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Meurtre de St Légier : Le bracelet électronique comme mesure de substitution

ATF 145 IV 503TF, 17.09.2019, 1B_362/2019*

L’art. 237 al. 3 CPP constitue une base légale suffisante pour ordonner le port du bracelet électronique comme mesure de substitution à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté. Cela étant, l’efficacité du bracelet électronique est sujette à caution en l’absence d’un dispositif permettant une surveillance en temps réel. En tout état, le tribunal doit examiner l’adéquation de cette mesure au cas par cas.

Faits

Le corps sans vie d’une femme est découvert dans un ravin à proximité de Saint-Légier (canton de Vaud). Interpellé, son mari admet l’avoir tuée et est placé en détention provisoire. Leur fille est également accusée d’avoir participé au meurtre.

Le Tribunal criminel de l’Est vaudois condamne le mari à dix-huit ans de peine privative de liberté pour assassinat et atteinte à la paix des morts. Sa fille est également condamnée à une lourde peine. Le tribunal ordonne en outre le maintien des deux condamnés en détention pour des motifs de sûreté. L’époux forme appel sur le fond. Séparément, il recourt contre son maintien en détention devant le Tribunal cantonal vaudois, puis devant le Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral examine en particulier si le port d’un bracelet électronique est propre à pallier au risque de fuite.… Lire la suite

La détention provisoire excessive (art. 212 al. 3 CPP)

ATF 145 IV 179TF, 11.04.19, 1B_116/2019*

La durée d’une détention provisoire ou pour des motifs de sûreté ne doit pas dépasser ou être très proche de la durée de la peine prévisible. Le fait que la durée de la détention préventive dépasse le trois quarts de la peine prévisible ne permet pas encore de retenir que cette durée est très proche de la peine prévisible. Il faut bien plus examiner l’ensemble des circonstances du cas concret.

Faits

Un étranger est arrêté à la douane avec d’importantes quantités de drogue et placé en détention provisoire. Les juges de première instance le condamnent notamment pour violation grave de la LStup à une peine privative de liberté de 32 mois, sous déduction de la durée de la détention provisoire déjà purgée. Le Tribunal de première instance maintient également la détention pour des motifs de sûreté et prononce une expulsion du territoire suisse pendant 5 ans.

Le prévenu dépose un appel contre ce jugement et demande en parallèle sa libération de la détention pour des motifs de sûreté en raison du fait que la durée actuelle de la détention risque de dépasser la durée de la peine prévisible (détention excessive, Überhaft).… Lire la suite

La prolongation de la détention provisoire en cas d’irresponsabilité probable du prévenu

ATF 143 IV 330 | TF, 24.08.2017, 1B_322/2017*

La détention provisoire et pour des motifs de sûreté peut se justifier même lorsqu’il est possible que le prévenu sera acquitté de toute peine ou mesure. En particulier, l’irresponsabilité du prévenu n’empêche pas sa mise en détention provisoire puisque des mesures stationnaires pourraient être prononcées. 

Faits

Un homme est prévenu d’homicide par dol éventuel pour avoir tenté de se suicider avec sa voiture, sous l’influence d’alcool, en entrant en collision avec une autre voiture qui circulait en sens opposé. Pour ces faits, il se trouve en détention provisoire depuis novembre 2015.

En mai 2017, le Ministère public requiert la prolongation de la détention pour une nouvelle période de trois mois. La demande est rejetée par le Tribunal des mesures de contrainte. Sur recours, le Tribunal cantonal valaisan annule la décision et ordonne la détention du prévenu.

Le prévenu recourt au Tribunal fédéral qui est amené à juger si les conditions de la détention provisoire sont remplies en l’espèce (art. 221 CPP).

Droit

Le prévenu conteste tout d’abord l’existence de charges suffisantes. Il se base sur un rapport psychiatrique et soutient qu’au moment des faits, il était en état d’irresponsabilité (art.Lire la suite

L’interception en prison des accès du compte Facebook d’un prévenu

ATF 143 IV 270 | TF, 24.05.17, 1B_29/2017*

Faits

Un prévenu en détention provisoire (trafic de cocaïne) fait parvenir à une enseignante de langue travaillant dans la prison les données d’accès de son compte Facebook (FB) pour qu’elle puisse envoyer un message à son complice. Début juin, le personnel de prison intercepte la feuille avec le login FB du prévenu et la transmet au procureur qui lit l’historique des messages FB. En septembre, une fois averti de l’interception de son message clandestin, le prévenu demande sa mise sous scellés. Le procureur obtient la levée des scellés devant le TMC. Le prévenu recourt au Tribunal fédéral qui doit examiner pour la première fois les conditions pour intercepter et utiliser le login FB d’un prévenu.

Droit

L’art. 246 ss CPP règle la protection des documents écrits et informatiques, dont fait partie la feuille litigieuse avec les données d’accès FB. La perquisition de documents doit faire l’objet d’un mandat écrit, mais l’urgence autorise la police à se passer dans un premier temps d’une ordonnance écrite (art. 241 al. 1 CPP).

En l’espèce, la situation de péril dans la demeure justifiait l’absence de notification d’un mandat écrit qui aurait permis au prévenu d’exiger la mise sous scellés du message clandestin.… Lire la suite

Le droit pour un couple de prévenus de se rendre visite

ATF 143 I 241 | TF, 18.04.2017, 1B_34/2017*

Faits

Deux prévenus se trouvent en détention provisoire respectivement sous le régime de l’exécution anticipée de la peine pour plusieurs cambriolages qu’ils auraient commis ensemble. Ayant été concubins pendant plus de 15 ans, ils font chacun valoir le droit de se rendre visite au moins une fois par mois, étant précisé qu’ils se trouvent dans deux établissements pénitentiaires différents. Ces demandes sont rejetées par les deux instances cantonales.

Sur recours des deux prévenus, le Tribunal fédéral doit déterminer si ces derniers sont en droit de se rendre visite régulièrement malgré leur détention à deux endroits différents.

Droit

Les recourants se prévalent d’une violation de leur droit à la liberté personnelle (art. 10 Cst.) et à leur vie privée et familiale (art. 13 Cst.), ainsi que d’une violation de l’art. 235 al. 1 CPP.

Une restriction des droits fondamentaux des prévenus étant en jeu, l’art. 36 Cst. constitue le point de départ de l’analyse du Tribunal fédéral. L’art. 235 al. 1 CPP concrétise la portée de cette disposition et prévoit que la liberté des prévenus en détention ne peut être restreinte que dans la mesure requise par le but de la détention et par le respect de l’ordre et de la sécurité dans l’établissement.… Lire la suite