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La contestation de la non-réélection d’un juge cantonal en raison de son âge

ATF 147 I 1TF, 16.07.2020, 1C_295/2019, 1C_357/2019*

L’élection de juges cantonaux par le parlement cantonal est une décision rendue dans une cause de droit public au sens de l’art. 82 let. a LTF, lorsque le recourant fait valoir qu’elle porte atteinte à ses droits fondamentaux ou à d’autres intérêts qui nécessitent une protection juridique. Il s’agit par ailleurs d’une décision à caractère politique prépondérant selon l’art. 86 al. 3 LTF. Sur le fond, exclure la réélection des juges cantonaux qui ont 65 ans révolus au début de la nouvelle période de fonction n’est pas une discrimination inadmissible (art. 8 al. 2 Cst.). En revanche, cette pratique peut conduire à des différences de traitement injustifiées au sens de l’art. 8 al. 1 Cst. entre les juges qui atteignent 65 ans peu avant le début de la nouvelle période de fonction et ceux qui les atteignent peu après.

Faits

Un juge du Tribunal administratif du canton de Zurich, né en 1952, se présente à sa réélection pour la période de fonction 2019-2025, en précisant à la conférence inter-groupes chargée de préparer l’élection qu’il entend exercer seulement jusqu’à ses 70 ans. En raison d’une décision qu’elle a prise en 2010 de ne pas proposer au Grand Conseil la réélection des juges des tribunaux cantonaux supérieurs qui ont déjà 65 ans révolus au début de la nouvelle période de fonction, la conférence ne propose pas sa réélection.… Lire la suite

Bostock v. Clayton County : La protection des minorités sexuelles dans le monde du travail

U.S. Supreme Court : Bostock v. Clayton County, 590 U.S. ___ (2020)

La Cour Suprême des États-Unis retient que le Titre VII du Civil Rights Act de 1964 interdit à tout employeur-euse de discriminer ses employé-e-s en raison de leur orientation sexuelle ou d’un changement de genre. En effet, il est impossible de discriminer une personne en raison du fait qu’elle est homosexuelle ou transgenre sans discriminer cette personne en raison de son sexe, ce qui est précisément interdit par le Civil Rights Act.

Faits

Dans l’État de Géorgie, Gerald Bostock est licencié car la société qui l’emploie apprend qu’il fait partie d’une League amateur gay de softball. Dans l’État de New York, Donald Zarda est licencié pour des raisons similaires. Enfin, dans l’État du Michigan, Aimee Stephens est licenciée car, alors qu’elle s’était présentée comme étant un homme lorsqu’elle a été embauchée, elle annonce à la société qui l’emploie qu’elle souhaite poursuivre sa vie en tant que femme.

Les trois employé-e-s entreprennent chacun-e-s une action civile contre leurs employeuses respectives pour violation du Titre VII du Civil Rights Act. Les trois procédures atteignent la Cour Suprême des États-Unis, laquelle les joint. Elle doit se prononcer sur la question de savoir si le Titre VII du Civil Rights Act édicté en 1964 par le Congrès interdit à un-e employeur-euse de discriminer ses employé-e-s en raison de leur orientation sexuelle ou de leur changement de genre.Lire la suite

L’homosexualité et l’interdiction de discrimination directe selon la LEg

ATF 145 II 153 | TF, 05.04.19, 8C_594/2018*

Une discrimination en raison de l’orientation sexuelle, notamment en cas d’homosexualité, ne constitue pas une discrimination directe fondée sur le sexe des travailleurs selon la LEg (art. 3 LEg).

Faits

Un homme conclut un contrat de travail à durée déterminée avec l’Armée suisse. Peu avant l’expiration de son contrat, le travailleur postule à nouveau pour le même emploi. L’Armée suisse indique alors au travailleur qu’une prolongation de son contrat n’est pas possible, le poste en question n’existant que jusqu’à l’expiration de son contrat.

Faisant valoir que son orientation sexuelle – soit son homosexualité – est la cause du refus de la prolongation de son contrat, l’ex-employé demande alors à ce qu’une décision concernant la non-prolongation soit rendue. L’Armée suisse rend alors une décision, niant toute discrimination. L’ex-employé recourt contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral (TAF). Débouté, l’homme interjette recours auprès du Tribunal fédéral faisant valoir des prétentions en dommages-intérêts et en réparation du tort moral.

Le Tribunal fédéral doit trancher la question de savoir si une discrimination en raison de l’orientation sexuelle peut constituer une discrimination directe selon l’art. 3 LEg.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par procéder à une interprétation de l’art.Lire la suite

Le contrôle d’une loi sur le stationnement des communautés nomades

ATF 145 I 73 | TF, 13.02.2019, 1C_188/2018*

La distinction que la loi neuchâteloise sur le stationnement des communautés nomades établit entre “communautés nomades suisses” et “autres communautés nomades” se fonde sur la nécessité de trouver de la place pour toutes les communautés et est justifiée par la taille et la durée de stationnement différentes des convois. Le retrait de l’effet suspensif en cas de recours contre une décision d’évacuation peut être interprété de façon conforme à la Constitution, dès lors que l’autorité saisie peut ordonner les mesures provisionnelles nécessaires à la conservation de la situation de fait ou de droit.

Faits

Le Grand Conseil du canton de Neuchâtel adopte une loi sur le stationnement des communautés nomades (LSCN/NE). Cette loi prévoit notamment qu’un campement d’une communauté nomade ne peut être installé que sur une aire d’accueil cantonale ou communale, un site provisoire défini par arrêté du Conseil d’État ou un terrain qui fait l’objet d’un contrat-cadre « communauté nomade » écrit et conclu avec son propriétaire ou son ayant droit.

La loi distingue trois types d’aires d’accueil : les aires de séjour sont destinées à l’accueil permanent des communautés nomades suisses (selon la loi : formées par les citoyennes et citoyens suisses, issus des communautés reconnues comme minorités nationales par le Conseil fédéral et dont les véhicules sont dotés de plaques de contrôle suisses) ; les aires de passage à l’accueil temporaire de communautés nomades suisses  ; les aires de transit à l’accueil temporaire des autres communautés nomades (formées par des citoyennes et citoyens issus d’une communauté nomade non reconnue en tant que minorité nationale ou provenant de l’étranger).… Lire la suite

Le droit d’être entendu des initiants lors du contrôle par l’exécutif cantonal

ATF 145 I 167 | TF, 26.11.2018, 1C_136/2018*

Lorsque le Conseil d’État contrôle la validité d’une initiative avant la récolte des signatures, les initiants disposent d’un droit de se déterminer sur d’éventuels éléments que l’autorité aurait établis à l’aide d’une instruction. A moins qu’elle envisage de fonder sa décision sur une norme ou un motif juridique dont les initiants ne pouvaient supposer la pertinence, l’autorité n’a en revanche pas à soumettre par avance aux parties le raisonnement qu’elle entend tenir.

Faits

Le Conseil d’État du canton de Vaud invalide l’initiative « Immigration libre et frontières ouvertes ». Cette initiative prévoit que « l’État et les communes accordent la priorité de l’emploi aux citoyens suisses et aux titulaires d’une autorisation d’établissement » et que « [l]’emploi d’un travailleur étranger donne lieu à une imposition fiscale de l’employeur si [certaines] conditions sont remplies ». Ces conditions visent en substance les personnes étrangères sans autorisation d’établissement et soumises à l’impôt à la source sur le revenu depuis moins de cinq ans.

Un membre du comité d’initiative recourt contre cette décision, d’abord auprès de la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal, puis auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit se prononcer sur le respect du droit d’être entendu (art. 29 al. Lire la suite