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Dies ad quem de la période de suspension du délai péremptoire de l’art. 166 al. 2 LP

ATF 149 III 410TF, 03.08.2023, 5A_190/2023*

La suspension du délai péremptoire de l’art. 166 al. 2 LP prend fin dès la notification du prononcé de mainlevée. La question de savoir si par « notification du prononcé de mainlevée » il faut entendre la notification du seul dispositif ou celle de la décision dûment motivée n’est pas formellement tranchée.

Faits

Le 4 septembre 2020, un individu notifie à une société anonyme un commandement de payer pour un montant de CHF 600’000.-, intérêts en sus. La poursuivie y fait opposition totale

Le 23 février 2021, l’autorité compétente prononce la mainlevée provisoire de l’opposition. Cette décision est d’abord communiquée aux parties sous la forme d’un dispositif non motivé. Le prononcé motivé est adressé aux parties le 16 avril 2021. Aucun recours ni action en libération de dette ne sont introduits.

Le poursuivant requiert la continuation de la poursuite et la poursuivie se voit notifier une commination de faillite le 14 juillet 2022. Par acte du 2 août 2022, le poursuivant requiert la faillite de la poursuivie. La faillite de la poursuivie est prononcée au mois de septembre 2022.

La poursuivie recourt contre cette décision auprès de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois qui la déboute.Lire la suite

La suspension du délai imparti pour le dépôt d’une action en contestation de l’état de collocation

ATF 149 III 179 | TF, 07.12.22, 5A_790/2021*

La suspension des délais prévue par l’art. 145 al. 1 CPC s’applique au délai imparti pour déposer une action en contestation de l’état de collocation au sens de l’art. 250 LP. 

Faits

Une procédure de faillite est introduite contre une société anonyme. Un état de collocation est dressé. Deux créanciers notamment y sont inscrits, dont l’un d’eux dispose de deux créances colloquées en 3ème classe. L’état de collocation est publié dans la Feuille officielle du commerce (FOSC) du 13 mars 2020 pour la période courant du 17 mars au 6 avril 2020.

Le 4 mai 2020, l’un des deux créanciers précités dépose une action en contestation de l’état de collocation contre l’autre devant le Tribunal de district de Münchwilen. La procédure est limitée à la question du respect du délai du dépôt de la demande.

Le Tribunal de district rend une décision d’irrecevabilité, estimant la demande tardive. Saisi d’un recours du demandeur, le Tribunal cantonal de Thurgovie considère quant à lui la demande comme ayant été déposée en temps utile. Il annule la décision du Tribunal de district et lui renvoie la cause pour examen sur le fond. Lire la suite

Le prononcé de l’exequatur dans le cadre d’une requête de séquestre

ATF 149 III 224 | TF, 18.01.2023, 5A_428/2022*

Même en l’absence de conclusions spécifiques dans ce sens, la force exécutoire d’un jugement « Lugano » peut être constatée dans le cadre d’une requête de séquestre fondée sur l’art. 271 al. 1 ch. 6 LP.

Faits

En 2012, le Tribunal de Grande Instance de Colmar (France) condamne notamment un débiteur à s’acquitter d’un montant de EUR 100’000.- envers un créancier. Ce jugement est infirmé par arrêt de la Cour d’appel de Colmar, lui-même partiellement cassé et annulé par un arrêt de 2017 de la Cour de cassation. Celle-ci confirme notamment la condamnation du débiteur à payer un montant de EUR 100’000 et renvoie les parties devant la Cour d’appel de Nancy (France).

Le 8 juillet 2021, le Tribunal judiciaire de Colmar établit un certificat au sens de l’art. 54 de la Convention de Lugano (« CL »). Le 12 novembre 2021, le créancier requiert le séquestre de la part saisissable de la rémunération du débiteur auprès de son employeur, une société domiciliée dans le canton de Genève, à concurrence de CHF 106’842,87. Il produit notamment le jugement et les arrêts précités ainsi que le certificat au sens de l’art. 54 CL, mais ne prend pas de conclusions formelles en prononcé de l’exequatur.… Lire la suite

Le recours des créanciers contre la faillite sans poursuite préalable à l’initiative du débiteur

ATF 149 III 186TF, 14.12.2022, 5A_452/2021*

En principe, faute de disposer de la qualité de partie dans la procédure de faillite sans poursuite préalable intentée à la requête du débiteur (art. 191 LP), les créanciers n’ont pas la qualité pour recourir contre le prononcé de la faillite du débiteur (art. 174 LP). En revanche, les créanciers ont la qualité pour recourir contre l’ouverture de la faillite lorsqu’ils soulèvent l’incompétence (notamment en raison du lieu) du tribunal ayant prononcé la faillite.

Faits

À la suite du dépôt d’une déclaration d’insolvabilité, le tribunal déclare la faillite d’un débiteur. Un créancier forme un recours auprès du Tribunal cantonal contre l’ouverture de la faillite. Faute d’avoir participé à la procédure en première instance et de disposer de la qualité pour recourir, le Tribunal cantonal déclare irrecevable le recours du créancier. Contre cette décision, le créancier intente un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral est amené à préciser la qualité pour recourir d’un créancier contre la décision d’ouverture de la faillite sans poursuite préalable lorsque celle-ci a été requise par un débiteur sur la base d’une déclaration d’insolvabilité.

Droit

L’art. 191 al.Lire la suite

Séquestre : le blanchiment d’argent fondant un lien suffisant avec la Suisse

ATF 148 III 377 | TF, 11.07.2022, 5A_709/2018*

Des actes de blanchiment d’argent commis en Suisse suite à des infractions pénales à l’étranger peuvent fonder un « lien suffisant avec la Suisse » au sens de l’art. 271 al. 1 ch. 4 LP et donc justifier un séquestre.

Faits

Dans le cadre d’une procédure pénale ouverte en Italie, le Tribunal de Milan acquitte l’un des prévenus (ressortissant américain résidant aux Etats-Unis) en raison de la prescription de l’infraction d’appropriation illégitime lui étant reprochée. Après la confirmation de ce jugement par toutes les instances italiennes, deux sociétés poursuivantes requièrent le séquestre d’environ EUR 150 millions déposés sur un compte auprès d’une banque à Lugano, dont les titulaires sont des sociétés contrôlées par le prévenu. Les fonds constitueraient le produit des infractions commises en Italie. Avant d’être transférés sur le compte suisse, les fonds auraient fait l’objet d’un transfert auprès d’une banque en Irlande. Dans un premier temps, le juge compétent octroie le séquestre et exige le paiement de sûretés. Par la suite, sur opposition des sociétés séquestrées, le juge annule le séquestre. L’instance d’appel renverse ce jugement et prononce le séquestre en révoquant la demande de sûretés. Cet arrêt fait l’objet d’un recours au Tribunal fédéral par les sociétés séquestrées.… Lire la suite