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La poursuite autonome pour les frais de la procédure de mainlevée

ATF 149 III 210| TF, 24.11.2022, 5A_433/2022*

Un créancier peut intenter une seconde poursuite portant uniquement sur les frais de poursuite accordés par une première décision de mainlevée. La première décision de mainlevée vaut alors titre de mainlevée définitive dans la seconde poursuite. Néanmoins, si le créancier a retiré sa première poursuite ou l’a laissée se périmer, une poursuite autonome subséquente portant sur les frais accordés par la première décision de mainlevée est vouée à l’échec.

Faits

Une épouse fait notifier à son conjoint un commandement de payer en exécution d’une décision de mesures protectrices de l’union conjugale. A la suite du prononcé de la mainlevée définitive de l’opposition, le conjoint est astreint à lui verser une indemnité de dépens et une partie des frais judiciaires. Faute pour l’épouse d’avoir requis la continuation de la poursuite, celle-ci s’est périmée.

Trois ans plus tard, l’épouse fait notifier un nouveau commandement de payer portant notamment sur le paiement des frais judiciaires et de l’indemnité de dépens accordés au cours de la précédente procédure de mainlevée. Le Tribunal cantonal prononce la mainlevée définitive de l’opposition formée contre ce second commandement de payer. Contre cet arrêt, le conjoint intente un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral.… Lire la suite

Les restaurants auront-ils droit à une réduction de loyer suite à la pandémie de Covid-19 ?

Bezirksgericht de Zurich, EB201177-L / U, 23.04.2021 

Lorsqu’une prestation contractuelle n’a pas été fournie conformément à ce que prévoyait le contrat de bail, celui-ci ne peut plus constituer un titre de mainlevée approprié pour les loyers échus, même si le·la bailleur·resse a rempli ses obligations contractuelles.

Par ailleurs, il n’est pas exclu qu’un·e restaurateur·rice lésé·e par la pandémie ait droit à une réduction de loyer sur la base de la clausula rebus sic stantibus (changement de circonstances exceptionnel).

Faits

Une personne exploite un bar-restaurant dans des locaux qu’elle loue en ville de Zurich. Elle ne verse pas l’entier de son loyer pour la période de mars à juillet 2020. La bailleresse initie une poursuite à son encontre. La locataire forme opposition, arguant que la bailleresse n’a pas délivré la prestation requise. La bailleresse forme une requête de mainlevée auprès du Bezirksgericht de Zurich sur la base du contrat de bail.

Droit

Un contrat de bail signé par le·la locataire permet en principe au créancier de requérir la mainlevée provisoire (art. 82 LP) pour les loyers échus et les frais annexes correspondants. La mainlevée doit toutefois être refusée lorsque le·la locataire fait valoir que l’autre partie n’a pas rempli ses obligations conformément au contrat et que les contestations ne sont pas manifestement infondées.… Lire la suite

Registre des poursuites : faut-il faire figurer la poursuite après le rejet de la requête de mainlevée ?

ATF 147 III 41 | TF, 22.06.2020, 5A_656/2019*

Le rejet de la requête de mainlevée du créancier ne fonde pas le poursuivi à demander que la poursuite ne soit pas portée à la connaissance de tiers.

Faits

Un créancier fait notifier un commandement de payer à un individu. Ce dernier forme opposition. Le créancier sollicite la mainlevée de l’opposition, mais le tribunal juge cette requête irrecevable.

Le poursuivi demande à l’office des poursuites que la poursuite ne soit pas portée à la connaissance de tiers, sans succès.

Après épuisement des voies de recours cantonales, le poursuivi recourt auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit déterminer si une poursuite peut être portée à la connaissance de tiers lorsque le poursuivi a formé opposition et que la requête de mainlevée du créancier n’a pas abouti.

Droit

En principe, les tiers faisant état d’un intérêt vraisemblable peuvent consulter le registre des poursuites (art. 8a al. 1 LP).

Le recourant se réfère à l’art. 8a al. 3 let. d LP pour solliciter la non-divulgation de la poursuite litigieuse. Selon cette disposition, sur demande du débiteur trois mois au moins après la notification du commandement de payer, l’office des poursuites ne porte pas à la connaissance de tiers les poursuites frappées d’opposition pour lesquelles le créancier n’a pas engagé de procédure d’annulation de l’opposition (art.Lire la suite

La preuve du droit étranger en procédure de mainlevée

ATF 145 III 213 | TF, 25.02.2019, 5A_648/2018*

Dans une procédure de mainlevée, la charge de démontrer le droit étranger sur les moyens libératoires incombe au poursuivi. Quant au degré de preuve requis, le poursuivi doit rendre le contenu de ce droit simplement vraisemblable.

Faits

Un couple est marié selon le régime matrimonial de la communauté légale de droit français (art. 1400 à 1419 du Code civil français). En juillet 2008, l’époux conclut avec une banque un contrat de prêt qui porte sur un montant de deux millions d’euros et qui est soumis au droit français. Son épouse signe un “bon pour consentement” dans lequel elle confirme avoir donné à son époux le pouvoir de conclure ce contrat de prêt.

Deux ans plus tard, la banque résilie le contrat et engage des poursuites à l’encontre des deux époux, lesquels forment opposition totale. Suite à une requête de mainlevée déposée par la banque, les époux produisent notamment des avis de droit français afin de prouver que les effets de la mainlevée ne peuvent porter que sur les biens propres de l’époux.

Suite au prononcé de la mainlevée provisoire, les époux se voient déboutés par le Tribunal cantonal vaudois (KC17.029669-172199 77).… Lire la suite

La mainlevée provisoire fondée sur un contrat bilatéral

ATF 145 III 20 | TF, 12.09.2018, 5A_1017/2017*

Un contrat bilatéral ne vaut reconnaissance de dette au sens de l’art. 82 al. 1 LP que pour autant que le créancier poursuivant ait exécuté sa propre prestation en rapport d’échange. Si le débiteur poursuivi se prévaut d’une inexécution du créancier, il revient au créancier de démontrer qu’il a exécuté sa propre prestation. La simple allégation par le débiteur de l’inexécution du créancier suffit pour que ce dernier soit requis d’apporter la preuve de son exécution.

Faits

Une convention prévoit que le vendeur s’engage à remettre un portefeuille clientèle à l’acheteur moyennant le versement d’un prix par ce dernier. À défaut de paiement, le vendeur fait notifier à l’acheteur un commandement de payer à hauteur du prix convenu. L’acheteur forme opposition.

Sur le fondement de la convention, le vendeur sollicite la mainlevée provisoire de l’opposition, qui est prononcée par le Juge de paix du district d’Aigle.

L’acheteur, alléguant l’inexécution par le vendeur de la contre-prestation, à savoir la remise du portefeuille clientèle, forme un recours au Tribunal cantonal vaudois. Celui-ci admet le recours de l’acheteur et maintient l’opposition au commandement de payer. En substance, le Tribunal cantonal considère que le vendeur n’a pas établi la preuve de l’exécution de sa prestation.… Lire la suite