Le non-respect du droit au dividende prioritaire des participants

ATF 147 III 126 | TF, 21.01.2021, 4A_98/2020*

Les décisions de l’assemblée générale qui méconnaissent les privilèges statutaires des participants doivent être contestées par ces derniers afin d’exiger l’exécution de leur créance. Si la contestation aboutit à l’annulation de la décision de l’assemblée générale, la société est tenue d’adopter une nouvelle décision conforme aux statuts. Ce n’est que si celle-ci viole une fois de plus les privilèges des participants que ceux-ci disposent d’un droit d’action individuel pour faire exécuter leur créance.

Faits

Une société anonyme sise dans le canton de Berne est constituée d’un capital-actions et d’un capital-participation. Ses statuts prévoient notamment qu’après avoir affecté le bénéfice annuel à la réserve générale, le bénéfice restant est distribué aux détenteurs de bons de participation sous la forme d’un dividende prioritaire pouvant atteindre jusqu’à 5 % de la valeur nominale des bons.

Lors de l’assemblée générale ordinaire pour l’exercice 2017, un actionnaire propose qu’en plus de la distribution prévue du dividende, un dividende prioritaire soit versé pour chaque bon de participation. Sa demande n’étant pas soumise au vote de l’assemblée générale, celle-ci approuve l’affectation du résultat commercial de 2017, sans verser de dividende prioritaire.

Deux mois plus tard, l’actionnaire demande au Handelsgericht du canton de Berne d’annuler la décision de l’assemblée générale concernant l’affectation du résultat de l’exercice 2017 et exige de la société le paiement du dividende prioritaire par bon de participation pour les exercices 2012 à 2014 ainsi que 2016 à 2017.… Lire la suite

Nemo tenetur invoqué par l’ancien organe d’une société anonyme

ATF 147 II 144 | TF, 08.03.2021, 2C_383/2020*

Un ancien CEO d’une société visée par une enquête de la COMCO ne peut pas se prévaloir du droit de ne pas incriminer son ancien employeur afin de refuser de témoigner. Il doit ainsi être entendu comme témoin et a l’obligation de déposer, sauf s’il risque personnellement des poursuites pénales.

Faits

La Commission de la concurrence (COMCO) ouvre une enquête contre plusieurs sociétés concernant une possible restriction à la concurrence. Ces sociétés seraient convenues illicitement de boycotter Apple Pay et Samsung Pay.

La COMCO décide d’entendre notamment l’ancien CEO de Twint comme témoin. Ce dernier conteste avec succès son audition en qualité de témoin auprès du Tribunal administratif fédéral. En effet, l’ancien CEO pourrait se prévaloir du principe nemo tenetur se ipsum accusare (droit de ne pas s’auto-incriminer) puisque l’audition concerne des faits relatifs à la période durant laquelle il exerçait comme CEO (B-6863/2018).

Le Département de l’économie, de la formation et de la recherche saisit le Tribunal fédéral en soutenant que l’ancien CEO pourrait être interrogé comme témoin sans qu’il bénéficie d’un droit de refuser de témoigner.

Le Tribunal fédéral est ainsi amené à préciser la portée du principe nemo tenetur en faveur des (anciens) organes lorsque la personne visée par la procédure est une société.… Lire la suite

Le droit aux relations personnelles du parent social suite à la dissolution du partenariat enregistré (art. 27 al. 2 LPart cum art. 274a CC)

ATF 147 III 209 | TF, 16.03.2021, 5A_755/2020*

L’ex-partenaire du parent légal peut en principe prétendre à un droit aux relations personnelles selon l’art. 274a CC lorsqu’un lien de parenté dite “sociale” s’est tissé entre eux et que l’ex-partenaire endossait le rôle de parent d’intention non biologique de l’enfant (c’est-à-dire lorsque l’enfant a été conçu dans le cadre d’un projet parental commun et qu’il a grandi au sein du couple). Dans une telle configuration, les autres critères – tels que celui de l’existence d’un conflit marqué entre les ex-partenaires – doivent être relégués au second plan.

Faits

Deux femmes se lient par un partenariat enregistré en 2015. Suite à des procréations médicalement assistées effectuées à l’étranger, l’une d’entre elles donne naissance à un premier enfant en 2016, puis à des jumeaux en 2017. Seule la filiation maternelle des enfants est inscrite dans le registre de l’état civil, la filiation paternelle étant inconnue.

En 2018, les partenaires se séparent. En 2019, le Tribunal de première instance de Genève prononce la dissolution du partenariat enregistré et le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant de Genève (TPAE) octroie un droit aux relations personnelles sur les trois enfants à l’ex-partenaire de la mère, à raison de deux visites par mois.… Lire la suite

Le tribunal des mesures de contrainte peut-il prononcer une détention supérieure à celle requise par le ministère public ?

ATF 147 IV 336 | TF, 06.04.2021, 1B_26/2021*

Conçu comme un contrepoids aux pouvoirs étendus du ministère public, le tribunal des mesures de contrainte est limité par les conclusions prises par le ministère public en matière de détention. Ainsi, il ne lui appartient pas d’ordonner une détention provisoire pour une durée supérieure à celle requise par le ministère public.

Faits

Un prévenu est poursuivi pour violation de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup). Le Ministère public du Valais central demande au Tribunal des mesures de contrainte d’ordonner la détention provisoire du prévenu pour une durée de deux mois. Le Tribunal des mesures de contrainte l’ordonne pour une durée de trois mois.

Se prononçant sur recours du prévenu, la Chambre pénale du Tribunal cantonal du Valais confirme la décision du Tribunal des mesures de contrainte. Se plaignant entre autres d’une violation de l’art. 226 CPP, le prévenu forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral contre l’ordonnance de l’instance cantonale. Le Tribunal fédéral doit examiner si le Tribunal des mesures de contrainte était lié par les conclusions du Ministère public ou s’il pouvait au contraire prononcer la détention pour une durée plus longue que celle requise par ce dernier.… Lire la suite

Contributions entre ex-époux : application de la méthode concrète en deux étapes

ATF 147 III 293 | TF, 02.02.2021, 5A_891/2018*

Le Tribunal fédéral procède à l’uniformisation de la méthode de calcul des contributions d’entretien entre ex-époux. Après avoir retenu précédemment l’application de la méthode concrète en deux étapes pour le calcul des contributions dues aux enfants, il l’étend aux contributions entre ex-époux. Cette méthode doit s’appliquer à toutes les situations (même aisées), sauf cas exceptionnels.

Faits

Après quatorze ans de mariage, deux époux décident de se séparer. Ils requièrent des mesures protectrices de l’union conjugale et le juge ordonne la séparation des biens. Entretemps, l’épouse part vivre en Allemagne avec les deux enfants du couple.

Par jugement du 2 juin 2016, le Tribunal de district de Baden prononce le divorce. Il condamne l’ex-époux au versement de contributions d’entretien pour les deux enfants et pour l’ex-épouse, jusqu’à ce qu’elle atteigne l’âge de la retraite. Il doit aussi verser une certaine somme au titre de la liquidation du régime matrimonial.

Sur appel des deux parties, le Tribunal cantonal argovien réduit la somme due par l’ex-époux au titre de la liquidation du régime matrimonial, mais maintient son obligation de verser une contribution d’entretien à son ex-épouse jusqu’à ce qu’elle atteigne l’âge de la retraite.… Lire la suite