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Le défaut de réponse lors d’un appel (art. 312 CPC) | l’exclusion d’un associé d’une Sàrl (art. 823 CO)

ATF 144 III 394 | TF, 17.07.2018, 4A_629/2017*

Le fait qu’une partie ne dépose pas de réponse à l’appel ne dispense pas l’instance d’appel d’examiner toutes les questions de droit et de fait soulevées ou débattues devant sa juridiction. Si elle ne traite pas l’une de ces questions, elle viole le droit d’être entendu de la partie succombante.

Lorsque le juge analyse la question de l’existence d’un “juste motif” d’exclusion d’un associé au sens de l’art. 823 CO, il doit notamment vérifier le caractère raisonnable du maintien de la qualité d’associé. Ce caractère raisonnable doit être jugé différemment selon qu’il existe, au sein de la société, des liens étroits entre les associés ou non.

Faits

Une société à responsabilité limitée détient, en tant qu’associée, 30 % de parts dans une seconde société à responsabilité limitée (seconde Sàrl). Cette seconde Sàrl dépose auprès du Kantonsgericht de Zoug une demande d’exclusion de la première Sàrl en sa qualité d’associée (art. 823 CO). Le Kantonsgericht admet la demande et exclut la Sàrl associée de la seconde Sàrl pour trois motifs distincts, notamment en raison d’une situation conflictuelle entre les parties qui dure depuis des années.

La Sàrl associée exclue dépose un appel auprès de l’Obergericht  ; la seconde Sàrl ne dépose aucune réponse dans le délai légal.… Lire la suite

La qualité de partie dans la procédure d’entraide judiciaire internationale en matière civile

TF, 29.08.2017, 4A_167/2017

Dans une procédure judiciaire d’entraide en matière civile, le titulaire du compte bancaire n’est pas partie à la procédure d’exécution suisse et ne peut donc pas être entendu par le juge de l’exécution suisse. Il doit toutefois être entendu par le juge étranger saisi du procès au fond.

Faits

Une juridiction étrangère dépose en Suisse une requête d’entraide judiciaire tendant à ce que les juridictions genevoises invitent une banque à fournir divers documents relatifs à un compte bancaire. La juridiction étrangère ignore en effet le nom du titulaire du compte bancaire.

Le Tribunal de première instance de Genève invite alors la banque à déposer ses observations sur la requête d’entraide. La banque invoque le secret bancaire et conclut qu’elle n’a pas à se soumettre à la requête d’entraide.

Avisé par la banque, le titulaire du compte sollicite à deux reprises l’accès au dossier de la part du Tribunal de première instance. Le Tribunal ne répond toutefois pas aux demandes du titulaire du compte.

Le titulaire du compte dépose un recours auprès de la Cour de justice pour retard injustifié et conclut à ce que la qualité de partie à la procédure d’entraide judiciaire internationale en matière civile lui soit reconnue.… Lire la suite

La qualification des informations accessibles sur Internet comme faits notoires

ATF 143 IV 380 | TF, 20.09.2017, 6B_986/2016*

En ce qui concerne les informations librement accessibles sur Internet, seuls les renseignements bénéficiant d’une empreinte officielle peuvent être qualifiés comme étant des faits notoires.

Faits

Un prévenu publie sur sa page Facebook le message suivant : « J’organise une kristallnacht. Qui est partant pour aller bruler du muzz  » (sic).

Au cours de la procédure, l’autorité pénale recherche la définition du mot « muzz  » sur le site internet « Wiktionnaire  » et retient que celui-ci fait référence à la communauté musulmane dans son ensemble. Considérant que la définition du terme « muzz  » est un fait notoire, car librement accessible sur internet, les instances cantonales n’interpellent pas le prévenu sur la signification de celui-ci.

Les instances cantonales vaudoises concluent que la publication Facebook litigieuse relève d’une incitation à la haine envers les musulmans. Le prévenu est condamné, celui-ci s’étant rendu coupable de discrimination raciale (art. 261bis al. 1 CP).

Le prévenu forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Celui-ci doit déterminer si la définition figurant sur le « Wiktionnaire » du terme « muzz  » est un fait notoire, respectivement si le prévenu aurait dû pouvoir s’exprimer quant à la portée de ce mot en vertu de son droit d’être entendu.… Lire la suite

Les frais de l’opposition en matière d’aménagement du territoire et de constructions

ATF 143 II 467 – TF, 14.06.2017, 1C_266/2016*

Les frais de la procédure d’opposition en matière de planification ainsi qu’en matière d’autorisation de construire doivent en principe être mis à la charge de l’initiateur du projet et non de l’opposant. Ils peuvent exceptionnellement être mis à la charge de l’opposant, lorsque l’opposition apparaît d’emblée manifestement irrecevable ou manifestement infondée au point d’engager la responsabilité de l’opposant au sens de l’art. 41 CO. En revanche, le droit cantonal ne peut pas se contenter de prévoir que l’opposant qui succombe supporte les frais subséquents à une séance de conciliation s’il les a occasionnés sans nécessité.

Faits

Le Parlement de la République et canton du Jura modifie la réglementation de la répartition des frais relatifs aux procédures d’opposition en matière de permis de construire et de plans communaux. Les nouvelles dispositions de la loi cantonale sur les constructions et l’aménagement du territoire (LCAT/JU) prévoient que l’opposant supporte les frais relatifs à la séance de conciliation si l’opposition est manifestement irrecevable ou manifestement infondée. En cas d’échec de la conciliation, les frais subséquents sont mis à la charge de l’opposant qui succombe s’il les a occasionnés sans nécessité.

Après avoir contesté sans succès cette modification législative auprès de la Cour constitutionnelle, des citoyens du canton saisissent le Tribunal fédéral d’un recours en matière de droit public pour faire annuler les dispositions litigieuses.… Lire la suite

La garantie de citation régulière (art. 27 al. 2 let. a LDIP)

ATF 143 III 225 | TF, 30.03.2017, 5A_889/2016*

Faits

Une société sise en Arabie saoudite forme devant le Tribunal de première instance de Dubaï une demande en paiement de CHF 150’000.- contre une société dont le siège est à Zoug en Suisse.

Le Tribunal dubaïote notifie les pièces du dossier à la défenderesse en Suisse et requiert de cette dernière qu’elle en accuse réception, ce à quoi la société ne donne pas suite. Un jugement par défaut est rendu par le Tribunal dubaïote, qui condamne la défenderesse à verser à la demanderesse le montant réclamé.

Sur requête de la demanderesse, le Tribunal de première instance de Zoug déclare le jugement dubaïote exécutoire en Suisse. Sur recours de la défenderesse, le Tribunal cantonal zougois refuse la reconnaissance du jugement dubaïote. Le Tribunal cantonal considère que la défenderesse n’a pas été citée régulièrement, car elle ne se serait pas vue communiquer par le Tribunal dubaïote une citation à comparaître ou un délai pour répondre à la demande en paiement (art. 27 al. 2 let. a LDIP).

La demanderesse forme un recours en matière civil au Tribunal fédéral qui doit déterminer si la défenderesse a été citée régulièrement dans la procédure judiciaire à Dubaï, respectivement si le jugement dubaïote doit être reconnu en Suisse (art.Lire la suite