Les effets du sauf-conduit (art. 204 CPP)

ATF 141 IV 390 | TF, 30.10.2015, 1B_335/2015*

Faits

Durant une enquête pénale, le Tribunal des mesures de contrainte ordonne à un prévenu étranger de quitter le territoire suisse. Une audience des débats est ajournée pour le 28 janvier 2015. En vue de cette audience, le prévenu obtient un sauf-conduit lui permettant de pénétrer sur le territoire suisse entre le 26 et 28 janvier 2015.

Lors de l’audience du 28 janvier 2015, le prévenu est condamné par jugement à une peine privative de liberté de six ans par le Tribunal criminel. Celui-ci ordonne immédiatement la détention du prévenu pour des mesures de sûretés.

Contre le jugement, le prévenu fait appel. Il considère que le Tribunal criminel ne pouvait pas l’arrêter à la suite de sa condamnation, compte tenu du fait qu’il était au bénéfice d’un sauf-conduit (art. 204 CPP). Il demande ainsi sa remise en liberté et une indemnité, dès lors que sa détention serait illicite. La Cour pénale rejette l’appel. Elle considère que le sauf-conduit n’octroie aucune immunité dès l’instant où le prévenu est condamné.

Le prévenu forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit déterminer si un prévenu au bénéfice d’un sauf-conduit peut être arrêté à la suite d’une condamnation pour les faits qui concernent le sauf-conduit.… Lire la suite

L’héritier lésé constitué partie plaignante

ATF 141 IV 380 | TF, 03.09.2015, 6B_1198/2014*

Faits

Un héritier dépose une plainte pénale contre sa sœur cohéritière au motif que celle-ci aurait prélevé plusieurs milliers de francs d’un compte en Suisse suite à la mort de leur mère au Portugal. Elle aurait ainsi lésé la communauté héréditaire, composée de trois enfants. Le ministère public rend une ordonnance de non-entrée en matière. Suite à un recours déclaré irrecevable par l’instance cantonale pour défaut de légitimation à recourir, l’héritier saisit le Tribunal fédéral.

Il se pose en particulier la question de savoir si l’héritier est directement lésé par les actes de sa sœur cohéritière, sans quoi il ne peut se constituer partie plaignante et participer à la procédure.

Droit

Pour l’essentiel, l’instance cantonale a retenu que l’héritier aurait dû agir en justice ensemble avec tous les membres de la communauté héréditaire. Une exception à cette règle existerait dans le seul cas où un héritier dénonce le comportement délictueux de tous les autres membres de la communauté héréditaire.

Le lésé est toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction (art. 115 al. 1 CPP). La jurisprudence requiert que le lésé soit titulaire du bien juridique protégé par la norme pénale violée.… Lire la suite

La qualité de partie plaignante lors d’une rixe

TF, 19.10.15, 6B_316/2015*

Faits

Il est reproché à un prévenu d’avoir participé à une rixe (art. 133 CP). Un collègue du prévenu est également soupçonné d’y avoir participé. Par la suite, le ministère public classe la procédure contre le collègue, car l’enquête a permis de conclure qu’il était simplement intervenu pour tenter de séparer les protagonistes qui se battaient.

Le prévenu recourt contre cette ordonnance de classement en tant que partie plaignante, car il veut faire condamner son collègue pour rixe. Le Tribunal cantonal n’entre pas en matière sur son recours en estimant qu’il n’avait pas la qualité de partie plaignante et ne pouvait donc pas recourir contre l’ordonnance de classement. Le prévenu dépose alors un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral qui doit déterminer si le recourant avait la qualité de partie plaignante contre un prétendu participant d’une rixe, dont il est lui-même prévenu.

Droit

Une partie plaignante peut recourir au fond devant le Tribunal fédéral que si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF). Lorsque la partie plaignante fait valoir des griefs formels, sa qualité pour recourir s’analyse selon la règle générale de l’art.Lire la suite

La TVA et la rémunération du défenseur d’office

ATF 141 IV 344 | TF, 09.09.2015, 6B_498/2014*

Faits

Une avocate est nommée d’office pour défendre un prévenu domicilié à l’étranger. L’avocate soutient que les prestations fournies dans ce mandat sont sujettes à la TVA, ce que le Tribunal de première instance et le Tribunal d’appel rejettent.

Devant le Tribunal fédéral l’avocate demande que sa note d’honoraires soit augmentée de 8 %, montant correspondant à la TVA pour ses prestations. Doit dès lors être tranchée la question de savoir si les prestations fournies par un défenseur d’office en faveur d’un prévenu domicilié à l’étranger sont ou non soumises à la TVA.

Droit

L’instance précédente a retenu, d’une part, que le destinataire de la prestation était le prévenu domicilié à l’étranger, ce qui excluait l’assujettissement à la TVA des prestations fournies par l’avocate (cf. art. 8 et 18 al. 1 LTVA). D’autre part, même à considérer l’Etat comme étant le destinataire des prestations, il s’agirait de coûts relevant d’activités de la puissance publique non soumis à la TVA (art. 18 al. 2 let. l LTVA). Par ailleurs, selon le CPP les frais de la défense d’office tombent sous la notion de frais de procédure (art. 422 al.Lire la suite

Les frais de défense du prévenu à la charge de la partie plaignante

TF, 18.08.2015, 6B_810/2014*

Faits

Le ministère public rend une ordonnance de classement dans une procédure à l’encontre de plusieurs prévenus. La partie plaignante forme un recours contre cette ordonnance. La Chambre des recours rejette le recours de la partie plaignante et alloue aux prévenus une indemnité pour frais de défense à charge de l’État.

Contre cette décision, le Ministère public forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. En s’appuyant sur l’ATF 139 IV 45, il estime que les frais de défenses du prévenu doivent être mis à la charge de la partie plaignante et non de l’État.

Le Tribunal fédéral doit se déterminer sur la question de savoir dans quelle mesure les frais de défense d’un prévenu peuvent être mis à la charge de la partie plaignante.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par rappeler le principe selon lequel la responsabilité de l’action pénale incombe à l’État. Ainsi, c’est à l’État de prendre en charge les frais de défense du prévenu quand celui-ci a gain de cause (art. 429 al. 1 CPP). Dans l’ATF 139 IV 45, il a admis une exception à ce principe en se fondant sur l’art. 432 CPP.… Lire la suite