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L’annulation d’une décision d’extradition vers l’Arménie 

ATF 148 IV 314 | TF, 21.03.2022, 1C_116/2022*

En raison de la situation des droits de l’homme en Arménie, des garanties diplomatiques générales relatives au respect de l’art. 3 CEDH durant la détention ne suffisent pas à assurer la protection d’un sexagénaire malade en cas d’extradition. 

Faits

Le 2 décembre 2019, l’Arménie requiert de la Suisse l’extradition d’un ressortissant turco-arménien de plus de 60 ans, soupçonné d’escroquerie et de blanchiment d’argent. En août 2020, l’OFJ exige des autorités arméniennes qu’elles fournissent des garanties diplomatiques quant aux conditions de détention. Ces dernières répondent positivement à cette demande.

En décembre 2020, le Ministère public du canton d’Argovie auditionne l’individu, qui refuse de consentir à l’extradition simplifiée. L’Office fédéral de la justice (OFJ) ordonne néanmoins son extradition vers l’Arménie. Cette décision est confirmée par le Tribunal pénal fédéral (TPF) à condition pour l’Arménie de fournir la garantie supplémentaire suivante : “La détention et l’exécution de la peine du requérant se feront exclusivement dans l’une des prisons pilotes de la réforme du gouvernement arménien concernant le système pénitentiaire 2019-2023“.

Selon le TPF, une telle garantie serait justifiée en raison de la situation précaire des droits de l’homme en Arménie (en particulier l’exécution des peines et les soins médicaux), ainsi qu’en raison de l’âge et de l’état de santé de l’individu visé par la demande d’extradition.… Lire la suite

La fourniture préalable de garanties diplomatiques en vue d’une extradition vers la Russie

ATF 148 I 127 | TF, 01.09.2021, 1C_381/2021*

Les garanties diplomatiques requises en l’espèce auprès de la Russie – telles que la mise en place d’un système de monitoring dès la remise de la personne extradée à l’État requérant, la connaissance du lieu de détention avant l’extradition et sa localisation à l’ouest de l’Oural – suffisent à assurer la protection de la personne extradée de manière conforme à la CEDH.

Faits 

Le 18 avril 2016, la Russie requiert de la Suisse l’extradition d’un ex-banquier russe recherché pour des faits de fraude à grande échelle et de blanchiment d’argent. Le 29 novembre 2019, l’Office fédéral de la justice accorde l’extradition, moyennant un certain nombre de garanties diplomatiques.

L’ex-banquier dépose un recours contre la décision d’extradition auprès de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, laquelle le rejette (RR.2020.4 et RR. 2019.325). La Cour requiert toutefois que les garanties diplomatiques soient complétées par la Russie.

Le 21 décembre 2020, le Tribunal fédéral admet le recours de l’ex-banquier à l’encontre de l’arrêt de la Cour des plaintes, compte tenu de l’évolution de la situation des droits de l’homme en Russie. Il renvoie la cause à la Cour des plaintes, qui est chargée d’examiner si les garanties sont suffisantes, eu égard notamment à la situation prévalant actuellement en Russie et aux circonstances particulières du cas d’espèce (1C_444/2020).… Lire la suite

L’extradition pour délit d’initié secondaire (art. 154 al. 3 LIMF)

ATF 147 II 432 | TF, 28.05.2021, 1C_196/2021*

Toute personne qui bénéficie d’une information privilégiée transmise par une chaîne d’initiés reste considérée comme un initié secondaire punissable en vertu de l’art. 154 al. 3 LIMF, à condition que la chaîne ne soit pas interrompue et que l’on puisse remonter à la source de l’information. Les tribunaux suisses peuvent octroyer l’extradition pour une telle infraction.

Faits

Les autorités américaines soupçonnent une personne d’avoir commis des délits d’initiés à grande échelle de 2013 à 2017. Celle-ci et un complice auraient reçu des informations d’initiés en rapport avec une société cotée en bourse et deux banques d’investissement. Ils auraient rémunéré un intermédiaire afin d’obtenir des renseignements de la part d’initiés primaires. Ces renseignements leur auraient permis d’obtenir plusieurs millions de dollars de revenus qu’ils auraient blanchis par la suite.

Le 5 janvier 2021, l’Office fédéral de la justice accorde l’extradition aux États-Unis de la personne visée par la demande d’entraide. L’office fédéral retient que les faits décrits pourraient notamment constituer un délit d’initié secondaire (art. 154 al. 3 LIMF) au regard du droit suisse.

Le 7 avril 2021, la personne visée par la demande d’entraide recourt contre la décision d’extradition auprès de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral qui rejette le recours.… Lire la suite

État de santé apte à faire échec à une demande d’extradition

Contribution de Me Sandrine Giroud à l’occasion des cinq ans de LawInside.ch

Pour célébrer les cinq ans de LawInside.ch, nous avons demandé à des personnalités actives dans le monde juridique en Suisse romande et alémanique de commenter un arrêt comme contributeurs externes de LawInside.ch.

Comme quatrième contributeur, nous avons le plaisir d’accueillir Me Sandrine Giroud, associée au sein de LALIVE. Me Sandrine Giroud est notamment spécialisée en contentieux en matière civile et commerciale, recouvrement d’avoirs, criminalité économique et entraide, ainsi qu’en droit de l’art. Elle est également membre du Conseil de l’Ordre et présidente de la Commission des droits de l’Homme de l’Ordre des avocats de Genève.

 


TF, 02.09.2019, 1C_433/2019

L’état de santé de l’extradé ne constitue en principe pas un motif particulier de refus de l’extradition. Un refus ne saurait être justifié qu’en présence de motifs exceptionnels, lorsqu’il existe des doutes sérieux sur la capacité de l’État étranger à assurer à la personne extradée un traitement conforme aux exigences des normes de droit international et à lui fournir, le cas échéant, des soins suffisants en détention.

Faits

En juin 2019, l’Office fédéral de la justice accorde l’extradition aux Pays-Bas d’un ressortissant pakistanais pour l’exécution d’une peine privative de liberté prononcée en juin 2018 par le Tribunal de La Haye pour participation à une organisation criminelle et escroquerie.… Lire la suite

L’extradition d’un fonctionnaire de la FIFA

ATF 142 IV 250TF, 02.05.2016, 1C_143/2016*

Faits

Les autorités américaines soupçonnent un haut fonctionnaire de la FIFA originaire du Nicaragua d’avoir obtenu des pots-de-vin en échange de l’attribution des droits de commercialisation au Nicaragua, pays dont il est originaire, pour la Coupe du monde de football. Sur requête du Département de Justice américain, le fonctionnaire est arrêté en Suisse. Les Etats-Unis requièrent son extradition. Par la suite, les autorités du Nicaragua demandent à leur tour que le fonctionnaire de la FIFA concerné soit extradé vers leur pays.

L’Office fédéral de la justice autorise l’extradition en priorité vers les Etats-Unis, ainsi qu’une éventuelle extradition ultérieure des Etats-Unis vers le Nicaragua. Cette décision est confirmée par le Tribunal pénal fédéral. Le fonctionnaire recourt auprès du Tribunal fédéral, qui est ainsi appelé à se prononcer pour la première fois sur l’admissibilité de l’extradition de hauts fonctionnaires de la FIFA vers les Etats-Unis dans le cadre du scandale financier révélé en 2015.

Droit

L’extradition du recourant est soumise au (i) Traité d’extradition entre la Suisse et les Etats-Unis, (ii) à la Convention des Nations Unies contre la corruption, et (iii) si ces documents ne règlent pas exhaustivement le cas ou si le droit interne est plus favorable à l’extradition, à la Loi fédérale sur l’entraide pénale internationale (EIMP).… Lire la suite