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Compétence du juge unique outrepassée

ATF 147 IV 329 | TF, 10.05.2021, 1B_370/2020*

Lors de la révocation d’un sursis ou d’une libération conditionnelle, un juge unique peut statuer sur des crimes et des délits si la peine privative de liberté ne dépasse pas deux années (art. 19 al. 2 CPP). Est décisive à cet égard la durée totale de privation de liberté que l’intéressé devra subir à la suite du jugement du juge unique. Il en va de même en cas de levée d’un traitement ambulatoire conduisant à l’exécution d’une peine suspendue (art. 63a al. 3 cum 63b al. 2 CP).

Faits

Le 31 octobre 2017, le Bezirksgericht de Pfäffikon condamne un homme à une peine privative de liberté de trente mois pour diverses violations des règles de la circulation routière (LCR). Il ordonne en outre un traitement ambulatoire en raison d’une dépendance à l’alcool, ce qui suspend l’exécution de la peine privative de liberté.

Le 29 janvier 2020, l’Amtsgerichtsstatthalter de Solothurn-Lebern (ci-après : le juge unique) condamne cet homme pour de nouvelles violations aux règles de la circulation routière. Il prononce une peine privative de liberté (ferme) de seize mois. Cette peine constitue une peine complémentaire à celle ordonnée par le Bezirksgericht.… Lire la suite

L’exécution de la peine d’un parent élevant seul ses enfants

ATF 146 IV 267 | TF, 17.08.2020, 6B_40/2020*

Le droit suisse n’est pas lacunaire s’agissant des formes alternatives d’exécution des peines. Le parent qui élève seul ses enfants doit néanmoins tolérer l’exécution d’une peine privative de liberté.

Faits

Une prévenue, qui élève seule deux enfants nés en 2007 et 2013, est définitivement condamnée en novembre 2017 à une peine privative de liberté ferme de quatre ans et demi. Le 26 février 2019, l’autorité d’exécution ordonne son placement en détention. Les recours de la condamnée devant le département compétent puis devant le Tribunal cantonal lucernois sont rejetés.

La condamnée introduit un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral, qui est amené à se prononcer sur la compatibilité de la détention envisagée avec le bien des enfants.

Droit  

Le Tribunal fédéral commence par rappeler que l’exécution de la peine des personnes condamnées doit être assurée, indépendamment de leurs caractéristiques individuelles et des circonstances particulières. Cette tâche incombe en principe aux cantons (art. 372 al. 1 CP). À cet égard, l’intérêt public à l’exécution des peines et l’égalité de traitement limitent de manière importante le pouvoir de l’autorité d’exécution de repousser le début de la détention. Même la possibilité d’une mise en danger de la vie ou de la santé de la personne condamnée ne justifie pas un report indéterminé.… Lire la suite

L’entraide judiciaire internationale, le droit d’être entendu et les nova

ATF 145 III 422 | TF, 02.07.2019, 5A_362/2018*

Le droit d’être entendu des “personnes intéressées” par une procédure d’entraide judiciaire est respecté dès lors qu’elles peuvent recourir contre l’ordonnance d’exécution de la commission rogatoire.

Bien que l’art. 326 al. 1 CPC prévoit l’impossibilité d’alléguer des faits nouveaux et de déposer des nouvelles preuves, ce principe connait une exception lorsque les personnes intéressées n’ont pas été entendues en première instance.

Faits

Dans le cade d’une procédure de divorce pendante devant le Tribunal du district de Riga, le Ministère de la justice de Lettonie dépose une demande d’entraide internationale en matière civile tendant à la fourniture de documents bancaires relatifs aux comptes des époux ouverts auprès d’une banque suisse.

Le Tribunal de première instance de Genève ordonne l’exécution de la demande d’entraide et enjoint la banque de livrer diverses informations relatives aux comptes. L’époux recourt contre cette ordonnance en invoquant (i) une violation du droit d’être entendu et (ii) le retrait par son épouse de la demande en divorce. La Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève rejette le recours (ACJC/243/2018).

Saisi par l’époux, le Tribunal fédéral doit préciser (i) la portée du droit d’être entendu et (ii) la possibilité d’apporter des nova dans la procédure de recours dans le cadre d’une demande d’entraide internationale en matière civile.… Lire la suite

Le for d’une procédure d’avis aux débiteurs

ATF 145 III 255TF, 06.05.2019, 5A_479/2018*

Le for d’une procédure d’avis aux débiteurs au sens des art. 132 al. 1, 177 et 291 CC est défini par les art. 23 et 26 CPC et non par l’art. 339 CPC.

Faits

Se prévalant du fait que son ex-époux néglige son obligation d’entretien, une mère entreprend une procédure judiciaire d’avis aux débiteurs (art. 291 CC) devant les autorités judiciaires bernoises, canton dans lequel son ex-époux travaille. Se fondant sur l’art. 339 CPC, celles-ci se déclarent compétentes et donnent une suite favorable à la requête de la mère.

Sur appel du père, le Tribunal cantonal rejette la compétence des autorités bernoises car il estime que le for doit être défini selon les art. 23 et 26 CPC. La mère recourt au Tribunal fédéral, lequel est amené à déterminer si le for de l’action d’avis aux débiteurs de l’art. 291 CC se définit selon les principes décrits aux art. 23 CPC (for relatif aux actions fondées sur le droit du mariage) et 26 CPC (for relatifs aux actions en entretien) ou si c’est l’art. 339 CPC (for relatif aux mesures d’exécution) qui est alors relevant.… Lire la suite

Les devoirs de vérification de la banque face à un document falsifié

TF, 15.06.2017, 4A_379/2016

Faits

Une cliente dépose environ 1,8 millions d’avoirs auprès d’une banque (execution only) et les fait gérer par un gestionnaire externe. Durant plusieurs années, la cliente procède de manière générale à des retraits allant de CHF 1’000 à CHF 15’000.

L’art. 2 des conditions générales qui lient la cliente à la banque prévoit que « le dommage résultant de défauts de légitimation ou de faux non décelés est à la charge du Client, sauf en cas de faute grave de la Banque ».

Entre 2006 et 2010, le gestionnaire externe a détourné à l’insu de la cliente environ 1,3 millions de francs. Il a notamment adressé à la banque deux ordres de transferts de respectivement CHF 500’000 et CHF 550’000 pour l’acquisition de métaux précieux. Ces deux ordres comportaient une signature falsifiée de la cliente. L’employé de la banque qui a reçu ces deux ordres a considéré qu’ils sortaient de l’ordinaire si bien qu’il a procédé à des contrôles. À cet effet, il a téléphoné au gérant externe pour lui demander si l’opération portait bien sur l’acquisition de métaux précieux ce que le gérant externe a évidemment immédiatement confirmé. Sur la base des dires du gérant, l’employé a procédé au transfert.… Lire la suite