Articles

Le droit inconditionnel de répliquer

ATF 146 III 97 | TF, 09.12.2019, 4A_328/2019*

Bien que l’art. 232 al. 2 CPC prévoie un régime de plaidoiries écrites simultanées et uniques, le droit inconditionnel de répliquer permet aux parties de répondre à la plaidoirie écrite de la partie adverse.

Faits

Un promoteur immobilier saisit le Tribunal cantonal du Valais d’une action en libération de dette à l’encontre d’une société active dans le domaine de l’immobilier suite à un litige relatif à un contrat de société simple conclu entre ces deux parties.

Durant la procédure, les parties décident de renoncer aux plaidoiries orales afin de déposer des plaidoiries écrites, conformément à l’art. 232 al. 2 CPC. Après avoir reçu la plaidoirie de la partie adverse, le promoteur immobilier requiert du Tribunal un délai pour pouvoir répliquer à celle-ci. Le Tribunal cantonal rejette cette requête. Non seulement le tribunal n’a pas à donner l’occasion aux parties de plaider une seconde fois lorsqu’elles ont opté pour des plaidoiries écrites, mais en plus rien ne justifie que le demandeur puisse se déterminer sur la plaidoirie de sa partie adverse car celle-ci ne contient ni des faits nouveaux ni des motifs juridiques non évoqués auparavant.

Saisi par le demandeur, le Tribunal fédéral est amené à préciser si l’art.Lire la suite

Le contrôle d’une loi sur le stationnement des communautés nomades

ATF 145 I 73 | TF, 13.02.2019, 1C_188/2018*

La distinction que la loi neuchâteloise sur le stationnement des communautés nomades établit entre “communautés nomades suisses” et “autres communautés nomades” se fonde sur la nécessité de trouver de la place pour toutes les communautés et est justifiée par la taille et la durée de stationnement différentes des convois. Le retrait de l’effet suspensif en cas de recours contre une décision d’évacuation peut être interprété de façon conforme à la Constitution, dès lors que l’autorité saisie peut ordonner les mesures provisionnelles nécessaires à la conservation de la situation de fait ou de droit.

Faits

Le Grand Conseil du canton de Neuchâtel adopte une loi sur le stationnement des communautés nomades (LSCN/NE). Cette loi prévoit notamment qu’un campement d’une communauté nomade ne peut être installé que sur une aire d’accueil cantonale ou communale, un site provisoire défini par arrêté du Conseil d’État ou un terrain qui fait l’objet d’un contrat-cadre « communauté nomade » écrit et conclu avec son propriétaire ou son ayant droit.

La loi distingue trois types d’aires d’accueil : les aires de séjour sont destinées à l’accueil permanent des communautés nomades suisses (selon la loi : formées par les citoyennes et citoyens suisses, issus des communautés reconnues comme minorités nationales par le Conseil fédéral et dont les véhicules sont dotés de plaques de contrôle suisses) ; les aires de passage à l’accueil temporaire de communautés nomades suisses  ; les aires de transit à l’accueil temporaire des autres communautés nomades (formées par des citoyennes et citoyens issus d’une communauté nomade non reconnue en tant que minorité nationale ou provenant de l’étranger).… Lire la suite

Le déni de justice et la responsabilité de l’Etat

ATF 144 I 318 | TF, 24.08.2018, 2C_34/2017*

L’art. 35 al. 1 let. b LAT ne constitue pas une norme protectrice invocable par un propriétaire foncier pour attaquer l’Etat en responsabilité lorsque ce dernier tarde à adopter un plan d’affectation. Néanmoins, une violation de l’art. 29 Cst. (déni de justice) peut constituer un acte illicite susceptible d’engager la responsabilité de l’État qui a tardé à statuer.

Faits

Une société possède deux grandes parcelles situées dans la commune de Rolle. En 1990, la commune adopte un plan général d’affectation prévoyant l’affection d’une de ces parcelles en zone agricole. La société s’y oppose avec succès auprès du Conseil d’État.

La commune entame alors diverses démarches afin de planifier l’affectation de son territoire et élaborer plusieurs projets. Le 24 octobre 2002, alors que la commune n’a toujours pas adopté de plan d’affectation, la société requiert formellement une élaboration d’un plan d’affectation limité à ses deux parcelles. La commune transmet des informations à la société mais ne statue pas sur sa requête.

La société saisit alors le département vaudois compétent qui constate un déni de justice (art. 29 Cst.) et fixe à la commune un délai au 31 octobre 2005 pour procéder à la planification relative à ces deux parcelles.… Lire la suite

La violation du principe de célérité et la réduction des frais de procédure

ATF 143 IV 373 | TF, 13.07.17, 6B_934/2016*

La conséquence d’une violation du principe de célérité consiste le plus souvent en une réduction de la peine, parfois en une renonciation à toute peine et, en cas de préjudice particulièrement grave, en un classement de la procédure. Ce n’est que dans l’hypothèse d’un classement, d’un acquittement ou d’actes de procédure erronés que le CPP prévoit la réduction des frais de procédure au bénéfice du prévenu. Même la réduction d’une peine privative de liberté prononcée avec sursis constitue une forme de réparation de la violation du principe de célérité. Le fait qu’un prévenu ait déjà été privé de sa liberté par l’exécution d’une mesure n’est pas pertinent.

Faits

Suite à diverses infractions, un jeune adulte est condamné par le Tribunal pénal du canton de Bâle-Campagne à une peine privative de liberté. Dans la mesure où près de quatre ans se sont déroulés entre l’arrestation du prévenu et la mise en accusation, le Tribunal constate une violation du principe de célérité et réduit la peine privative de liberté de deux ans et demi à deux ans uniquement.

Le Tribunal ordonne en outre une mesure thérapeutique stationnaire pour jeunes adultes et reporte l’exécution de la peine privative de liberté.… Lire la suite

L’assistance judiciaire en faveur d’une personne morale

ATF 143 I 328TF, 22.05.17, 4A_75/2017*

Une personne morale ne peut bénéficier de l’assistance judiciaire que si le procès concerne ses seuls actifs et que ses participants économiques sont indigents. L’assistance judiciaire est toutefois exclue si le procès en cours ne permet pas de garantir la survie de la personne morale.

Faits

Une société est expulsée du local qu’elle loue et le tribunal ordonne son évacuation. La société ne s’exécute pas et le bailleur vend les objets se trouvant dans le local. En parallèle, la société est dissoute en raison de l’absence d’un domicile (cf. art. 153b ORC). La société se retourne ensuite contre le bailleur sur la base de l’art. 41 CO et réclame le remboursement des objets qu’il a vendus. A cette occasion, elle sollicite l’assistance judiciaire. Le tribunal de première instance, puis le Tribunal cantonal rejettent cette requête. La société saisit alors le Tribunal fédéral qui doit préciser les conditions de l’assistance judiciaire en faveur d’une personne morale.

Droit

Pour autant que la cause ne soit pas dépourvue de chances de succès, l’art. 29 al. 3 Cst. confère un droit à l’assistance judiciaire pour les personnes indigentes. Cette règlementation vise les personnes physiques.… Lire la suite