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Recours d’un bénéficiaire d’une admission provisoire en cas de refus de prolongation d’une autorisation de séjour

ATAF 2023 VII/4 (TAF, 04.04.2023, F-494/2021)

Une personne qui se voit refuser le renouvellement d’une autorisation de séjour mais qui est mise au bénéfice de l’admission provisoire dispose d’un intérêt digne de protection à contester le refus de l’autorisation de séjour, dès lors que celle-ci lui octroie une situation plus stable en Suisse.

Le renvoi et l’admission provisoire ne peuvent entrer en force aussi longtemps qu’une procédure de recours, visant le refus d’octroi ou de prolongation d’une autorisation de séjour, est pendante. L’admission provisoire accordée par l’autorité inférieure déploie cependant ses effets antérieurement, dès la notification de la décision. Dès ce moment, le bénéficiaire de l’admission provisoire peut jouir des droits attachés à ce statut.

Faits 

Une ressortissante syrienne est au bénéfice d’une autorisation de séjour depuis son arrivée en Suisse en 2012 à la suite d’un regroupement familial en lien avec son époux titulaire d’une autorisation d’établissement. Le regroupement familial est régulièrement prolongé, la dernière fois jusqu’au 12 août 2020.

Quelques années plus tard, son mari et elle conviennent par convention de mesures protectrices de l’union conjugale de vivre séparés pour une durée indéterminée. Elle obtient la garde des enfants.

En 2020, le Service de la population du canton de Vaud (SPOP) refuse de lui délivrer une autorisation d’établissement.… Lire la suite

Le versement d’aides financières aux cantons pour les requérants d’asile

TF, 21.23.2023, 2C_694/2022*

Le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) ne peut pas refuser de verser des indemnités forfaitaires à un canton ayant manqué à ses obligations en matière de renvoi au sens de l’art. 89b LAsi, ni en réclamer le remboursement lorsque le canton concerné démontre avoir été empêché de remplir son devoir pour des raisons techniques ou lorsqu’il peut invoquer des motifs excusables à son manquement qui font qu’il est objectivement impossible de lui reprocher un manque de diligence et d’avoir voulu se soustraire fautivement à ses obligations.  

Faits

Par décision du 25 octobre 2016, le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) refuse d’entrer en matière sur la demande d’asile d’un ressortissant érythréen. Il ordonne simultanément son transfert vers l’Italie en application de l’Accord « Dublin ». Le SEM précise notamment dans cette décision que la relation que l’intéressé entretient avec une requérante d’asile de la même origine vivant en Suisse n’est pas assez étroite et effective pour qu’il puisse bénéficier du droit à la garantie de la vie familiale et voir sa demande d’asile traitée par la Suisse. Cette décision entre en force le 5 novembre 2016.  

Quelques jours plus tard, le Service cantonal des migrations neuchâtelois mène un entretien avec l’intéressé en vue de son renvoi.Lire la suite

La reformatio in pejus en cas d’annulation et de renvoi selon l’art. 409 CPP

ATF 149 IV 284 | TF, 18.04.2023, 6B_75/2023*

L’interdiction de la reformatio in pejus ne s’applique pas dans la procédure de renvoi, lorsque sur appel du prévenu, la juridiction d’appel annule le jugement du tribunal de première instance et lui renvoie la cause pour nouveau jugement (art. 409 CPP), avant même de notifier la déclaration d’appel aux autres parties. 

Faits

Un individu fait l’objet d’une procédure pénale notamment pour incendie volontaire, menaces multiples et lésions corporelles simples.

Il est acquitté de certains chefs d’accusation, mais condamné par le Bezirksgericht de Zofingue à une peine privative de liberté de 18 mois.

Sur appel du prévenu, l’Obergericht du canton d’Argovie annule le jugement en raison de vices importants (art. 409 CPP) et renvoie l’affaire au Bezirksgericht, avant même de notifier la déclaration d’appel aux autres parties.

À l’issue de la procédure de renvoi, le prévenu est condamné par le Bezirksgericht pour des chefs d’accusation dont il a été acquitté auparavant, et sa peine est augmentée à 22 mois avec sursis. Il interjette donc appel contre ce nouveau jugement. Le ministère public forme un appel joint et requiert une augmentation de la peine.

L’Obergericht admet partiellement l’appel du prévenu, rejette celui du ministère public, et maintient l’aggravation de la peine par rapport au premier jugement de première instance.… Lire la suite

Les limites au prononcé d’une peine privative de liberté en cas de rupture de ban (art. 291 CP)

ATF 147 IV 232 | TF, 10.03.2021, 6B_1398/2020*

L’infraction de rupture de ban (art. 291 CP) ne peut donner lieu à une condamnation pour peine privative de liberté à l’encontre d’un ressortissant d’un pays tiers qui est demeuré en Suisse malgré son expulsion que si les autorités ont suivi la procédure de renvoi prévue par la Directive sur le retour (cf. ég. RO 2010 5925) ou en ont été empêchées en raison du comportement de l’intéressé.

Faits

Le 23 mai 2018, le Tribunal de police du canton de Genève condamne un ressortissant algérien pour plusieurs infractions, dont celle d’entrée illégale et de séjour illégal en Suisse. Il ordonne son expulsion pour une durée de cinq ans.

Le ressortissant algérien demeure néanmoins en Suisse et se fait derechef condamner à une peine privative de liberté pour rupture de ban en décembre 2018.

Après sa libération en janvier 2020, il demeure en Suisse et est interpellé quelques mois plus tard. Par jugement du 6 juillet 2020, confirmé en appel, le Tribunal de police le déclare coupable de rupture de ban et le condamne à une peine privative de liberté de neuf mois.

Le prévenu recourt alors au Tribunal fédéral. Il ne remet pas en cause sa condamnation, mais reproche aux tribunaux genevois d’avoir violé le droit fédéral et international en lui infligeant une peine privative de liberté alors qu’aucune mesure n’a été prise en vue de son renvoi effectif.… Lire la suite

Le renvoi d’un citoyen homosexuel vers la Gambie en violation de l’art. 3 CEDH (CourEDH)

CourEDH, 17.11.2020, Affaire B et C c. Suisse, requêtes nos 889/19 et 43987/16

Lorsqu’elles décident du renvoi d’un ressortissant étranger dans son pays d’origine, les autorités suisses sont tenues d’en apprécier les risques. Dans ce cadre, elles doivent évaluer d’office la capacité et la volonté des autorités du pays d’origine de protéger ses ressortissants contre les atteintes émanant d’entités privées, y compris, lorsque l’homophobie est largement répandue dans le pays de renvoi, les actes de policiers « véreux » ou d’autres individus à l’encontre d’un requérant homosexuel.

Faits

En 2008, un ressortissant gambien âgé de 34 ans arrive en Suisse. Il demande l’asile sous une fausse identité, prétendant venir du Mali. Il est ensuite porté disparu, de sorte que la décision de renvoi prononcée à son encontre n’est pas exécutée. Il forme une seconde demande d’asile en 2013, sous sa véritable identité, alléguant qu’il fait l’objet de persécutions dans son pays d’origine, la Gambie, en raison de son orientation sexuelle.

En 2014, cette requête est rejetée par le SEM, puis par le Tribunal administratif fédéral. Les autorités suisses concluent que le récit de l’intéressé n’est pas crédible et qu’il n’a pas démontré avoir été exposé à un risque concret de mauvais traitements au moment de quitter la Gambie.… Lire la suite