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Le geste de la « quenelle » : discrimination raciale ?

ATF 143 IV 308 | TF, 18.07.2017, 6B_734/2016*

Faits

Deux jeunes vêtus d’habits noirs et un militaire en tenue d’assaut, visages en partie camouflés, effectuent une « quenelle », geste popularisé par l’humoriste Dieudonné M’Bala M’Bala (Dieudonné) et consistant à tendre un bras vers le bas tout en positionnant la main de l’autre bras sur l’épaule, devant une synagogue.

Les trois jeunes sont reconnus coupables de discrimination raciale par le Ministère public du canton de Genève. L’un d’entre eux s’oppose à la condamnation et l’affaire finit devant le Tribunal fédéral. Ce dernier est amené à analyser la signification du geste de la quenelle et, plus précisément, si celui-ci constitue une discrimination raciale au sens de l’art. 261bis al. 4 première partie CP.

Droit

Aux termes de l’art. 261bis al. 4 première partie CP, se rend coupable de discrimination raciale celui qui aura publiquement, par la parole, l’écriture, l’image, le geste, par des voies de fait ou de toute autre manière, abaissé ou discriminé d’une façon qui porte atteinte à la dignité humaine une personne ou un groupe de personnes en raison de leur race, de leur appartenance ethnique ou de leur religion.

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une expression relève de cette norme lorsqu’elle serait comprise par un tiers moyen non averti dans les circonstances d’espèce comme relevant de la discrimination raciale.… Lire la suite

La négation du génocide arménien et le droit à la liberté d’expression (CourEDH)

CourEDH (Grande Chambre), 15.10.2015, Affaire Perinçek c. Suisse (Nº 27510/08)

Faits

Le requérant Dogu Perinçek participe à diverses conférences au cours desquelles il nie l’existence de tout génocide perpétré par l’Empire ottoman contre le peuple arménien. Il qualifie l’idée d’un tel génocide de « mensonge international ».

Sur plainte de l’association Suisse-Arménie, le requérant est pénalement condamné pour discrimination raciale (art. 261bis al. 4 CP) par le tribunal de police. Ce jugement est confirmé par le Tribunal cantonal, puis par le Tribunal fédéral (TF, 12.12.2007, 6B_398/2007). Le requérant saisit alors la Cour européenne des droits de l’homme. Dans une première décision rendue en 2013 (CourEDH, 17.12.2013, Affaire Perinçek c. Suisse [N° 27510/08]), la Cour a considéré que la condamnation par la Suisse de Perinçek violait la liberté d’expression (art. 10 CEDH). N’acceptant pas les motifs de cette décision, la Suisse a demandé à la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme d’effectuer une nouvelle appréciation du cas (art. 43 par. 1 CEDH). Celle-ci a accepté la demande de renvoi (art. 43 par. 2 CEDH).

La Grande Chambre doit déterminer si la condamnation pénale du requérant pour avoir publiquement déclaré qu’il n’y avait pas eu de génocide arménien est contraire au droit à la liberté d’expression (art.Lire la suite