Articles

Le recours au Tribunal fédéral contre l’annulation d’une loi cantonale par une cour constitutionnelle cantonale

ATF 149 I 81 | TF, 23.12.2022, 2C_407/2021*

Un recours abstrait formé au Tribunal fédéral (art. 82 let. b LTF) contre l’annulation d’une loi cantonale par une cour constitutionnelle cantonale est en principe irrecevable en raison de l’absence d’acte attaquable. Le recours reste néanmoins ouvert pour faire valoir des griefs procéduraux, se plaindre du non-respect de l’obligation de légiférer, voire d’une violation de l’autonomie communale.

Faits

Le Conseil d’Etat du canton de Vaud modifie le règlement sur les vins vaudois (RVV), lequel définit notamment les régions viticoles (art. 2 ss) et les exigences en matière d’appellations d’origine contrôlées (art. 13 ss). Concernant les régions viticoles, il est ainsi prévu que la région de Champagne comprend le territoire de la commune de Champagne (art. 3 al. 1 let. i RVV). La commune de Champagne devient également une appellation d’origine contrôlée (cf. art. 4 al. 1 et 13a RVV).

Le Comité interprofessionnel français du vin de Champagne et un importateur adressent à la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal vaudois une requête tendant au contrôle abstrait des dispositions modifiées du RVV. La commune de Champagne et la Communauté de la vigne et du vin de la commune de Champagne (la « Communauté ») demandent d’intervenir dans la procédure, ce qui leur est refusé.… Lire la suite

La contestation de la non-réélection d’un juge cantonal en raison de son âge

ATF 147 I 1TF, 16.07.2020, 1C_295/2019, 1C_357/2019*

L’élection de juges cantonaux par le parlement cantonal est une décision rendue dans une cause de droit public au sens de l’art. 82 let. a LTF, lorsque le recourant fait valoir qu’elle porte atteinte à ses droits fondamentaux ou à d’autres intérêts qui nécessitent une protection juridique. Il s’agit par ailleurs d’une décision à caractère politique prépondérant selon l’art. 86 al. 3 LTF. Sur le fond, exclure la réélection des juges cantonaux qui ont 65 ans révolus au début de la nouvelle période de fonction n’est pas une discrimination inadmissible (art. 8 al. 2 Cst.). En revanche, cette pratique peut conduire à des différences de traitement injustifiées au sens de l’art. 8 al. 1 Cst. entre les juges qui atteignent 65 ans peu avant le début de la nouvelle période de fonction et ceux qui les atteignent peu après.

Faits

Un juge du Tribunal administratif du canton de Zurich, né en 1952, se présente à sa réélection pour la période de fonction 2019-2025, en précisant à la conférence inter-groupes chargée de préparer l’élection qu’il entend exercer seulement jusqu’à ses 70 ans. En raison d’une décision qu’elle a prise en 2010 de ne pas proposer au Grand Conseil la réélection des juges des tribunaux cantonaux supérieurs qui ont déjà 65 ans révolus au début de la nouvelle période de fonction, la conférence ne propose pas sa réélection.… Lire la suite

La voie de recours pour soulever une tromperie lors d’une récolte de signatures au niveau fédéral (art. 80 al. 2 LDP)

ATF 146 I 126 | TF, 24.03.2020, 1C_134/2020*

Le recours dirigé contre une décision d’aboutissement d’un référendum prononcée par la Chancellerie fédérale est irrecevable (art. 80 al. 2 LDP).

Faits

La Chancellerie fédérale constate l’aboutissement de la demande de référendum contre la modification du 27 septembre 2019 de la loi fédérale sur les allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité (LAPG), laquelle introduit une allocation de paternité (FF 2020 1171).

Le parti socialiste neuchâtelois ainsi que des particuliers interjettent un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Ils font valoir que des irrégularités entachent la récolte de signatures et rendent la validation de la demande de référendum contraire à la garantie des droits politiques (art. 34 Cst.). Des articles de presse relatent en effet que des signatures auraient été obtenues en présentant la demande de référendum comme un objet « pour le congé paternité » (p. ex. RTS, « Méthodes “trompeuses” pour récolter les signatures contre le congé paternité », 6.12.2019 [dernière consultation le 3.7.2020]).

Cette saisine conduit le Tribunal fédéral à examiner si une voie de droit est ouverte contre la décision de la Chancellerie fédérale constatant l’aboutissement d’une demande de référendum (art.Lire la suite

Le contrôle judiciaire des vidéos explicatives de la Chancellerie fédérale

ATF 145 I 1 | TF, 29.10.2018, 1C_163/2018, 1C_239/2018* (1/2)

La publication, par la Chancellerie fédérale, de vidéos explicatives à propos d’une votation fédérale n’est pas par principe contraire au droit à la libre formation de l’opinion des citoyennes et citoyens (art. 34 al. 2 Cst.). Le Tribunal fédéral n’est pas habilité à contrôler le contenu d’une telle vidéo qui est directement issu des explications de vote du Conseil fédéral, dans la mesure où ce contenu ne revêt pas un sens différent dans les deux contextes (art. 189 al. 4 Cst.). Il peut en revanche examiner à la lumière des principes de l’exhaustivité, de l’objectivité, de la transparence et de la proportionnalité le reste du contenu d’une telle vidéo.

Faits

Le 10 juin 2018 a lieu la votation populaire sur la loi sur les jeux d’argent. Selon les résultats finaux provisoires, l’objet est accepté, avec 72,9 % de oui contre 27,1 % de non.

Par le biais de deux recours au Conseil d’État du canton de Zoug, le parti pirate suisse ainsi qu’un citoyen font valoir une violation de la liberté de vote (art. 34 al. 2 Cst.) en raison d’interventions dans la campagne de la Conférence des gouvernements cantonaux, de la Conférence spécialisée des membres de gouvernement concernés par la loi sur les loteries et le marché des loteries, de Swisslos Loterie intercantonale, de la société du Sport-Toto et de la Chancellerie fédérale respectivement du Département fédéral de justice et police (DFJP).… Lire la suite

Le recours contre la votation concernant la loi sur le renseignement (LRens)

ATF 143 I 78TF, 14.12.2016, 1C_455/2016*

Faits

La loi sur le renseignement (LRens) a été adoptée par le peuple suisse en votation populaire le 25 septembre 2016 avec 65.5 % des voix. Avant la votation, un citoyen interjette recours au Conseil d’Etat zurichois en demandant que celle-ci n’ait pas lieu ou qu’elle soit annulée, au motif que le canton de Zurich et la Conférence des directeurs de justice et de police des cantons de l’Ostschweiz (OJPD) se seraient immiscés de façon illicite dans la campagne au niveau fédéral. Il critique également le contenu de la brochure informative du Conseil fédéral. Le Conseil d’Etat rejette le recours concernant l’intervention du canton de Zurich et se déclare incompétent concernant l’intervention de la Conférence des directeurs et la brochure du Conseil fédéral. Le citoyen saisit alors le Tribunal fédéral d’un recours en matière de droit public.

Droit

En cas d’irrégularités affectant les votations, la voie du recours au gouvernement cantonal est ouverte (art. 77 al. 1 let. b LDP). Contre la décision du gouvernement cantonal, il est ensuite possible de faire recours en matière de droit public au Tribunal fédéral (art. 82 let. c LTF).

Le Tribunal fédéral commence par admettre la recevabilité des griefs relatifs à l’intervention du canton de Zurich et de l’OJPD, et déclare en revanche irrecevable le recours en ce qui concerne la brochure du Conseil fédéral.… Lire la suite