Le caractère luxueux d’un bail d’habitation

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TF, 11.01.2016, 4A_257/2015

Faits

Deux époux mandatent une agence spécialisée dans la recherche d’habitations de standing supérieur afin de louer une maison. L’agence leur propose une villa construite sur une parcelle de plus de 1000 m2 comprenant 7,5 pièces, dont un salon avec cheminée, trois salles de bains, un jacuzzi et une piscine. Les époux décident de louer cette villa pour un loyer d’environ 14’500 francs par mois. Lors de l’état des lieux, il est constaté que la villa se trouve dans un bon état général, mais qu’elle présente quelques défauts.

Suite à un litige portant sur la garantie de loyer, les locataires invoquent la nullité du loyer initial, en se fondant sur le fait qu’aucune formule officielle d’avis de fixation du loyer initial ne leur avait été remise.

Le tribunal des baux et loyers de Genève procède à une inspection de la villa et retient qu’il s’agit d’un logement luxueux. Partant, les dispositions de protection du locataire ne trouvent pas application (art. 253b al. 2 CO). Le jugement est reformé par la Cour de justice qui conclut l’inverse, en ce sens que la villa n’est pas luxueuse, compte tenu du fait qu’elle n’était pas parfaitement entretenue. Sur recours en matière civile, le Tribunal fédéral doit trancher la question de savoir quels sont les éléments caractéristiques d’un logement de luxe au sens de l’art. 253b al. 2 CO.

Droit

L’art. 253b al. 2 CO prévoit que les dispositions sur la protection contre les loyers abusifs (art. 269 ss) ne s’appliquent pas aux baux d’appartements et de maisons familiales de luxe comprenant six pièces ou plus (cuisine non comprise). Il existe ainsi deux conditions cumulatives : le caractère luxueux et le nombre de pièces.

Le Tribunal fédéral précise que le caractère luxueux au sens de l’art. 253b al. 2 CO doit s’interpréter de manière restrictive. L’élément déterminant pour qualifier un logement de luxe est l’impression générale que le logement dégage. Certains indices permettent toutefois de retenir le caractère luxueux. Il en va ainsi de la présence d’une piscine, d’un sauna, d’un jardin spacieux ou de sanitaires en surnombres.

En l’espèce, la maison comprend de nombreux éléments caractéristiques d’un logement de luxe. De plus, elle est dans un bon état général. Contrairement à l’instance précédente, le Tribunal fédéral considère que les défauts existants ne suffisent pas à nier le caractère luxueux de la villa. Ils peuvent tout au plus justifier des prétentions en réparation des locataires (art. 258 al. 3 et art. 259a ss CO).

Le recours est ainsi admis.

Proposition de citation : Célian Hirsch, Le caractère luxueux d’un bail d’habitation, in : https://www.lawinside.ch/173/