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Le prévenu irresponsable et la réduction ou le refus de son indemnité au sens de l’art. 429 CPP

ATF 145 IV 94TF, 07.12.2018, 6B_822/2018*

L’indemnité due au prévenu au sens de l’art. 429 CPP peut être réduite ou refusée en application analogique de l’art. 419 CPP lorsque le prévenu irresponsable supporte en partie ou en totalité les frais de procédure.

Faits

Un prévenu réalise les conditions objectives de plusieurs infractions et est reconnu pénalement irresponsable pour celles-ci par le tribunal compétent ainsi que par l’instance d’appel. Ayant déclaré le prévenu irresponsable dans la commission de ces infractions, les juges cantonaux mettent une partie des frais à sa charge en application de l’art. 419 CPP. Ils lui refusent en outre une indemnité au sens de l’art. 429 CPP au motif qu’il n’est pas acquitté (pour la décision du Tribunal cantonal, voir jugement de la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 5 juin 2018 (n° 189 PE15.014821-CMS/SOS)).

Le prévenu recourt au Tribunal fédéral, qui est amené à trancher la question de savoir si l’indemnité prévue à l’art. 429 CPP peut, à certaines conditions, être refusée ou réduite lorsque le prévenu est irresponsable.

Droit

L’art. 429 CPP prévoit qu’en cas d’acquittement total ou partiel ou d’ordonnance de classement, le prévenu a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure, pour le dommage économique subi au titre de sa participation obligatoire à la procédure pénale ainsi que pour la réparation du tort moral subi en raison d’une atteinte particulièrement grave à sa personnalité.… Lire la suite

L’indemnisation de l’avocat stagiaire pour une nomination d’office

TF, 06.03.2018, 6B_659/2017

Un avocat stagiaire ne peut facturer autant d’heures qu’un avocat indépendant. Une instance cantonale ne peut donc retenir qu’un stagiaire déploie une activité de huit heures journalières facturables afin de fixer l’indemnité qui lui est due.

Faits

Le Tribunal de police de Genève condamne un prévenu et accorde à son défenseur d’office une indemnité de CHF 1’504.50 comprenant notamment 13h50 d’activité d’un avocat stagiaire au tarif horaire de CHF 65.

La Chambre pénale d’appel et de révision rejette le recours formé par le défenseur d’office contre la décision d’indemnisation. La Chambre fonde son raisonnement sur le coût supporté par un maître de stage pour un avocat stagiaire à plein temps, lequel déploie une activité de 40 heures par semaine et effectue des heures supplémentaires non rémunérées et non compensées par son temps libre. Elle arrive ainsi à la conclusion que le coût horaire d’un avocat stagiaire est de CHF 31.70, soit un montant bien inférieur à la rémunération de CHF 65/h prévue par le Règlement sur l’assistance juridique et l’indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d’office en matière civile, administrative et pénale (RAJ/GE). Le maître de stage dégage ainsi un bénéfice important lorsque son avocat stagiaire déploie une activité dans le cadre d’une nomination d’office.… Lire la suite

L’abus de droit de l’autorité qui requiert un séquestre

ATF 143 III 279 | TF, 15.05.2017, 5A_745/2016*

Faits

La Cour d’appel pénale du canton de Vaud condamne l’Etat de Vaud à payer à un (ex)détenu environ CHF 40’000 pour « détention injustifiée ». Le 10 décembre 2013, l’Etat de Vaud verse cette somme sur le compte « clients » du défenseur d’office de l’indemnisé.

Cependant, le 9 décembre 2013 – soit un jour avant – l’Etat de Vaud avait requis le séquestre de ce montant en garantie de diverses prétentions. Le Juge de paix du district de Lausanne donne une suite favorable à cette requête et met sous séquestre les avoirs en mains du défenseur d’office.

L’indemnisé porte plainte contre l’exécution du séquestre. L’autorité inférieure de surveillance LP admet la plainte et révoque le séquestre. En revanche, sur recours de l’Etat de Vaud, l’autorité supérieure de surveillance réforme cette décision en ce sens que la plainte est rejetée et le séquestre maintenu.

L’indemnisé recourt au Tribunal fédéral lequel est amené à déterminer si le fait pour l’Etat de Vaud de verser un montant en ayant au préalable requis le séquestre est constitutif d’un abus de droit.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par rappeler que la créance de la collectivité publique relative aux frais de procédure ne peut pas être compensée avec la réparation du tort moral allouée à titre de détention injustifiée (ATF 139 IV 243 ).… Lire la suite

Le tarif applicable au calcul de l’indemnité pour frais de défense

ATF 142 IV 163TF, 10.03.2016, 6B_928/2014*

Faits

Le Tribunal pénal fédéral condamne un prévenu pour faux dans les titres et l’acquitte de nombreuses autres infractions. Dans son jugement, il condamne la Confédération à verser au prévenu, parmi d’autres montants, environ 165’000 francs pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure (art. 429 al. 1 let. a CPP). Le Tribunal pénal fédéral fixe le taux horaire à 230 francs, en se fondant sur l’art. 12 du règlement du Tribunal pénal fédéral sur les frais (RFPPF), qui prévoit un tarif horaire de 200 francs au minimum et de 300 francs au maximum.

Contre cette décision, le prévenu forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. Il conclut notamment à ce que la Confédération soit condamnée à l’indemniser d’environ 400’000 francs et non pas de 165’000 francs. En substance, le prévenu considère que le Tribunal pénal fédéral n’aurait pas dû se fonder sur le RFPPF, mais sur le tarif horaire du barreau genevois, dans la mesure où son avocat a son Etude dans le Canton de Genève.

Le Tribunal fédéral doit donc se déterminer sur la question de savoir si un tribunal peut fixer le montant de l’indemnisation pour les frais de défense en se fondant sur le règlement cantonal ou, à défaut de règlement, selon le tarif usuel applicable dans le canton où il se trouve, ou s’il doit plutôt se fonder sur le tarif pratiqué au lieu où l’avocat a son Etude.… Lire la suite

L’indemnisation du dommage causé par une procédure pénale

ATF 142 IV 237TF, 18.04.2016, 6B_1061/2014*

Faits

Un enseignant d’une école zougoise est accusé d’avoir abusé sexuellement d’une de ses élèves pendant une période s’étendant sur deux ans. L’école suspend la relation de travail avec l’enseignant, suite à sa mise en détention. Quelques mois plus tard, l’école met fin à la relation de travail.

Le tribunal de première instance acquitte l’enseignant de toute charge et lui reconnaît une indemnité pour la période de détention provisoire (2’400 francs), une indemnité pour les frais de défense (65’000 francs) ainsi qu’une réparation de son tort moral (20’000 francs). Débouté en appel, l’enseignant saisit le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière pénale. Il demande le paiement d’une indemnité pour la perte de son salaire à déterminer équitablement par le juge, mais de 235’889.10 francs au moins.

Le Tribunal fédéral doit donc trancher la question de savoir si les autorités pénales doivent indemniser le prévenu (acquitté) des salaires qu’il n’a pas perçus suite à un licenciement imputable à la poursuite pénale.

Droit

Si le prévenu est acquitté totalement ou en partie, il a droit à une indemnité pour le dommage économique subi au titre de sa participation obligatoire à la procédure pénale (art.Lire la suite