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La répartition des frais dans les litiges relevant du droit de la famille

TF, 11.11.2022, 5A_457/2022*

Les frais doivent être répartis en fonction de l’issue du litige (art. 106 CPC). Les autorités peuvent toutefois s’écarter de cette règle et les répartir selon leur libre appréciation dans les hypothèses prévues à l’art. 107 CPC. Le Tribunal fédéral peut librement revoir l’application des art. 106 ss CPC, mais, statuant dans ce cadre selon les règles du droit et de l’équité, l’autorité cantonale dispose d’un large pouvoir d’appréciation. 

Faits

Une procédure opposant deux parents non mariés est introduite afin de régler les modalités de leur séparation, en particulier les modalités de garde de leur fille et son domicile.

Par décision de mesures provisionnelles, le Tribunal civil de Bâle-Campagne fixe le domicile légal de la fille des parties chez son père et prononce une garde partagée. Ces mesures provisionnelles sont ensuite confirmées au fond par jugement.

Les deux parents forment appel et appel joint contre ce jugement. 

Le Tribunal cantonal de Bâle-Campagne rejette les requêtes du père visant à retirer l’effet suspensif de l’appel concernant les modalités de prise en charge et tendant à un élargissement en sa faveur des heures de prise en charge de sa fille. Durant la procédure, le père dépose une nouvelle requête de mesures provisionnelles par-devant le Tribunal cantonal, sollicitant à nouveau une extension en sa faveur des modalités de garde de sa fille.Lire la suite

La responsabilité de la Confédération pour les actes du délégataire d’une tâche publique

ATF 148 II 218 | TF, 17.12.2021, 2C_69/2021*

La responsabilité du délégataire d’une tâche publique au sens de l’art. 19 LRCF n’est engagée que s’il existe une base légale suffisante autorisant la délégation de l’activité en question. À défaut, la Confédération demeure exclusivement responsable du dommage causé sans droit par le délégataire dans l’exercice de cette activité.

Faits

En 2014, l’Office fédéral des migrations (ODM ; aujourd’hui Secrétariat d’État aux migrations) conclut un accord-cadre avec la société Securitas SA (Securitas). Cet accord-cadre règle les modalités de la fourniture par Securitas de prestations visant en particulier à garantir la sécurité et l’ordre dans les centres d’enregistrements de l’ODM.

En 2018, deux employés de Securitas sont impliqués dans une altercation violente avec un requérant d’asile. S’estimant victime d’un acte illicite, le requérant d’asile fait valoir des dommages-intérêts et un tort moral à l’encontre de Securitas. En outre, il forme une requête d’assistance judiciaire.

Securitas se tourne alors vers le Département fédéral des finances (DFF) afin de l’informer du fait qu’elle prévoit d’admettre la requête d’assistance judiciaire formée par le requérant d’asile. Elle considère que la Confédération est tenue de supporter les frais en découlant et souhaite en obtenir la confirmation avant de rendre sa décision.… Lire la suite

L’indemnisation en cas de note de frais tardive

ATF 146 IV 332 | TF, 17.09.20, 6B_130/2020*

Lorsque l’autorité enjoint au prévenu de chiffrer et de justifier ses prétentions selon l’art. 429 al. 2 CPP, celui-ci a un devoir de collaboration. Un comportement passif du prévenu – par exemple en cas de dépôt tardif de la note de frais, soit après l’expiration du délai imparti à cet effet – peut ainsi équivaloir à une renonciation implicite. Dans un tel cas, l’indemnité pour les frais de défense ne doit pas être fixée d’office.

Faits

Suite à une querelle de quartier, le Ministère public du canton de Thurgovie ouvre une procédure pénale à l’encontre de plusieurs individus. Par la suite, la procédure est toutefois classée. Le Ministère public met alors les frais à la charge de l’État, mais ne verse pas d’indemnité pour frais de défense à un prévenu représenté par un avocat et également partie plaignante dans cette affaire.

Le prévenu précité recourt contre la décision du Ministère public, mettant notamment en cause le refus d’indemnisation et concluant à ce qu’il lui soit versé une indemnité à hauteur d’environ CHF 6’700. Le Tribunal cantonal thurgovien rejette le recours, concluant à une renonciation implicite à l’indemnisation en raison du fait que la note de frais de l’avocat n’a été déposée qu’après l’expiration du délai imparti – et prolongé – à cet effet (plus précisément cinq jours après l’expiration du délai fixé par le Ministère public et le lendemain de l’ordonnance de classement). … Lire la suite

L’indemnisation du conseil juridique gratuit

ATF 143 IV 453 | TF, 9.11.17, 6B_1252/2016*

Une rémunération forfaitaire du conseil juridique gratuit est admissible. Il n’est pas nécessaire de procéder à un contrôle systématique de la règle du tarif horaire de CHF 180. 

Faits 

Un avocat agit comme conseil juridique gratuit d’une partie plaignante dans le cadre d’une procédure pénale. L’avocat adresse par la suite à son client une note d’honoraires s’élevant à près de CHF 14’000, mais le Bezirksgericht Zürich réduit l’indemnité à environ CHF 11’500. Cette réduction est due à une rémunération forfaitaire pour les activités en procédure de première instance.

L’avocat recourt alors auprès de l’Obergericht – ou Tribunal cantonal – zurichois. Son recours rejeté, il s’adresse au Tribunal fédéral. Celui-ci doit analyser la légalité de l’indemnisation en question.

Droit

Tout d’abord, le Tribunal fédéral rappelle que les cantons disposent d’un large pouvoir d’appréciation dans la fixation des honoraires du conseil juridique gratuit. Le Tribunal fédéral n’intervient que lorsque l’indemnisation atteint un niveau tel qu’il viole le sentiment de justice.

Le conseil juridique gratuit, de même que le défenseur d’office, sont indemnisés conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès (art. 135 al. 1 et art.Lire la suite

Les frais de l’opposition en matière d’aménagement du territoire et de constructions

ATF 143 II 467 – TF, 14.06.2017, 1C_266/2016*

Les frais de la procédure d’opposition en matière de planification ainsi qu’en matière d’autorisation de construire doivent en principe être mis à la charge de l’initiateur du projet et non de l’opposant. Ils peuvent exceptionnellement être mis à la charge de l’opposant, lorsque l’opposition apparaît d’emblée manifestement irrecevable ou manifestement infondée au point d’engager la responsabilité de l’opposant au sens de l’art. 41 CO. En revanche, le droit cantonal ne peut pas se contenter de prévoir que l’opposant qui succombe supporte les frais subséquents à une séance de conciliation s’il les a occasionnés sans nécessité.

Faits

Le Parlement de la République et canton du Jura modifie la réglementation de la répartition des frais relatifs aux procédures d’opposition en matière de permis de construire et de plans communaux. Les nouvelles dispositions de la loi cantonale sur les constructions et l’aménagement du territoire (LCAT/JU) prévoient que l’opposant supporte les frais relatifs à la séance de conciliation si l’opposition est manifestement irrecevable ou manifestement infondée. En cas d’échec de la conciliation, les frais subséquents sont mis à la charge de l’opposant qui succombe s’il les a occasionnés sans nécessité.

Après avoir contesté sans succès cette modification législative auprès de la Cour constitutionnelle, des citoyens du canton saisissent le Tribunal fédéral d’un recours en matière de droit public pour faire annuler les dispositions litigieuses.… Lire la suite