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Le droit au bonus de l’employé licencié

TF, 10.10.2018, 4A_78/2018

Pour savoir si un employé a droit au bonus, il convient de bien distinguer les trois cas suivants : (1) le salaire (variable), (2) la gratification à laquelle l’employé a droit et (3) la gratification à laquelle il n’a pas droit. Ce n’est que dans ce troisième cas que se pose la question de la requalification du bonus en salaire en vertu du principe de l’accessoriété. La requalification n’est toutefois pas applicable pour les très hauts revenus.

Faits

Un employé de banque perçoit, en plus de son salaire fixe, un bonus discrétionnaire distribué en espèces et sous forme d’actions bloquées. Entre 2007 et 2010, il reçoit un salaire qui varie entre CHF 2’175’000 et 2’525’005 dont CHF 425’000 constitue la part fixe, le reste étant un bonus.

Durant l’année 2010, l’employé met en relation deux clients et assure les contacts entre eux. Dans le cadre de ces relations, l’employé enfreint à plusieurs reprises les directives internes de la banque. En raison de ces manquements, la banque résilie le contrat de travail le 14 novembre 2011 pour le 31 mai 2012 et ne lui verse aucun bonus pour les années 2011 et 2012.

L’employé ouvre action en paiement contre la banque pour un montant total de plus de 4 millions en affirmant avoir été victime d’un licenciement abusif et avoir droit à des bonus pour les années 2011 et 2012.… Lire la suite

Le point de départ de la protection contre les licenciements durant la grossesse (art. 336c al. 1 let. c CO)

ATF 143 III 21 | TF, 26.01.2017, 4A_400/2016*

Faits

Une employée a été licenciée par son employeur le 24 janvier 2011 avec effet au 31 mars 2011. Le 5 mai 2011, l’employée a informé son employeur du fait qu’elle était enceinte. Il a été retenu que la conception de l’enfant (fécondation de l’ovule) a eu lieu avant le 31 mars 2011 à minuit, soit avant que son travail ne prenne fin. L’employée considère ainsi être au bénéfice de la protection de l’art. 336c al. 1 let. c CO contre les licenciements pendant la grossesse. Elle réclame ainsi 63’375 francs de l’employeur.

L’employeur considère que la protection contre les licenciements pendant la grossesse ne commence qu’au moment de l’implantation (nidation) de l’œuf dans l’utérus. Ainsi, selon l’employeur, au 31 mars 2011, soit à son dernier jour de travail, l’employée ne bénéficiait pas de la protection de l’art. 336c al. 1 let. c CO.

La première et la deuxième instance donnent raison à l’employée, et retiennent que la grossesse au sens de l’art. 336c al. 1 let. c CO commence au moment de la conception de l’enfant et non pas au moment de la nidation.

L’employeur forme un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral.… Lire la suite

La nature privée des rapports de travail entre un employé et une fondation subventionnée

ATF 142 II 154TF, 22.03.2016, 8C_506/2015*

Faits

Le directeur d’un centre appartenant à une fondation membre de l’Association neuchâteloise des Maisons pour Enfants, Adolescents et Adultes (ANMEA) se plaint d’une inégalité salariale, en raison du fait que le nouveau directeur d’un autre centre de la fondation a été colloqué à un échelon plus élevé. Suite au refus de la fondation de modifier son traitement, il ouvre action devant la Cour de droit public du Tribunal cantonal. Celle-ci déclare la demande irrecevable, considérant que le litige relève du droit privé. Le directeur saisit alors le Tribunal fédéral, qui doit déterminer si les rapports de travail entre le recourant et la fondation relèvent du droit public.

Droit

La Constitution fédérale ne règle pas la nature juridique des rapports de travail des employés des collectivités publiques. La jurisprudence n’exclut pas a priori la possibilité pour les collectivités publiques de soumettre au droit privé les rapports de travail avec leurs employés. C’est le contenu réel du rapport de droit qui est décisif pour déterminer si celui-ci relève du droit privé ou du droit public. Si une autorité est partie, le droit public est présumé applicable. Cependant, si une tâche étatique est transférée à une personne morale de droit privé, celle-ci ainsi que ses rapports avec son personnel restent régis par le droit privé, et ce, même lorsqu’elle exerce des tâches publiques.… Lire la suite

La requalification du bonus en salaire

ATF 141 III 407 – TF, 11.08.2015, 4A_653/2014*

Faits

Un employé est au bénéfice d’un système de rémunération variable qui comprend un salaire de 300’000 francs par année et un bonus. Selon le contrat conclu avec son employeur, l’employeur pouvait récupérer le bonus au prorata, si l’employé devait démissionner dans une période de deux ans à compter du 21 janvier 2009.

En mars 2009, l’employé résilie son contrat de travail auprès de son employeur pour le 30 juin 2009, soit 18 mois avant l’échéance prévue par le contrat. Conformément au contrat, l’employeur refuse de verser la totalité du bonus et retient 636’000 francs de bonus. Ainsi, pour l’année 2009, l’employé a perçu un salaire de 150’000 francs et un bonus en espèce de 212’000 francs (pour six mois de travail), soit un total de 362’000 francs.

L’employé ouvre action en paiement contre son (ancien) employeur et lui réclame un montant de près de 3’000’000 de francs à titre de bonus. En première instance, l’employeur est condamné à verser un montant d’environ 1’000’000 de francs à son ancien employé. Sur appel, la Cour cantonale réduit le montant à environ 150’000 francs, considérant que la part de bonus qui dépasse un revenu global de 500’000 francs par an ne peut être requalifiée comme un salaire.… Lire la suite