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Être “ami” sur Facebook, un motif de récusation ?

ATF 144 I 159TF, 14.05.2018, 5A_701/2017*

En l’absence d’autres éléments, le seul fait d’être « ami » sur Facebook ne saurait suffire à démontrer le lien d’amitié propre à fonder un motif de récusation. 

Faits

A la requête du père, l’Autorité de protection de l’enfant et de l’adulte de Monthey (l’ « APEA ») institue une autorité parentale conjointe. La mère recourt contre cette décision au Tribunal cantonal et, se prévalant d’un motif de récusation, sollicite l’annulation de tous les actes de procédure auxquels le président de l’APEA a participé, motif pris qu’il est ami sur Facebook avec le père de l’enfant.

Le Tribunal cantonal valaisan rejette la requête de récusation de la mère, laquelle recourt au Tribunal fédéral. Celui-ci est amené à déterminer quelle est la portée, en matière de récusation, d’un lien d’amitié sur Facebook. Le Tribunal fédéral met en œuvre une procédure de coordination de la jurisprudence au sens de l’art. 23 al. 2 LTF.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par rappeler que, de jurisprudence constante, des liens d’amitié ou une inimitié peuvent créer une apparence objective de partialité (et donc un motif de récusation) à condition qu’ils soient d’une certaine intensité.

Cela dit, il considère que le terme d’ « ami » employé pour désigner les personnes qui acceptent d’entrer en contact sur Facebook ne renvoie pas à des relations d’amitié au sens traditionnel tel que l’entend cette jurisprudence constante.… Lire la suite

La production de preuve par Facebook Switzerland

ATF 143 IV 21TF, 16.11.16, 1B_185/2016*

Faits

Un journaliste fait l’objet de diffamations sur Facebook et dépose une plainte pénale contre inconnu. Le ministère public requiert de la société Facebook Switzerland Sàrl la production de l’identité du détenteur du compte et les adresses IP utilisées pour poster les commentaires injurieux sous menace de la peine prévue par l’art. 292 CP. Facebook Switzerland recourt au Tribunal cantonal, puis au Tribunal fédéral en soulevant qu’elle ne possède pas ces données et qu’une ordonnance de production de preuve ne peut pas être rendue à son encontre.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle qu’une décision de production de pièces est une décision incidente, sujette à recours notamment si elle cause un préjudice irréparable (cf. art. 93 al. 1 lit. b LTF). Tel est le cas lorsqu’une décision de ce type est assortie des peines prévues à l’art. 292 CP, comme en l’espèce. Partant, le recours en matière pénale est ouvert.

L’ordre de dépôt (art. 265 CPP) permet au ministère public d’obtenir auprès de leurs détenteurs les objets ou valeurs qui feront l’objet d’un séquestre. L’art. 265 CPP ne nécessite pas l’accord du tribunal des mesures de contrainte, contrairement à la surveillance de la correspondance par poste ou télécommunication (cf.… Lire la suite

Le respect d’une ordonnance de mesures superprovisionnelles sur les réseaux sociaux

ATF 142 III 587TF, 11.07.2016, 4A_406/2015*

Faits

Une société demande en mesures provisionnelles et superprovisionnelles qu’il soit fait interdiction à une seconde société d’utiliser un symbole quasiment identique à sa propre marque. Le Handelsgericht argovien accepte la demande et ordonne à la seconde société de ne plus utiliser ce symbole dans ses relations commerciales, notamment sous peine de devoir s’acquitter d’une amende d’ordre de 1000 francs au plus pour chaque jour d’inexécution.

Trois mois plus tard, l’interdiction est confirmée par jugement sur mesures provisionnelles et la seconde société est condamnée à une amende d’ordre de 48’000 francs pour non-exécution pendant 48 jours de l’interdiction d’utiliser le symbole. Ce jugement repose sur le fait que le symbole était encore utilisé par la seconde société sur différents réseaux sociaux (Instagram, Facebook, Twitter, YouTube).

La seconde société exerce un recours en matière civile contre cette amende d’ordre auprès du Tribunal fédéral. Ce dernier doit examiner si l’amende d’ordre, ainsi que son montant, était bel et bien justifiée.

Droit

L’art. 343 al. 1 let. c CPC prévoit que, lorsque la décision prescrit une obligation de faire, de s’abstenir ou de tolérer, le tribunal de l’exécution peut prévoir une amende d’ordre de 1000 francs au plus pour chaque jour d’inexécution.… Lire la suite

L’invalidation du Safe Harbor (arrêt Facebook)

CJUE, aff. C-362/14, ECLI:EU:C:2015:650 (Schrems)

Faits

Le réseau social Facebook transfère tout ou partie des données personnelles de ses utilisateurs (noms, prénoms, photos, mots de passe…) vers des serveurs situés aux Etats-Unis. Maximilien Schrems, ressortissant autrichien et utilisateur de Facebook, estime que le droit américain n’offre pas une protection suffisante de ses données personnelles et demande aux autorités irlandaises d’interdire leur transfert depuis l’UE vers les Etats-Unis. L’autorité de protection des données irlandaise s’estime incompétente pour vérifier une telle requête dès lors qu’elle estime que la Décision 2000/520 de la Commission européenne l’en empêcherait.

Saisie d’un recours par Schrems, la High Court irlandaise décide de sursoir à statuer et pose à la CJUE la question de savoir si les autorités nationales peuvent examiner la légalité d’un transfert de données vers les Etats-Unis.

Droit

Selon l’art. 25 par. 1 de la Directive 95/46 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données (ci-après la Directive 95/46), « le transfert vers un pays tiers de données à caractère personnel […] ne peut avoir lieu que si […] le pays tiers en question assure un niveau de protection adéquat ». L’examen du niveau de protection adéquat s’examine au regard de l’ensemble des circonstances du transfert des données (art.Lire la suite

Un statut Facebook peut-il être une menace alarmant la population (CP 258) ?

ATF 141 IV 215 | TF, 08.04.2015, 6B_256/2014*

Faits

Alors qu’il vient de rater son examen de maturité et qu’il est déçu de n’avoir reçu que peu de messages Facebook pour son anniversaire, un jeune publie un statut Facebook dans lequel il indique “Je vous anéantis tous (…) PAN ! ! ! PAN ! ! ! PAN ! ! !” (traduction libre du suisse-allemand). Ce statut est visible pour ses 290 amis ainsi que les amis de ceux qui likent ce statut.

Le Ministère public zurichois le condamne pour “Menaces alarmant la population” au sens de l’art. 258 CP. Suite à un recours, le juge unique, puis l’Obergericht le condamnent uniquement pour tentative de menaces alarmant la population. L’Obergericht retient que le cercle de personnes qu’il atteint avec son statut Facebook ne peut être considéré comme un cercle privé, mais, au contraire, que la menace est faite publiquement (jugement de l’Obergericht zurichois du 25.11.2013, SB130371). Le jeune recourt alors au Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral doit trancher la question de savoir si une menace générale publiée sur Facebook peut tomber sous le coup de l’art. 258 CP.

Droit

L’art. 258 CP prévoit que “Celui qui aura jeté l’alarme dans la population par la menace ou l’annonce fallacieuse d’un danger pour la vie, la santé ou la propriété sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire”.… Lire la suite