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L’abus de droit en lien avec la loi sur les résidences secondaires

ATF 145 II 99 | TF, 03.12.2018, 1C_69/2018*

Les autorités saisies d’une demande de permis de construire doivent analyser d’office s’il existe des indices concrets que la demande est constitutive d’une fraude à la loi. Tel est en particulier le cas lorsqu’il paraît vraisemblable qu’une résidence principale ne pourra pas être commercialisée en tant que telle et que le requérant pourra donc potentiellement demander la suspension de la charge imposant l’utilisation en tant que résidence principale (art. 14 al. 1 let. b LRS).

Faits

Deux requérants déposent une demande de permis pour démolir deux bâtiments et construire trois nouveaux chalets sur la même parcelle, à Saanen. Il est prévu que chacun des chalets comprenne deux appartements de trois pièces et deux appartements de quatre pièces. La construction d’un espace fitness et wellness est également planifiée.

La commune de Saanen octroie le permis et rejette les oppositions des voisins. Suite à l’admission d’un recours intenté par les opposants, l’affaire est renvoyée à la commune pour qu’elle vérifie la conformité avec l’art. 75b Cst. Les requérants déposent alors une version modifiée du projet en prévoyant explicitement que les habitations seront utilisées comme résidences principales. La commune octroie l’autorisation, cette fois sous réserve de l’inscription au registre foncier d’une servitude imposant l’utilisation des habitations en tant que résidences principales.… Lire la suite

Les résidences secondaires (art. 75b Cst.) et l’expropriation matérielle

ATF 144 II 367 | TF, 06.08.2018, 1C_216/2017*

La limitation de la construction de résidences secondaires introduite par l’art. 75b Cst. constitue une concrétisation et non une restriction de la propriété (art. 26 Cst.). Partant, elle ne donne en principe pas droit à une indemnité pour expropriation matérielle. Dans le cas d’espèce, il n’y a pas non plus de circonstance particulière justifiant une indemnité fondée sur une inégalité de traitement crasse.

Faits

Dans une commune comptant plus de 20 % de résidences secondaires, une société de construction se voit refuser un permis de construire (demandé le 6 juin 2012) pour un chalet résidentiel de 4 appartements, au motif qu’elle souhaite vendre ses appartements tant comme résidences secondaires que principales.

La société demande à la commune une indemnité pour expropriation matérielle mais la commune refuse d’entrer en matière. Elle forme alors une demande en indemnisation dirigée contre la commune auprès de la Commission d’estimation. Cette dernière rejette la requête et sa décision est confirmée sur recours par le Tribunal cantonal.

La société dépose un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, invoquant une violation de la garantie de propriété (art. 26 Cst.). Le Tribunal fédéral doit ainsi déterminer quelle serait l’autorité compétente pour attribuer une éventuelle indemnité pour expropriation matérielle en raison de la législation de limitation des résidences secondaires, ainsi que si l’interdiction de construire des résidences secondaires constitue une restriction à la propriété susceptible de donner lieu à une indemnisation pour expropriation matérielle.… Lire la suite

L’application de la LRS aux autorisations de construire contestées par un recours au 1.1.2016 (art. 25 LRS)

ATF 144 II 326TF, 24.05.2018, 1C_238/2017*

L’art. 25 al. 1 LRS assujettit aux dispositions de la LRS les demandes de permis de construire contestées par un recours et par conséquent non entrées en force au 1er janvier 2016, même si elles ont été admises en première instance avant cette date.

Faits

En 2010, la commune d’Ayent délivre une autorisation de construire un immeuble résidentiel de huit appartements avec parking souterrain. En 2013, Le Conseil d’Etat rejette un recours contre cette autorisation, mais astreint les constructeurs à déposer des plans complémentaires relatifs à des modifications qu’ils ont proposées en cours de procédure (sortie de secours ; installations de ventilation du garage souterrain). Ces plans devront être approuvés par la Commune avant la délivrance du permis d’habiter. Cette décision est confirmée par le Tribunal cantonal, puis par le Tribunal fédéral.

Le 29 mai 2015, les propriétaires déposent les plans complémentaires relatifs aux modifications précitées ainsi qu’à l’espace communautaire extérieur et à la circulation le long de l’accès projeté. Ils demandent la délivrance d’une autorisation de construire complémentaire à celle de 2010. Le 10 décembre 2015, la commune approuve les plans complémentaires et délivre l’autorisation de construire. Cette décision est confirmée par le Conseil d’Etat le 24 août 2016, puis par le Tribunal cantonal le 10 mars 2017.… Lire la suite

L’abus de droit en matière de résidences secondaires

ATF 144 II 49TF, 16.01.18, 1C_102/2017*

Dans les communes qui comptent une proportion de résidences secondaires supérieure à 20 % et lorsque la demande de résidences principales ne peut être établie (art. 14 al. 1 let. b LRS), la construction ne peut être autorisée qu’à condition que l’achat par des habitants à l’année fasse l’objet d’engagements sérieux et concrets avant même la construction. 

Faits

Le Conseil municipal de la commune de Bagnes octroie à un particulier une autorisation de construire deux chalets d’habitation à Verbier, lesquels seraient destinés exclusivement aux fins de résidence principale.

Helvetia Nostra s’oppose à la demande de permis devant les diverses instances cantonales. Selon l’association, le comportement du requérant du permis serait constitutif d’un abus de droit dans la mesure où les chalets ne seront vraisemblablement pas utilisés en tant que résidences principales conformément à la loi sur les résidences secondaires (LRS ou Lex Weber). Le Tribunal cantonal valaisan estime toutefois qu’un abus de droit ne peut être retenu, les chalets – situés à 4 minutes en voiture du centre de la station – étant accessibles toute l’année, leur typologie étant adaptée à une résidence principale et la population résidente de Verbier ayant baissé, de sorte que la demande en résidences principales est relativement modeste.… Lire la suite

Le plan de quartier “Aminona-Ouest”

TF, 13.01.2016, 1C_568/2014, 1C_576/2014

Faits

Le hameau d’Aminona est affecté en zone constructible touristique selon le plan communal d’affectation des zones (ci-après : le PAZ) (2000) et le règlement communal des constructions et des zones (ci-après : le RCCZ) (2002). En 2010, après avoir écarté les oppositions d’Helvetia Nostra et de la Fondation suisse pour la protection et l’aménagement du paysage (ci-après : les opposants), la commune a adopté le plan de quartier « Aminona-Ouest » et son règlement d’application. Ce plan couvre une zone, déjà constituée de trois tours, d’un vaste projet touristique. Il prévoit la construction de cinq autres tours destinées à accueillir des hôtels, des apparthôtels, de la parahôtellerie et des commerces, ainsi qu’une place avec parking souterrain. Le règlement du plan de quartier prévoit que la répartition des affectations des surfaces habitables (résidences principales, résidences secondaires, etc.) sera précisée avant l’autorisation de construire.

Sur recours des opposants, le Conseil d’Etat a confirmé et homologué l’adoption du plan en mars 2013. Cette décision a été confirmée en dernière instance cantonale. Les opposants saisissent le Tribunal fédéral et demandent l’annulation des décisions et arrêts précités. Le Tribunal fédéral doit déterminer si la commune a violé l’art. 75b Cst. en raison de la mention des résidences secondaires comme affectation possible et l’art.Lire la suite