soit répétée. 

Faits

Après une tentative de conciliation infructueuse, une société dépose une demande en paiement dirigée contre une deuxième société devant un tribunal neuchâtelois en se fondant sur une clause de prorogation de for. Une troisième société est appelée en cause.

Le tribunal neuchâtelois se déclare incompétent à raison du lieu, de sorte qu’une nouvelle demande est déposée devant un tribunal bernois. Par décision incidente, ce dernier la déclare recevable malgré l’absence d’autorisation de procéder délivrée par une autorité compétente. La Cour suprême du canton de Berne ayant admis l’appel formé contre cette décision incidente par la défenderesse et l’appelée en cause, la société demanderesse recourt auprès du Tribunal fédéral, concluant à ce que son action devant le tribunal bernois soit déclarée recevable.… Lire la suite

La renonciation d’un commun accord à la procédure de conciliation

ATF 146 III 185TF, 05.02.2020, 4A_416/2019*

En dehors des exceptions prévues par le Code de procédure civile, les parties sont tenues de mener une procédure de conciliation. Si la défenderesse déclare à l’avance qu’elle ne participera pas à l’audience de conciliation, l’autorité de conciliation ne peut pas dispenser la demanderesse de participer à l’audience.

Faits

Une demanderesse dépose auprès de la justice de paix argovienne une requête de conciliation pour une action contractuelle d’un montant de CHF 30’000. Peu après le dépôt de la requête, la défenderesse informe le juge de paix que ni elle ni la demanderesse ne se présenteront à l’audience de conciliation. La demanderesse le confirme en envoyant une demande de dispense de comparaître à l’audience de conciliation et d’autorisation de procéder au fond. Le juge de paix accède à la requête de la demanderesse et délivre ladite autorisation de procéder.

La demanderesse dépose ainsi sa demande au fond au Tribunal de district de Kulm. Celui-ci ne se saisit pas de l’affaire faute de s’être vu remettre une autorisation de procéder valable, la demanderesse ne s’étant en effet pas rendue à l’audience de conciliation pourtant obligatoire au vu des art. 198 et 199 CPC.… Lire la suite

Le principe de publicité de la justice et les pourparlers transactionnels

ATF 146 I 30 | TF, 24.09.2019, 4A_179/2019*

Le principe de publicité de la justice (art. 6 CEDH, art. 30 al. 3 Cst. et art. 54 CPC) ne s’applique pas aux pourparlers menés en vue d’un règlement amiable du litige, indépendamment du stade de la procédure auquel le juge tente la conciliation.

Faits

Une correspondante judiciaire assiste à des débats principaux devant l’Arbeitsgericht de Zurich dans le cadre d’un litige impliquant une filiale d’une grande banque suisse. Après les débats principaux, les parties tiennent une séance de pourparlers transactionnels en vue d’un règlement amiable. La correspondante judiciaire est exclue de ces pourparlers. Elle recourt sans succès contre la décision de tenir les pourparlers à huis clos auprès de l’Obergericht du canton de Zurich, puis porte le litige devant le Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral doit déterminer si l’exclusion de la correspondante judiciaire des pourparlers transactionnels était licite au regard du principe de publicité ancré aux art. 30 al. 3 Cst. et 54 CPC.

Droit

Le Tribunal fédéral souligne tout d’abord que le droit cantonal peut prévoir des exceptions au principe de publicité lorsque la protection d’un intérêt public ou privé d’une partie le justifie (art.Lire la suite