Entrées par Victor Sellier

Obligation de déclarer les participations : limitée aux ayants droit économiques ?

ATF 148 II 444 | TF, 18.08.22, 2C_546/2020*

Le champ d’application personnel de l’obligation de déclarer les participations (art. 120 al. 1 LIMF) n’est pas limité aux ayants droit économiques des participations. Cette obligation incombe principalement et plus généralement à l’entité exerçant le contrôle ultime sur  l’exercice des droits de vote liés aux participations. De plus, l’obligation de déclarer de l’entité exerçant librement les droits de vote liés à des titres de participation (art. 120 al. 3 LIMF) existe en parallèle de l’obligation de déclarer de la personne principalement assujettie.

Faits

Une holding chapeaute un groupe de sociétés actives dans le domaine des services financiers. Une des filiales du groupe est active dans la gestion, la création et la distribution de placements collectifs de capitaux.

La holding et la filiale requièrent de l’Instance pour la publicité des participations de SIX Exchange Regulation SA une décision préalable constatant qu’elles ne sont pas les ayants droit économiques des fonds gérés par la filiale (ou les sociétés de son sous-groupe) et qu’aucune d’entre elles n’a l’obligation de déclarer les positions des fonds gérés. Etant donné que la filiale exerce (directement ou indirectement) l’exercice des droits de vote liés aux participations des placements collectifs de capitaux qu’elle gère, les sociétés demandent que la filiale soit autorisée, à l’exclusion de la holding, à consolider et déclarer les participations détenues par tous les placements collectifs de capitaux que la filiale (ou les sociétés de son sous-groupe) gère.… Lire la suite

La notification au conjoint d’une poursuite en réalisation de gage sur un immeuble exploité en entreprise agricole

TF, 13.10.22, 5A_650/2022*

Dans le cadre d’une poursuite en réalisation d’un gage grevant un immeuble exploité en entreprise agricole, le conjoint du débiteur propriétaire de l’entreprise agricole exploitée en commun par les époux ne peut exiger une notification additionnelle du commandement de payer.

Faits

Une banque requiert de l’Office des poursuites et faillites la réalisation d’un gage grevant un immeuble sur lequel le débiteur exploite une entreprise agricole conjointement avec son épouse.

L’épouse dépose une requête tendant à ce qu’un exemplaire du commandement de payer lui soit également notifié. L’Office donne favorablement suite à la demande. Sur plainte de la banque poursuivante, l’autorité cantonale de surveillance annule la décision. Par la suite, l’épouse intente un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral, lequel doit déterminer si le conjoint du débiteur propriétaire d’une entreprise agricole exploitée en commun par les époux doit également se voir notifier un commandement de payer en cas de poursuite en réalisation du gage grevant l’immeuble sur lequel l’entreprise agricole est située.

Droit

L’art. 153 al. 2 let. b LP dispose qu’un exemplaire du commandement de payer doit également être notifié au conjoint du débiteur lorsque l’immeuble grevé est le logement de la famille (art. Lire la suite

Autorisation de construire dans une zone réservée visant la réduction future de la zone à bâtir

ATF 148 II 417 | TF, 12.07.22, 1C_650/2020*

Au cours de la période entre l’entrée en force du plan directeur cantonal et l’adoption d’un plan d’affectation visant la mise en conformité avec la révision de l’art. 15 LAT (réduction de la zone à bâtir) et l’entrée en vigueur de la LRS, l’autorité doit examiner préalablement à l’octroi d’une autorisation de construire en zone réservée la possibilité concrète que les parcelles en question soient déclassées selon la nouvelle planification. Dans l’affirmative, l’octroi de l’autorisation de construire en zone réservée est contraire à l’obligation de réduire la zone à bâtir surdimensionnée.

Faits

Le canton des Grisons révise son plan directeur le 20 mars 2018. Suite à cette modification, la commune de Klosters-Serneus doit modifier son plan d’affectation afin de réduire l’étendue de la zone à bâtir et densifier le milieu bâti. A cette fin, le canton lui impose de créer au plus tard le 20 mars 2019 une zone réservée couvrant les surfaces à potentiellement dézoner. La commune introduit donc progressivement une zone réservée dès le 3 juillet 2018.

Le 25 octobre 2018, trois demandes d’autorisation de construire sur des parcelles couvertes par la zone réservée sont déposées. Un voisin forme opposition contre toutes les demandes de permis de construire.… Lire la suite

Indications trompeuses et protection des marques événementielles

ATF 148 III 257 | TF, 06.04.22, 4A_518/2021*

Une marque renvoyant spécifiquement à un événement d’intérêt public est exclue de la protection du droit des marques si elle risque objectivement de mener le public ciblé à des conclusions trompeuses relatives à la relation entretenue entre le titulaire de la marque et l’événement considéré. En outre, afin d’être protégées, les « marques événementielles » doivent revêtir un caractère suffisamment distinctif permettant d’associer la manifestation à son organisateur ; elles ne peuvent ainsi se borner à décrire l’événement auquel elles se rapportent.

Faits

La FIFA enregistre en Suisse les marques « QATAR 2022 » et « WORLD CUP 2022 ». Par la suite, la société PUMA SE enregistre, également en Suisse, les marques « PUMA WORLD CUP QATAR 2022 » et « PUMA WORLD CUP 2022 ».

La FIFA demande notamment que les deux marques enregistrées par PUMA SE soient déclarées nulles et radiées du registre. Par demande reconventionnelle, PUMA SE requiert que les deux marques déposées par la FIFA soient considérées nulles et radiées du registre.

Le Handelsgericht de Zurich ayant rejeté aussi bien la demande principale que la demande reconventionnelle, les deux parties forment un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral.

Aux termes de cet arrêt se posent non seulement la question du caractère trompeur d’une marque spécifiquement en relation avec un événement d’intérêt public, mais également celle du degré de distinction que doit revêtir une « marque événementielle » afin de bénéficier de la protection du droit des marques.… Lire la suite

La sanction de la violation du devoir de collaboration du requérant d’asile

ATF 148 IV 281 | TF, 28.03.2022, 6B_1361/2020*

Lorsqu’une procédure d’asile se termine par la notification au requérant d’une décision de renvoi exécutoire, le devoir de collaborer du requérant à l’établissement de documents de voyage valides est régi par l’art. 8 al. 4 LAsi. La sanction pénale de la violation de cette obligation est contraire au principe de légalité, la LAsi ne prévoyant pas de telles conséquences pénales.

Faits

Un requérant d’asile reçoit une décision de non-entrée en matière, confirmée par le Tribunal administratif fédéral. Dans ce contexte, il est reproché au requérant d’asile de n’avoir entamé aucune démarche afin d’obtenir des documents d’identité auprès de la représentation iranienne en vue de son renvoi.

Le Tribunal de district de Bülach condamne le requérant d’asile pour la violation de son obligation de collaborer à l’établissement de documents de voyage au sens des art. 90 let. c LEI cum art. 120 al. 1 let. e LEI et lui inflige une amende de Fr. 150.-.

Par la suite, l’Obergericht de Zurich confirme partiellement la décision de première instance, en faisant cependant référence non pas à la LEI mais à la LEtr. Le requérant d’asile demande l’annulation de ce jugement auprès du Tribunal fédéral en formant un recours en matière pénale.… Lire la suite