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La mise sous écoute et le respect des droits fondamentaux

ATF 143 I 292TF, 21.03.2017, 1B_115/2016*

Faits

Un couple est suspecté d’avoir tué son premier bébé et fait subir de graves lésions corporelles au second. Les suspects se refusent toutefois à toute déclaration. En cours d’instruction, le Ministère public ordonne la mise sous écoute du logement du couple pour un mois. Cette mesure est validée, puis prolongée pour un mois supplémentaire par le Tribunal des mesures de contrainte. Une fois informé de la mesure de surveillance, l’un des prévenus en conteste la licéité. Le Tribunal cantonal compétent lui donne raison et ordonne la destruction immédiate des preuves résultant de la mise sous écoute.

Sur recours du Ministère public, le Tribunal fédéral est appelé à préciser à quelles conditions les mesures techniques de surveillance sont admissibles au regard du droit fondamental à la liberté personnelle et du droit à la vie privée.

Droit

Les mesures techniques de surveillance, telles que la mise sur écoute, sont prévues aux art. 280 ss CPP. De telles mesures ne peuvent en principe viser que les prévenus (art. 281 CPP). En outre, par le renvoi de l’art. 281 al. 4 CPP, les conditions d’une surveillance de la correspondance par poste et télécommunication sont applicables par analogie.… Lire la suite

Le respect d’une ordonnance de mesures superprovisionnelles sur les réseaux sociaux

ATF 142 III 587TF, 11.07.2016, 4A_406/2015*

Faits

Une société demande en mesures provisionnelles et superprovisionnelles qu’il soit fait interdiction à une seconde société d’utiliser un symbole quasiment identique à sa propre marque. Le Handelsgericht argovien accepte la demande et ordonne à la seconde société de ne plus utiliser ce symbole dans ses relations commerciales, notamment sous peine de devoir s’acquitter d’une amende d’ordre de 1000 francs au plus pour chaque jour d’inexécution.

Trois mois plus tard, l’interdiction est confirmée par jugement sur mesures provisionnelles et la seconde société est condamnée à une amende d’ordre de 48’000 francs pour non-exécution pendant 48 jours de l’interdiction d’utiliser le symbole. Ce jugement repose sur le fait que le symbole était encore utilisé par la seconde société sur différents réseaux sociaux (Instagram, Facebook, Twitter, YouTube).

La seconde société exerce un recours en matière civile contre cette amende d’ordre auprès du Tribunal fédéral. Ce dernier doit examiner si l’amende d’ordre, ainsi que son montant, était bel et bien justifiée.

Droit

L’art. 343 al. 1 let. c CPC prévoit que, lorsque la décision prescrit une obligation de faire, de s’abstenir ou de tolérer, le tribunal de l’exécution peut prévoir une amende d’ordre de 1000 francs au plus pour chaque jour d’inexécution.… Lire la suite

Le critère de l’urgence justifiant un classement en zone à bâtir (art. 52a al. 2 let. c OAT)

ATF 142 II 415 –  TF, 26.05.2016, 1C_562/2015*

Faits

La Commune d’Orbe (VD) révise son plan partiel d’affectation (PPA). La révision prévoit une extension de la zone à bâtir sur la zone agricole. Cette zone à bâtir est un site stratégique d’Orbe-Sud défini dans la politique cantonale des pôles de développement. Il est prévu qu’une entreprise agro-alimentaire s’y développe avec la création 450 nouveaux emplois.

Le Département cantonal approuve l’extension du PPA et exempte totalement la commune de son obligation de déclasser des zones à bâtir en compensation de l’extension prévue, en considérant que le PPA répond à l’art. 52a al. 2 let. c OAT. L’Office fédéral du développement territorial (ARE) recourt auprès du Tribunal cantonal qui confirme la décision du Département.

L’ARE forme un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur l’application de l’art. 52a al. 2 let. c OAT à l’extension de la zone industrielle prévue par le PPA révisé.

Droit

La nouvelle LAT, entrée en vigueur le 1er mai 2014, redéfinit le contenu des plans directeurs cantonaux (art. 8 et 8a LAT). L’art. 38a al. 1 LAT prévoit une période transitoire de cinq ans durant laquelle les cantons doivent adapter leurs plans directeurs aux exigences des art.Lire la suite

La vidéosurveillance par le bailleur

ATF 142 III 263 | TF, 29.03.2016, 4A_576/2015*

Faits

Propriétaire d’un immeuble comprenant 24 appartements, un bailleur fait installer 12 caméras de vidéosurveillance à l’intérieur et à l’extérieur du bâtiment. Alors qu’une partie des locataires accepte cette démarche, un locataire demande que les caméras soient immédiatement enlevées. La conciliation n’ayant pas abouti, le locataire ouvre action et obtient partiellement raison ; le tribunal de première instance ordonne d’enlever les caméras placées dans la partie interne de l’entrée du bâtiment. L’instance d’appel va plus loin et considère que les caméras dans les locaux en proximité de la buanderie doivent également être enlevées.

Le bailleur saisit alors le Tribunal fédéral, appelé à statuer sur l’admissibilité d’un tel système de vidéosurveillance au regard de la LPD.

Droit

Contrairement au droit du travail (cf. art. 328b CO), le droit du bail ne prévoit aucune règle concernant le traitement des données du locataire par le bailleur. La LPD régit le traitement de données concernant des personnes physiques et morales par des personnes privées (art. 2 al. 1 let. a LPD). On entend par traitement toute opération relative à des données personnelles, tel que notamment la collecte, la conservation et l’archivage de données (cf.… Lire la suite

Le port du voile islamique à l’école

ATF 142 I 49TF, 11.12.2015, 2C_121/2015*

Faits

Une écolière se voit interdire le port à l’école d’un hijab, soit un voile islamique couvrant ses cheveux et son cou, en application d’un règlement communal.

L’écolière et ses parents contestent avec succès l’interdiction du port du voile devant les autorités cantonales compétentes.

Sur recours de la commune, le Tribunal fédéral est appelé à statuer sur l’admissibilité d’une interdiction du port du voile à l’école.

Droit

Le Tribunal fédéral passe en revue la jurisprudence internationale en la matière et retient que le port de symboles religieux à l’école est largement admis, si ce n’est dans les pays à tradition laïque et s’agissant du voile intégral. Pour sa part, le Tribunal fédéral n’a encore jamais tranché la question au fond.

Le port de signes ou vêtements religieux est protégé par la liberté de conscience et croyance (art. 15 Cst. féd., art. 9 CEDH). En tant que titulaire de tâches publiques, la commune est tenue de respecter les droits fondamentaux et de contribuer à leur réalisation (art. 35 al. 2 Cst. féd.). L’interdiction du port du hijab constitue ainsi une atteinte à la liberté religieuse de l’écolière.… Lire la suite