L’effet horizontal des droits fondamentaux

ATF 143 I 217 | TF, 04.04.2017, 5D_172/2016*

Faits

Un couple d’époux acquiert une parcelle en Valais pour y construire une maison familiale. Un agriculteur voisin conteste ce projet devant les tribunaux civils, au motif que la nouvelle construction ferait obstacle au chemin d’accès agricole dont il bénéficierait notoirement et depuis longtemps. Il a gain de cause en première instance, mais voit son action rejetée par le Tribunal cantonal.

L’agriculteur recourt devant le Tribunal fédéral. Il s’agit de déterminer si le recourant a acquis une servitude de passage par prescription acquisitive.

Droit

S’agissant d’une contestation civile dont la valeur litigieuse est inférieure à CHF 30’000, en l’absence de question juridique de principe, seul le recours constitutionnel subsidiaire est recevable (art. 113 ss LTF). Le recourant peut faire valoir des griefs constitutionnels (art. 116 LTF), qu’il doit alléguer et motiver de façon suffisante (art. 106 al. 2 LTF).

S’agissant du droit matériel, celui qui a exercé pendant trente ans sans interruption, paisiblement et comme ayant-droit une servitude sur un immeuble non immatriculé peut en requérir l’inscription (art. 662 al. 1 cum art. 731 al. 3 CC). Par ailleurs, la loi valaisanne d’application du Code civil, se fondant sur la réserve de l’art.Lire la suite

La prolongation du permis de conduire à l’essai suite à la remise provisoire d’un permis définitif

ATF 143 II 495 – TF, 24.05.2017, 1C_95/2017*

Faits

Suite à un accident de la circulation routière, le Service cantonal de la circulation routière et de la navigation du canton du Valais (SCN) prononce le retrait du permis de conduire à l’essai d’un automobiliste pour une durée d’un mois et la prolongation d’une année de sa période probatoire. Saisi d’un recours, le Tribunal cantonal valaisan confirme cette décision.

En cours de procédure, le SCN remet au recourant un permis de conduire définitif, la période de trois ans depuis la délivrance du permis de conduire à l’essai s’étant écoulée. Suite à l’exécution du retrait de permis, le SCN indique toutefois au recourant que le permis restitué n’est en réalité pas un permis définitif, mais un permis à l’essai prolongé a posteriori d’une année, conformément à sa première décision.

Le recourant requiert du SCN qu’il reconsidère sa décision, estimant que la prolongation d’une année a bien eu lieu. Le refus de faire droit à cette requête monte au Tribunal fédéral, qui doit déterminer si la durée de la procédure judiciaire relative au retrait du permis de conduite et à la prolongation de la période probatoire, respectivement la période durant laquelle le recourant était provisoirement au bénéfice d’un permis définitif, équivaut à une prolongation du permis de conduire à l’essai au sens de l’art.Lire la suite

Le contrôle de validité de l’initiative populaire grisonne “Une seule langue étrangère à l’école primaire”

ATF 143 I 361 – TF, 03.05.2017, 1C_267/2016*

Faits

Le Conseil d’Etat grison constate l’aboutissement de l’initiative cantonale en termes généraux « Une seule langue étrangère à l’école primaire ». L’initiative est formulée dans les termes suivants (en traduction libre) : « La loi sur les écoles du canton des Grisons doit être modifiée de sorte que la règle suivante s’applique à l’enseignement de langues étrangères à l’école primaire dans l’ensemble du canton : à l’école primaire, une seule langue étrangère est obligatoire ; suivant la région linguistique, il s’agit de l’allemand ou de l’anglais ».

Le Grand Conseil grison déclare l’initiative invalide. Sur recours, le Tribunal administratif annule cette décision et constate la validité de l’initiative. Des citoyens saisissent alors le Tribunal fédéral d’un recours en matière de droit public. Celui-ci doit déterminer si l’initiative doit être déclarée invalide pour violation manifeste du droit supérieur, en particulier de l’égalité de traitement et de l’interdiction de discrimination (art. 8 al. 1 et 2 Cst.), du droit à un enseignement de base suffisant (art. 19 cum 62 al. 2 Cst.), des dispositions sur l’harmonisation de l’enseignement (art. 61a al. 1 et 62 al. 4 Cst.), des objectifs fédéraux sur l’enseignement fixés à l’art.Lire la suite

L’indemnité pour la privation de liberté subie lors de l’appréhension et de l’arrestation provisoire

ATF 143 IV 339 | TF, 08.06.2017, 6B_478/2016*

Faits

Un prévenu est appréhendé à 10h00 par les gardes-frontière, qui le soupçonnent de conduire avec un permis de conduire falsifié. Le prévenu est remis à la police, qui le place en arrestation provisoire à 14h48Il est libéré à 17h25.

Il s’avère que le permis de conduire du prévenu ne présente aucune falsification. Ainsi, le Ministère public rend une ordonnance de non-entrée en matière (art. 310 al. 1 let. a CPP), mais refuse d’allouer au prévenu une indemnité pour la privation de liberté subie. La Chambre pénale de recours genevoise confirme l’ordonnance du Ministère public, considérant que l’arrestation provisoire n’a pas duré plus de trois heures, ce qui ne justifierait pas une indemnité.

Le prévenu forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur l’octroi au prévenu d’une indemnité pour la privation de liberté subie lors de l’appréhension et de l’arrestation provisoire.

Droit

Selon l’art. 429 al. 1 let. c CPP, si le prévenu est acquitté ou s’il bénéficie d’une ordonnance de classement ou de non-entrée en matière (art. 310 al. 2 CPP), il a droit à une réparation du tort moral subi en raison d’une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté.Lire la suite

La prescription de l’obligation de restituer les rétrocessions

ATF 143 III 348 | TF, 16.06.2017, 4A_508/2016*

Faits

En 1994-1995, une association mandate une société de courtage afin de développer et organiser un concept d’assurance pour ses membres. La société de courtage conclut alors divers contrats d’assurance pour l’association. Le 4 mars 2005, l’association apprend que la société de courtage a perçu des commissions occultes des sociétés d’assurance et conteste immédiatement leur légitimité. Après des pourparlers infructueux, l’association résilie le contrat avec la société de courtage le 19 août 2005.

Entre 2006 et 2007, l’association dépose une quinzaine de réquisitions de poursuite à l’encontre de la société de courtage, puis ouvre action le 1er juin 2007. Sur appel déposé par la société de courtage, la Cour de justice considère que les rétrocessions sont soumises à un délai de prescription de dix ans courant dès la fin du mandat.

La société de courtage exerce un recours auprès du Tribunal fédéral qui doit statuer sur le délai de prescription applicable aux rétrocessions ainsi que sur son point de départ.

Droit

L’art. 400 al. 1 CO prévoit que le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu’il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.… Lire la suite