L’entretien convenable en cas de mesures protectrices de l’union conjugale

TF, 27.06.2022, 5A_849/2020*

S’agissant de mesures protectrices de l’union conjugale, les éventuelles contributions d’entretien doivent permettre aux époux, de manière égale, d’atteindre le niveau de vie d’avant la séparation si la situation est suffisamment favorable, et non simplement de couvrir leur minimum vital. Il ne se justifie pas de supprimer les contributions d’entretien à partir du moment où le revenu hypothétique imputé permettrait à la partie crédirentière de couvrir seule son minimum vital, si cela ne lui permet pas d’atteindre le niveau de vie conjugale.

Faits

Sans enfant, un couple marié se sépare en décembre 2017. L’époux travaille alors à temps plein, et l’épouse à 60 %. Par décision de mesures protectrices de l’union conjugale, le Kantonsgericht de Nidwald fixe une contribution d’entretien d’environ CHF 3’000 en faveur de l’épouse jusqu’en août 2019, considérant qu’aucune contribution n’est due à partir de septembre 2019.

Sur appel, l’épouse obtient de l’Obergericht une contribution d’entretien plus élevée jusqu’en décembre 2019. Elle exerce ensuite un recours auprès du Tribunal fédéral, qui doit déterminer si, dans le cadre de mesures protectrices de l’union conjugale, il se justifie de limiter les contributions d’entretien dans le temps.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle que, les mesures protectrices de l’union conjugale constituant des mesures provisionnelles au sens de l’art.Lire la suite

Gestation pour autrui à l’étranger et filiation (2/2) : l’établissement de la filiation face au principe ‘mater semper certa est’

ATF 148 III 245 | TF, 07.02.22, 5A_545/2020*

Lorsque, en cas de gestation pour autrui (GPA) à l’étranger, la filiation de l’enfant avec les parents d’intention est analysée sous l’angle du droit suissele principe ‘mater semper certa est’ (art. 252 al. 1 CC) est applicable nonobstant la présence d’un lien génétique entre la mère d’intention et l’enfant né par GPA. Par conséquent, la mère porteuse est la mère juridique de l’enfant né par GPA de par la loi. Alors que le contrat de GPA peut constituer une reconnaissance d’enfant valable du père d’intention génétiquement lié à l’enfant, ce n’est pas le cas en ce qui concerne la mère d’intention génétiquement liée à l’enfant. La voie de l’adoption des enfants de son conjoint (art. 264c ss CC) en vue de l’établissement d’un lien de filiation lui est toutefois en principe ouverte.

Faits 

Un couple marié composé d’une ressortissante suisse et turque et d’un ressortissant turc conclut un contrat de gestation pour autrui (GPA) avec une femme géorgienne. En 2019, la mère porteuse donne naissance à des jumeaux issus d’un don de sperme de l’époux ainsi que d’un don d’ovule de l’épouse. En d’autres termes, chaque parent d’intention a un lien génétique avec les jumeaux.… Lire la suite

Précision de la notion de mariage ayant exercé un impact déterminant sur la vie d’un couple

ATF 148 III 161 | TF, 25.03.2022, 5A_568/2021*

La naissance d’un enfant durant le mariage n’est plus une circonstance déterminante à elle-seule pour admettre que le mariage a exercé un impact décisif sur la vie d’un couple. Ceci vaut également pour une situation de dépendance économique d’un époux vis-à-vis de l’autre, à tout le moins lorsque cette situation découle de décisions commerciales et n’est pas une conséquence directe ou nécessaire du mariage.

Faits

En 2009, après plusieurs années de vie commune, un couple se marie. De cette union naît un enfant. L’épouse poursuit son activité professionnelle comme consultante et travaille principalement pour le groupe d’entreprises de son mari. En 2012, les époux se séparent et décident de divorcer. Ils rompent également leurs relations commerciales.

En 2020, le Bezirksgericht de Zurich prononce le divorce des époux et règles les effets accessoires du divorce. En particulier, l’ex-époux est condamné au paiement d’une contribution d’entretien en faveur de son ex-épouse.

Sur appel des deux époux, l’Obergericht du canton de Zurich admet qu’une contribution d’entretien est due. Cependant, il réévalue le montant dû à l’ex-épouse à ce titre.

L’ex-époux interjette un recours au Tribunal fédéral à l’encontre de cette décision. Ce dernier doit déterminer l’étendue de l’obligation d’entretien de l’ex-époux.… Lire la suite

L’effet de l’annotation d’une restriction du droit d’aliéner sur la procédure d’exécution forcée d’un immeuble

ATF 148 III 109 | TF, 02.02.2022, 5A_491/2021*

Conformément à l’art. 960 al. 2 CC, l’annotation provisoire d’une restriction du droit d’aliéner un immeuble est opposable aux créanciers du propriétaire. Ceci vaut également dans le cadre de toute procédure ultérieure d’exécution forcée.

Faits

En 1996, un fiduciaire acquiert un immeuble pour le compte de son fiduciant.

Après avoir mis le fiduciaire en demeure de lui transférer la propriété de l’immeuble, le fiduciant saisit le Tribunal de première instance de Genève d’une action en constatation de son droit. Celle-ci est assortie d’une requête de mesures superprovisionnelles tendant à l’annotation provisoire d’une restriction du droit d’aliéner l’immeuble. Par ordonnance, le Tribunal de première instance fait droit à cette requête. L’annotation provisoire est inscrite au registre foncier en 2010.

En 2012, une société requiert le séquestre de l’immeuble acquis à titre fiduciaire. Le séquestre est ordonné et exécuté le même jour et ultérieurement transformé en saisie définitive.

Le fiduciant forme alors une action en revendication (cf. art. 275 LP cum art. 107 LP) à l’encontre du fiduciaire et de la société auprès du Tribunal de première instance de Genève. Ce dernier ordonne toutefois la suspension de la procédure de revendication dans l’attente de l’issue de la procédure en constatation de droit.… Lire la suite

La légitimation passive dans le cadre d’une action en modification d’une contribution d’entretien (art. 289 al. 2 CC)

ATF 148 III 296 | TF, 12.01.2022, 5A_69/2020*

Contrairement à la jurisprudence qui prévalait jusqu’alors, la collectivité publique qui assume l’entretien de l’enfant (art. 289 al. 2 CC) ne doit plus être mise en cause dans une action en modification d’une contribution d’entretien. L’action peut être intentée contre l’enfant seul·e.

Faits

Un couple non marié a deux enfants, nés en 2006 et 2008. À la suite de la séparation des parents, le père s’engage, par des conventions datant de 2007 et 2008, à verser des contributions mensuelles à ses enfants. En 2015, il ouvre action contre ses enfants pour demander une réduction des montants prévus par ces conventions. Par suite d’une demande de la mère, le service social du Haut-Emmental avance les contributions d’entretien à partir du 1er mai 2016.

Le Regionalgericht limite la procédure à la question de la légitimation passive. Il l’admet pour la période allant de novembre 2015 à avril 2016, mais constate qu’elle fait défaut à partir du 1er mai 2016. Selon le Regionalgericht, à partir de mai 2016, ce sont les services sociaux qui devaient être recherchés. Le père fait appel auprès de l’Obergericht. Ce dernier nie la légitimation passive pour la période allant du 1er mai 2016 jusqu’à la date de son propre jugement, soit le 18 décembre 2019, et renvoie l’affaire à l’instance inférieure pour statuer sur la période suivante.… Lire la suite