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La renonciation à recourir au Tribunal fédéral en arbitrage international

ATF 143 III 589 | TF, 17.10.2017, 4A_53/2017*

Une clause d’arbitrage qui prévoit que “There shall be no appeal to any court from awards rendered hereunder” est une renonciation valable à recourir auprès du Tribunal fédéral. S’il existe une telle renonciation, la voie de la révision n’est pas non plus ouverte.

Faits

Une société acquiert 25 % du capital d’une entreprise énergétique dont un Etat est le principal actionnaire. Par la suite, la société augmente sa part dans l’entreprise et conclut deux contrats avec l’Etat afin de contrôler la gestion de celle-ci.

Ces contrats contiennent la clause compromissoire suivante : “Awards rendered in any arbitration hereunder shall be final and conclusive and judgment thereon may be entered into any court having jurisdiction for enforcement thereof. There shall be no appeal to any court from awards rendered hereunder“.

Alléguant que les contrats ont été obtenus grâce à un pot-de-vin de 10 millions d’euros, l’Etat engage une procédure d’arbitrage conformément au Règlement d’arbitrage de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI). Il conclut à la constatation de la nullité des deux contrats.

Le Tribunal arbitral, ayant siège à Genève, rejette la demande de l’Etat.

L’Etat exerce alors un recours auprès du Tribunal fédéral et conclut à la récusation de l’arbitre qu’il a nommé.… Lire la suite

La révision d’une sentence arbitrale

ATF 142 III 521 | TF, 07.09.2016, 4A_386/2015*

Faits

Une société italienne conclut un contrat avec une filiale allemande d’un grand groupe allemand. Le contrat contient une clause arbitrale. À la suite d’un litige entre les parties, un avocat zurichois est désigné comme arbitre unique par la CCI et condamne, dans sa sentence, la société italienne à payer des dommages-intérêts à la filiale allemande.

Presque quatre mois après le rendu de la sentence, la société italienne découvre que l‘arbitre exerce au sein d’une étude zurichoise qui fait partie d’un réseau international d’étude. Or, une étude allemande faisant partie de ce même réseau a conseillé une autre filiale du grand groupe allemand.

La société italienne forme alors une demande de révision auprès du Tribunal fédéral dans laquelle elle invite ce dernier à prononcer la récusation de l’arbitre. Le Tribunal fédéral doit se prononcer sur la possibilité de demander une révision d’une sentence lorsqu’un motif de récusation a été découvert après le délai légal de recours.

Droit

La LDIP ne contient aucune disposition relative à la révision des sentences arbitrales. Le Tribunal fédéral a comblé cette lacune par voie jurisprudentielle. Sous l’empire de l’ancienne OJ, le Tribunal fédéral avait considéré que la découverte, a posteriori, d’une violation des prescriptions concernant la composition du tribunal arbitral, telle la participation à la procédure d’un arbitre qui aurait dû se récuser, ne constituait pas un motif de révision d’une sentence rendue en matière d’arbitrage international, sous réserve de la mise au jour d’un cas de corruption touchant l’arbitre incriminé.… Lire la suite

La compétence territoriale pour connaître de la liquidation d’une société simple (art. 5 par. 1 CL)

ATF 142 III 466 | TF, 23.06.2016, 4A_445/2015*

Faits

Un ressortissant français et sa concubine forment ensemble une société simple pour ce qui concerne les activités professionnelles du concubin. Les concubins vivent sous le même toit dans le canton de Vaud.

Au décès du concubin, la concubine demande la dissolution et la liquidation de la société simple formée par elle et le de cujus. Ce faisant, elle entreprend une action en paiement contre les héritiers, lesquels sont domiciliés en France et en Espagne.

Le Tribunal de première instance se déclare incompétent et juge que l’action de la concubine est irrecevable. L’appel de celle-ci est admis, le Tribunal cantonal considérant que l’action doit être déclarée recevable. Les héritiers recourent au Tribunal fédéral contre cet arrêt.

La question posée par cet arrêt est de savoir si les deux héritiers peuvent être attraits devant les juridictions vaudoises pour l’action fondée sur la liquidation de la société simple formée par les concubins.

Droit

Après avoir reconnu l’application ratione materiae de la Convention de Lugano, le Tribunal fédéral répond à la question posée par l’arrêt en deux temps  :

Dans un premier temps, le Tribunal fédéral détermine si en l’espèce la compétence se définit selon l’art.Lire la suite

La compétence des autorités suisses lorsque des enfants sont domiciliés à l’étranger (art. 85 LDIP)

ATF 142 III 56 | TF, 20.01.2016, 5A_331/2015*

Faits

Une mère divorcée élit domicile en Tunisie avec ses deux enfants. Le père dépose une demande en modification du jugement de divorce afin que l’autorité parentale exclusive lui soit attribuée. Il obtient gain de cause devant le Tribunal fédéral. La mère reste en Tunisie avec les deux enfants et se fait condamner pour enlèvement d’enfants. Quelques années après, elle met au monde deux autres enfants et demande une nouvelle modification du jugement de divorce afin d’obtenir l’autorité parentale exclusive des deux premiers enfants. Le tribunal de première instance puis le Tribunal cantonal font droit à sa demande. Le père saisit alors le Tribunal fédéral qui doit examiner la compétence des autorités suisses pour une modification du jugement de divorce.

Droit

Le Tribunal fédéral examine d’office sa compétence en matière d’affaires non patrimoniales relatives à une action en modification du jugement de divorce. La Tunisie n’a ni ratifié la Convention de la Haye de 1996 en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants (CLaH96), ni la Convention de la Haye de 1961 (CLaH61). Partant, la LDIP est applicable.

L’art. 85 al. 1 LDIP renvoie à la CLaH96 en ce qui concerne la protection des mineurs.… Lire la suite

Les faits doublement pertinents allégués dans la partie “En droit”

ATF 141 III 294 | TF, 25.06.2015, 4A_703/2014*

Faits

En se fondant sur une reconnaissance de dette, un créancier domicilié en Suisse ouvre action en paiement en Suisse contre un débiteur domicilié en Suède. La reconnaissance de dette porte sur des services que le demandeur aurait fournis en Suisse pour le compte de la mère, entretemps décédée, du défendeur, conformément à un contrat de mandat. Ce n’est que dans la partie « En droit » d’une détermination supplémentaire qui fait suite à son mémoire de demande que le demandeur a précisé la cause de la reconnaissance de dette, à savoir le contrat de mandat.

Les instances cantonales ont toutes admis leur compétence sur la base de l’art. 5 par. 1 let. b 2e tiret CL. Le défendeur forme un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. Il considère que les tribunaux suisses ne sont pas compétents, dès lors que le demandeur n’a pas valablement allégué la cause de sa demande. Il reproche à la cour cantonale d’avoir complété l’état de fait en violation de la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC) en retenant des faits non allégués dans la demande, mais qui ressortent de la partie « en droit » d’une détermination ultérieure.… Lire la suite