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Etendue de l’examen d’une initiative populaire et principe de la stabilité des plans (art. 21 al. 2 LAT)

TF, 28.09.2023, 1C_32/2023

Dans le contrôle de conformité d’une initiative populaire en matière de planification, la commune doit se limiter à un examen sommaire de l’art. 21 al. 2 LAT et ne sanctionner que les cas de violations manifestes du principe de la stabilité des plans.

Faits

En 2006, la commune du Mont-sur-Lausanne adopte le plan de quartier « Valleyre » qui prévoit une zone de verdure et d’habitats groupés. Ce plan n’entre toutefois en vigueur qu’en 2019, en même temps que d’autres plans de quartier afin d’exécuter un remaniement parcellaire. En 2021, des électeurs de la commune déposent un projet d’initiative populaire communale rédigée en termes généraux dans le but de classer le périmètre du plan de quartier « Valleyre » en zone inconstructible.

La commune du Mont-sur-Lausanne déclare invalide le projet d’initiative au motif qu’il contrevient à l’art. 21 al. 2 LAT, lequel consacre le principe de la stabilité des plans. Sur recours du comité d’initiative, la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal vaudois déclare l’initiative valide.

Des citoyens opposés à l’initiative forment un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer en particulier sur l’étendue de l’examen d’une initiative populaire en matière de planification au regard du principe de la stabilité des plans (art.Lire la suite

L’annulation du scrutin fédéral sur l’initiative “Pour le couple et la famille – Non à la pénalisation du mariage”

ATF 145 I 207TF, 10.04.2019, 1C_338/2018*

En communiquant sans réserve en 2016 que quelque 80’000 couples mariés à deux revenus étaient touchés par la pénalisation fiscale du mariage, alors que ce nombre ne résultait que d’une estimation fondée sur des données statistiques datant de 2001, le Conseil fédéral a contribué à ce que l’état d’information global précédant la votation populaire sur l’initiative « Pour le couple et la famille – Non à la pénalisation du mariage » soit incompatible avec la liberté de vote (art. 34 al. 2 Cst.). Au vu du peu de temps écoulé depuis la votation, du faible écart de voix par lequel cette initiative a été rejetée, de la large diffusion de cette information, de l’influence importante qu’elle a pu avoir sur l’opinion des citoyennes et citoyens et de l’absence d’atteinte à la sécurité du droit, il se justifie d’annuler rétrospectivement la votation sur cette initiative.

Faits

Le 28 février 2016, le peuple a rejeté à 50.8 % (1’664’224 non contre 1’609’152 oui) – mais les cantons l’ont acceptée (15 3/2 pour le oui contre 5 3/2 pour le non) – l’initiative « Pour le couple et la famille – Non à la pénalisation du mariage », visant à modifier l’art. Lire la suite

La campagne politique sur l’initiative « Monnaie pleine » (art. 34 al. 2 Cst.)

ATF 145 I 175 | TF, 10.12.2018, 1C_216/2018*

Le recourant qui s’en prend aux explications du Conseil fédéral pour contester l’état général de l’information lors d’une campagne politique doit démontrer en quoi ces explications ont influencé l’état général. En tant qu’autorité chargée d’informer le public de la politique monétaire et en raison de son expertise particulière, la Banque nationale suisse était habilitée à prendre publiquement position sur l’initiative « Monnaie pleine ». En tant que conférence spécialisée intercantonale, la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des finances ne pouvait en revanche pas en faire de même. En effet, lorsque la majorité ou l’ensemble des cantons sont considérablement touchés par une votation fédérale, seule la Conférence des gouvernements cantonaux a le droit de s’exprimer au nom de ces cantons à la lumière de l’art. 34 al. 2 Cst. 

Faits

A l’occasion de la campagne à propos de l’initiative populaire fédérale « Pour une monnaie à l’abri des crises : émission monétaire uniquement par la Banque nationale ! (Initiative Monnaie pleine) », un citoyen recourt auprès du Conseil d’Etat argovien en invoquant une violation de la liberté de vote (art. 34 al. 2 Cst.). Il critique d’une part les explications de vote du Conseil fédéral, d’autre part la publication en ligne d’un communiqué intitulé « Les arguments de la BNS contre l’initiative Monnaie pleine » par la Banque nationale suisse (BNS) et d’un communiqué intitulé « La CDF recommande de rejeter l’initiative « Monnaie pleine » » par la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des finances (CDF).… Lire la suite

L’invalidation de l’initiative populaire “Pour des têtes nues à l’école” (VS)

TF, 20.08.2018, 1C_76/2018

L’interprétation d’une initiative à des fins de contrôle de sa validité matérielle doit prendre en compte la volonté des auteurs de l’initiative lorsque celle-ci délimite le cadre de l’interprétation du texte et du sens que les signataires ont pu lui attribuer.

En l’espèce, en dépit du texte neutre de l’initiative, il ressort de la campagne d’affichage et d’un communiqué de presse que l’initiative visait essentiellement à interdire le port du voile à l’école. Pour cette raison, elle est contraire à la liberté de conscience et de croyance (art. 15 Cst.).

Faits

En mars 2016, l’initiative populaire conçue en termes généraux « Pour des têtes nues dans les écoles publiques valaisannes » aboutit. Elle demande « l’élaboration d’une loi imposant une tenue tête nue dans les écoles publiques valaisannes ».

Dans leurs rapports, la Commission de justice et le Conseil d’Etat relèvent que l’initiative pose un problème au regard de la liberté de conscience et de croyance (art. 15 Cst.), mais proposent de la déclarer recevable. Le Grand Conseil déclare néanmoins l’initiative irrecevable et publie cette décision, sans motivation, dans le Bulletin officiel du canton du Valais.

Saisi d’un recours contre cette décision, le Tribunal fédéral doit d’une part déterminer si le Grand Conseil a suffisamment motivé sa décision, et, d’autre part, s’il a invalidé à raison l’initiative, ce qui suppose d’examiner si celle-ci respecte la liberté de conscience et de croyance (art. Lire la suite

Les résidences secondaires (art. 75b Cst.) et l’expropriation matérielle

ATF 144 II 367 | TF, 06.08.2018, 1C_216/2017*

La limitation de la construction de résidences secondaires introduite par l’art. 75b Cst. constitue une concrétisation et non une restriction de la propriété (art. 26 Cst.). Partant, elle ne donne en principe pas droit à une indemnité pour expropriation matérielle. Dans le cas d’espèce, il n’y a pas non plus de circonstance particulière justifiant une indemnité fondée sur une inégalité de traitement crasse.

Faits

Dans une commune comptant plus de 20 % de résidences secondaires, une société de construction se voit refuser un permis de construire (demandé le 6 juin 2012) pour un chalet résidentiel de 4 appartements, au motif qu’elle souhaite vendre ses appartements tant comme résidences secondaires que principales.

La société demande à la commune une indemnité pour expropriation matérielle mais la commune refuse d’entrer en matière. Elle forme alors une demande en indemnisation dirigée contre la commune auprès de la Commission d’estimation. Cette dernière rejette la requête et sa décision est confirmée sur recours par le Tribunal cantonal.

La société dépose un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, invoquant une violation de la garantie de propriété (art. 26 Cst.). Le Tribunal fédéral doit ainsi déterminer quelle serait l’autorité compétente pour attribuer une éventuelle indemnité pour expropriation matérielle en raison de la législation de limitation des résidences secondaires, ainsi que si l’interdiction de construire des résidences secondaires constitue une restriction à la propriété susceptible de donner lieu à une indemnisation pour expropriation matérielle.… Lire la suite