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L’utilisation d’un espace de co-working par un avocat

ATF 145 II 229 | TF, 04.06.2019, 2C_1083/2017*

L’utilisation d’un espace de co-working par un avocat est susceptible de le mettre dans une situation de dépendance structurelle non conforme à l’art. 8 al. 1 let. d LLCA et de compromettre son secret professionnel (art. 13 LLCA).

Faits

Une avocate genevoise souhaite recourir aux services d’une société mettant à disposition des espaces de co-working pour les avocats. Elle informe ainsi la Commission du barreau de son changement d’adresse professionnelle.

Sur demande de la Commission du barreau, l’avocate présente les conditions générales du contrat qui la lie à la société de co-working. Il en ressort notamment que les courriers destinés à l’avocate sont adressés à la société de co-working. Celle-ci s’engage à chercher le courrier à la case postale tous les matins des jours ouvrables à Genève. Elle s’engage également à garder le courrier de l’avocat non ouvert (sauf les fax), à disposition de l’avocat, pendant une période maximale de six mois après réception, période après laquelle le courrier est détruit sans autre préavis. Si l’option d’ouverture du courrier et de réexpédition par e-mail est convenue, le personnel de la société de co-working ouvre les envois et procède à la réexpédition par courrier électronique dans les plus brefs délais.… Lire la suite

Le conflit d’intérêts en cas de changement d’étude d’un collaborateur

ATF 145 IV 218TF, 14.03.2019, 1B_510/2018*

La connaissance par un collaborateur en raison de son précédent emploi d’un dossier traité par le nouvel employeur constitue l’élément déterminant pour retenir la réalisation d’un conflit d’intérêts concret, lequel doit être évité.

Faits

Deux avocats du département judiciaire d’une étude genevoise défendent une société. En 2015, cette société dépose dans le canton de Vaud une plainte pénale contre un ancien employé de la société, lequel décide de se faire défendre par une autre étude genevoise. Au moment du dépôt de la plainte pénale, il se trouve que cette seconde étude genevoise confie en partie le dossier du prévenu à une collaboratrice qui le rencontre à tout le moins à une occasion. Or en 2017, la collaboratrice rejoint comme employée le département “droit du travail” de l’étude genevoise qui défend la société.

En 2017, le prévenu décide de changer d’avocat et informe le Ministère public que Me Etienne Campiche le représente dorénavant. En 2018, le prévenu requiert que le Ministère public vaudois interdise aux deux avocats de la plaignante de la représenter motifs pris que la collaboratrice qui a rejoint leur étude en 2017 avait eu accès au dossier lorsqu’elle travaillait chez son précédent employeur.… Lire la suite

L’organisation d’une étude d’avocats en société anonyme

ATF 144 II 147TF, 15.12.2017, 2C_1054/2016 et 2C_1059/2016*

Le fait que des personnes autres que des avocats inscrits dans un registre cantonal détiennent des droits de participation dans une étude d’avocats, organisée sous forme de personne morale, ou siègent dans son conseil d’administration, n’est pas conciliable avec les garanties d’indépendance et de secret professionnel prévues dans la LLCA.

Faits

En 2008, une étude d’avocats zurichoise se voit autoriser la pratique de la profession d’avocat en étant organisée en société anonyme par la Commission de surveillance des avocats de Zurich.

En 2015, deux avocats de cette étude zurichoise, en leur qualité de membres du conseil d’administration, sollicitent de la Commission du barreau de Genève l’agrément pour l’exercice de la profession d’avocat sous forme d’une société de capitaux. À l’appui de leur requête, ils exposent que les statuts de l’étude prévoient qu’au minimum trois quarts des associés doivent être avocats inscrits à l’un des barreaux cantonaux. Au moment de la requête, un seul des trente-neuf associés de l’étude, expert fiscal diplômé, n’est pas inscrit à un registre cantonal d’avocats.

La Commission du barreau de Genève rejette la requête de l’étude zurichoise et cette décision est confirmée par la Cour de justice genevoise.… Lire la suite

Le conflit d’intérêts de l’avocat lorsque son associé est administrateur d’une société

TF, 11.07.2016, 2C_45/2016

Faits

Un avocat défend une partie plaignante dans une procédure pénale à l’encontre d’un prévenu. Le prévenu est apporteur d’affaires et actionnaire à 5 % d’une société, dont le conseil d’administration est présidé par un avocat associé à l’avocat qui représente les intérêts de la partie plaignante.

Les avocats du prévenu ont dénoncé l’avocat de la partie plaignante à la Commission du barreau du canton de Genève pour conflit d’intérêts. Par décision, la Commission du barreau a enjoint l’avocat de cesser de représenter la partie plaignante, en estimant qu’il y avait un conflit d’intérêts. Sur recours de l’avocat, la Cour de justice du canton de Genève a confirmé la décision de la Commission du barreau dans son résultat. La Cour a estimé que le conflit d’intérêts résulte du fait que, en tant qu’actionnaire de la société, le prévenu participe à la nomination, à la révocation et à la décharge du conseil d’administration et que, dans une telle configuration, l’associé président du conseil d’administration pourrait avoir accès au dossier pénal.

L’avocat de la partie plaignante forme ainsi un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, qui doit se prononcer sur l’existence d’un conflit d’intérêts dans la situation en cause.… Lire la suite

Le conflit d’intérêts dans la représentation de plusieurs prévenus

ATF 141 IV 257 | TF, 28.07.2015, 1B_98/2015*

Faits

En 2012, le syndicat UNIA a décerné à une Sàrl la palme d’or du mauvais employeur du canton de Neuchâtel. Celle-ci a déposé plainte pénale pour calomnie et diffamation à l’encontre de trois syndicalistes et de trois de ses anciens employés. Un seul avocat s’est constitué pour la défense de tous les prévenus.

La juge du Tribunal de police a interdit à l’avocat de représenter les six prévenus. Ceux-ci, ainsi que l’avocat, ont recouru contre cette décision. L’Autorité de recours a confirmé la décision en retenant qu’une défense efficace imposait que les deux groupes – les trois syndicalistes et les trois anciens employés – soient défendus par des avocats différents.

Les six prévenus et l’avocat forment un recours en matière pénale. Le Tribunal fédéral doit dès lors se déterminer sur la question du conflit d’intérêts de l’avocat qui représente plusieurs prévenus dans une même procédure.

Droit

L’art. 127 al. 3 CPP prévoit que “[d]ans les limites de la loi et des règles de sa profession, un conseil juridique peut défendre les intérêts de plusieurs participants à la procédure dans la même procédure”. Puisque seul un avocat peut représenter des prévenus (art.Lire la suite