Un licenciement fondé sur les données GPS conforme à la CEDH ?

CourEDH, Florindo De Almeida Vasconcelos Gramaxo c. Portugal, 13.12.2022, n°26968/16

L’art. 8 CEDH est respecté lorsque l’employeur se fonde sur les données d’un GPS pour licencier un employé qui indiquait de faux kilométrages parcourus avec sa voiture de fonction, alors qu’il savait que sa voiture contenait un GPS.

Fait

Un employé utilise un véhicule de fonction pour effectuer des visites auprès des clients de son employeur. Il peut également utiliser la voiture à titre privé, mais doit indiquer les kilomètres parcourus afin de rembourser son employeur.

En 2012, l’employeur décide d’installer des GPS dans ses véhicules. Il en informe les employés et précise ses buts, notamment vérifier les kilomètres parcourus.

Le GPS installé dans la voiture de l’employé connaît des problèmes. L’employeur installe alors un second GPS dans le véhicule, sans en informer l’employé.

Il est ensuite reproché à l’employé d’avoir manipulé le premier GPS et d’avoir majoré le nombre de kilomètres parcourus à titre professionnel afin d’y diluer les kilomètres parcourus à titre privé pour ne pas devoir rembourser l’employeur. Ainsi, le GPS installé par l’employeur dans un deuxième temps indique toujours des chiffres supérieurs au GPS installé précédemment. Sur cette base, l’employeur prononce le licenciement de l’employé.… Lire la suite

Obligation de déclarer les participations : limitée aux ayants droit économiques ?

ATF 148 II 444 | TF, 18.08.22, 2C_546/2020*

Le champ d’application personnel de l’obligation de déclarer les participations (art. 120 al. 1 LIMF) n’est pas limité aux ayants droit économiques des participations. Cette obligation incombe principalement et plus généralement à l’entité exerçant le contrôle ultime sur  l’exercice des droits de vote liés aux participations. De plus, l’obligation de déclarer de l’entité exerçant librement les droits de vote liés à des titres de participation (art. 120 al. 3 LIMF) existe en parallèle de l’obligation de déclarer de la personne principalement assujettie.

Faits

Une holding chapeaute un groupe de sociétés actives dans le domaine des services financiers. Une des filiales du groupe est active dans la gestion, la création et la distribution de placements collectifs de capitaux.

La holding et la filiale requièrent de l’Instance pour la publicité des participations de SIX Exchange Regulation SA une décision préalable constatant qu’elles ne sont pas les ayants droit économiques des fonds gérés par la filiale (ou les sociétés de son sous-groupe) et qu’aucune d’entre elles n’a l’obligation de déclarer les positions des fonds gérés. Etant donné que la filiale exerce (directement ou indirectement) l’exercice des droits de vote liés aux participations des placements collectifs de capitaux qu’elle gère, les sociétés demandent que la filiale soit autorisée, à l’exclusion de la holding, à consolider et déclarer les participations détenues par tous les placements collectifs de capitaux que la filiale (ou les sociétés de son sous-groupe) gère.… Lire la suite

La recevabilité du recours en matière civile à l’encontre d’une décision cantonale de première instance

TF, 08.09.2022, 5A_130/2022*

En vertu du principe de l’épuisement formel des voies de droit, une décision de première instance rendue à la suite d’une décision de renvoi prononcée par une autorité cantonale de dernière instance doit en principe à nouveau être attaquée par un recours cantonal. Un recours direct au Tribunal fédéral n’est ouvert que lorsque les griefs du recourant portent exclusivement sur les considérants de la décision de renvoi et que l’autorité de première instance ne bénéficie d’aucune marge d’appréciation dans la mise en œuvre de ladite décision.

Faits

Un couple marié a trois enfants communs. En 2014, les époux se séparent.

Sur requête de mesures protectrices de l’union conjugale, le Gerichtspräsidium Zofingen attribue la garde des enfants à l’épouse et condamne l’époux au paiement de contributions d’entretien en faveur des trois enfants et de l’épouse.

En 2017, l’époux introduit une demande en divorce auprès du Bezirksgericht Zofingen. En parallèle, il requiert la modification des mesures protectrices de l’union conjugale en raison d’une prétendue baisse de revenu et compte tenu du fait que son épouse a eu un enfant avec un autre homme avec lequel elle vit à présent en concubinage.

En 2020, le Bezirksgericht admet partiellement la requête de modification des mesures protectrices de l’union conjugale.… Lire la suite

Séquestre : le blanchiment d’argent fondant un lien suffisant avec la Suisse

ATF 148 III 377 | TF, 11.07.2022, 5A_709/2018*

Des actes de blanchiment d’argent commis en Suisse suite à des infractions pénales à l’étranger peuvent fonder un « lien suffisant avec la Suisse » au sens de l’art. 271 al. 1 ch. 4 LP et donc justifier un séquestre.

Faits

Dans le cadre d’une procédure pénale ouverte en Italie, le Tribunal de Milan acquitte l’un des prévenus (ressortissant américain résidant aux Etats-Unis) en raison de la prescription de l’infraction d’appropriation illégitime lui étant reprochée. Après la confirmation de ce jugement par toutes les instances italiennes, deux sociétés poursuivantes requièrent le séquestre d’environ EUR 150 millions déposés sur un compte auprès d’une banque à Lugano, dont les titulaires sont des sociétés contrôlées par le prévenu. Les fonds constitueraient le produit des infractions commises en Italie. Avant d’être transférés sur le compte suisse, les fonds auraient fait l’objet d’un transfert auprès d’une banque en Irlande. Dans un premier temps, le juge compétent octroie le séquestre et exige le paiement de sûretés. Par la suite, sur opposition des sociétés séquestrées, le juge annule le séquestre. L’instance d’appel renverse ce jugement et prononce le séquestre en révoquant la demande de sûretés. Cet arrêt fait l’objet d’un recours au Tribunal fédéral par les sociétés séquestrées.… Lire la suite

La condamnation d’un callcenter pour violation de la LCD

ATF 149 IV 1 | TF, 16.11.2022, 6B_978/2020*

Il appartient à l’exploitant d’un callcenter de vérifier la présence d’un blocage de publicité dans l’annuaire téléphonique. La confusion de bases de données téléphoniques relève d’un dol éventuel et non pas de la négligence en raison de la violation de diligence grave qu’elle constitue. La notion de relation commerciale est à interpréter de manière restrictive ; concernant des biens de consommation à durée de vie restreinte, la relation commerciale est rompue lorsque le client ne manifeste pas d’intérêt pendant une longue durée.

Faits

Une entreprise de télémarketing opère des centres d’appels téléphoniques (callcenter) à des fins de marketing et publicité. Le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) a reçu près de 50 plaintes concernant les appels provenant de l’un des centres d’appels de la société. Entre fin 2012 et 2014, le Ministère public bernois a dénombré 27 appels passés envers des particuliers qui avaient pourtant spécifié une renonciation à la publicité au moyen d’un astérisque dans l’annuaire téléphonique.

Le Ministère public bernois reproche au directeur du conseil d’administration de la société des infractions à la LCD pour méthodes de publicité et de vente déloyales. Les agissements des employés de l’entreprise lui sont imputables au sens de l’art.Lire la suite