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“Détention organisationnelle” et responsabilité de l’État 

TF, 25.04.2023, 2C_523/2021*

Le placement temporaire d’une personne atteinte de troubles psychiques et définitivement condamnée à une mesure dans un établissement de détention avant son transfert dans un établissement adapté n’est autorisé qu’à titre exceptionnel, aussi longtemps que cela est nécessaire pour trouver un établissement approprié (détention dite “organisationnelle”). 

En l’espèce, la détention organisationnelle d’un prévenu pendant 17 mois, dans l’attente d’un placement dans un établissement approprié pour l’exécution de la mesure ordonnée, constitue une violation de l’art. 5 par. 1 let. e CEDH. Par conséquent, le prévenu a droit à une réparation (art. 5 par. 5 CEDH). 

Faits

Par jugement du 9 décembre 2014, le Tribunal régional de Berne-Mittelland ordonne à l’encontre d’un prévenu un traitement ambulatoire (art. 63 CP), celui-ci ayant été jugé irresponsable au moment des faits en raison d’une schizophrénie paranoïde.

En avril 2015, le prévenu est placé en détention provisoire en raison de soupçons de nouvelles infractions. Le 2 novembre 2015, le prévenu est placé en exécution anticipée de mesures (art. 236 CPP) à la prison de Thorberg, dans le canton de Berne. Par la suite, le prévenu est transféré dans divers établissements pénitentiaires, et notamment dans la prison de Burgdorf dès le 7 mars 2016 suite à des problèmes de comportement survenus à la prison de Thorberg.… Lire la suite

La nécessité d’un·e expert·e externe en cas d’appel au juge (art. 439 CC) contre un PAFA ordonné par un·e médecin

ATF 148 III I

Dans le contexte d’un appel au juge (art. 439 CC) contre une décision de placement à des fins d’assistance (PAFA) ordonné par un·e médecin pour cause de troubles psychiques (art. 429 CC), une expertise est nécessaire (art. 450e al. 3 CC). Elle ne doit pas être menée par un·e membre de l’autorité appelée à statuer, mais par un·e expert·e externe.

Faits

Le 11 juillet 2021, un homme est placé à des fins d’assistance sur ordre d’un médecin désigné par le canton (art. 429 CC) pour cause de troubles psychiques. La durée du placement est fixée à six semaines. Le concerné en appelle au juge selon la procédure prévue à l’art. 439 CC. Sa demande d’expertise est rejetée par le Tribunal cantonal. Le 11 août 2021, le concerné exerce un recours auprès du Tribunal fédéral, qui doit se prononcer sur la nécessité d’une expertise en cas d’appel au juge contre un placement ordonné par un·e médecin.

Droit

Bien que le recourant ait été libéré par les autorités cantonales 9 jours après le dépôt de son recours, le Tribunal fédéral décide d’entrer en matière, rappelant qu’il est possible de se prévaloir d’un intérêt virtuel et non actuel au sens de l’art.Lire la suite

Le lien de causalité entre l’accident de travail et les troubles psychiques

ATF 147 V 207TF, 17.02.2021, 8C_289/2020*

Un accident entrainant de nombreuses complications et une convalescence de plus de 21 mois doit être qualifié de moyennement grave à la limite des cas graves.

En l’absence d’une expertise psychiatrique concluante concernant le lien de causalité naturelle entre l’accident et les troubles psychiatriques subséquents, la caisse d’assurance ne peut se prononcer sur le lien de causalité adéquate nécessaire pour fonder le droit aux prestations.

Faits

Au cours d’un chantier, une pelle mécanique glisse accidentellement en bas d’une pente où se trouve un maçon en train de procéder à un marquage du sol. Le godet de la machine percute les jambes de l’intéressé, lui causant d’importantes fractures, pour lesquelles il est opéré le jour même. Les coûts sont pris en charge par l’assurance de la victime, la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (CNA). Suite à plusieurs complications, l’assuré doit être lourdement opéré à trois autres reprises. Sur le plan psychique, il souffre désormais d’un trouble de l’adaptation avec réaction anxieuse de type post-traumatique.

La CNA alloue à l’intéressé une indemnité pour atteinte à l’intégrité fondée sur un taux de 15 % ainsi qu’une rente d’invalidité de 23 %, mais refuse de tenir compte d’une éventuelle incapacité de travail sur le plan psychique, estimant qu’il n’y a pas de lien de causalité adéquate.… Lire la suite