Entrées par Julien Francey

Le séquestre générique des biens détenus par une banque

ATF 142 III 291 | TF, 23.02.2015, 5A_496/2015*

Faits

Sur demande d’un créancier, le tribunal de première instance ordonne le séquestre de tous les actifs en propriété d’une banque. La banque forme opposition au séquestre, mais n’obtient pas gain de cause. L’office des faillites arrête et transmet à la banque le procès-verbal de séquestre. Celle-ci dépose alors une plainte concluant à l’annulation du procès-verbal de séquestre (art. 17 LP). L’autorité de surveillance admet la plainte, constate la nullité de l’ordonnance de séquestre et annule le procès-verbal. Le créancier recourt au Tribunal fédéral en soulevant que l’autorité de surveillance n’avait pas la compétence de remettre en cause l’ordonnance de séquestre qui était déjà entrée en force.

Droit

Le débiteur doit faire valoir les questions de fond relatives au bien-fondé de l’ordonnance du séquestre au moyen d’une opposition (art. 278 LP). En revanche, s’il veut s’opposer à la décision d’exécution du séquestre – qui traite notamment de la saisissabilité des biens, de l’ordre de saisie, de la sauvegarde des biens et de la procédure de revendication – il doit déposer une plainte. En outre, les autorités de poursuite contrôlent la validité formelle de l’ordonnance de séquestre du juge afin de pouvoir exécuter un séquestre sans risque de confusion.… Lire la suite

La compétence des autorités suisses lorsque des enfants sont domiciliés à l’étranger (art. 85 LDIP)

ATF 142 III 56 | TF, 20.01.2016, 5A_331/2015*

Faits

Une mère divorcée élit domicile en Tunisie avec ses deux enfants. Le père dépose une demande en modification du jugement de divorce afin que l’autorité parentale exclusive lui soit attribuée. Il obtient gain de cause devant le Tribunal fédéral. La mère reste en Tunisie avec les deux enfants et se fait condamner pour enlèvement d’enfants. Quelques années après, elle met au monde deux autres enfants et demande une nouvelle modification du jugement de divorce afin d’obtenir l’autorité parentale exclusive des deux premiers enfants. Le tribunal de première instance puis le Tribunal cantonal font droit à sa demande. Le père saisit alors le Tribunal fédéral qui doit examiner la compétence des autorités suisses pour une modification du jugement de divorce.

Droit

Le Tribunal fédéral examine d’office sa compétence en matière d’affaires non patrimoniales relatives à une action en modification du jugement de divorce. La Tunisie n’a ni ratifié la Convention de la Haye de 1996 en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants (CLaH96), ni la Convention de la Haye de 1961 (CLaH61). Partant, la LDIP est applicable.

L’art. 85 al. 1 LDIP renvoie à la CLaH96 en ce qui concerne la protection des mineurs.… Lire la suite

L’indemnisation de l’avocat pour une procédure de contravention (art. 429 CPP)

ATF 142 IV 45 | TF, 11.02.2016, 6B_1105/2014*

Faits

Le Ministère public du canton du Valais condamne un vigneron à une amende de 800 francs pour insoumission à une décision de l’autorité (art. 292 CP). Le vigneron mandate un avocat qui fait opposition et obtient le classement de la procédure. En revanche, le Ministère public refuse d’indemniser l’avocat en soulevant que les services d’un avocat ne sont pas nécessaires pour une contravention. Le Tribunal cantonal confirme la décision du Ministère public relative à l’absence d’indemnisation. Le vigneron saisit alors le Tribunal fédéral qui doit déterminer si le recours aux services d’un avocat pour une contravention apparaît comme raisonnable au sens de l’art. 429 al. 1 let. a CPP.

Droit

Selon l’art. 429 al. 1 let. a CPP, « si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s’il bénéficie d’une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure ». L’indemnité pour les frais de défense n’est pas restreinte aux cas de défense obligatoire de l’art. 130 CPP. Dans le cadre de l’examen du caractère raisonnable du recours à un avocat, il faut tenir compte, outre de la gravité de l’infraction et de la complexité de l’affaire en fait ou en droit, de la durée de la procédure et de son impact sur la vie personnelle et professionnelle du prévenu.… Lire la suite

La placement dans un établissement pour jeunes adultes (art. 61 CP)

ATF 142 IV 49 | TF, 10.02.2015, 6B_565/2015*

Faits

Un jeune prévenu est condamné à une peine privative de liberté de 6 ans et à une mesure d’internement (art. 64 CP) notamment pour incendie intentionnel et mise en danger de la vie d’autrui. Sur recours du prévenu, le Tribunal cantonal réforme le jugement en ordonnant une mesure institutionnelle en milieu fermé (art. 59 al. 3 CP). Le prévenu recourt au Tribunal fédéral et conclut à ce qu’il soit soumis à une mesure de placement dans un établissement pour jeunes adultes au sens de l’art. 61 CP. Le Tribunal fédéral est appelé à présenter les conditions de cette mesure.

Droit

Selon l’art. 61 CP, « si l’auteur avait moins de 25 ans au moment de l’infraction et qu’il souffre de graves troubles du développement de la personnalité, le juge peut ordonner son placement dans un établissement pour jeunes adultes aux conditions suivantes : l’auteur a commis un crime ou un délit en relation avec ces troubles (lit. a) ; il est à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ces troubles (lit. b) ».

Le placement dans un établissement pour jeunes adultes est ordonné principalement en raison de l’état personnel du jeune adulte et de sa capacité à recevoir un soutien sociopédagogique et thérapeutique pouvant influencer favorablement le développement de sa personnalité.… Lire la suite

L’appel en cause non chiffré

ATF 142 III 102 | TF, 26.01.2015, 4A_375/2015*

Faits

Lors d’un procès en garantie des défauts, le maître de l’ouvrage réclame un montant de 150’000 francs à l’entrepreneur. Celui-ci appelle en cause trois autres sociétés qui seraient également responsables de la mauvaise exécution des travaux. Le Tribunal de commerce déclare l’appel en cause irrecevable en raison du fait que l’appel n’était pas chiffré. Le maître d’ouvrage saisit le Tribunal fédéral qui doit déterminer dans quelle mesure les conclusions de l’appel en cause doivent être chiffrées.

Droit

L’appel en cause doit respecter les conditions générales de recevabilité. À cet égard, l’art. 84 al. 2 CPC prévoit qu’une action en paiement doit être chiffrée. Si l’évaluation de la valeur litigieuse est impossible ou ne peut être exigée d’emblée, le demandeur peut déposer une action non chiffrée (art. 85 al. 1 CPC). Il doit cependant indiquer une valeur litigieuse provisoire (art. 85 al. 1 CPC).

Dans la mesure où l’appel en cause dépend de l’action principale, il peut être non chiffré si l’action principale ne l’est pas non plus. Il en va de même lorsque l’action principale est chiffrée, mais que l’appel en cause nécessite des réquisitions de preuve pour évaluer la prétention contre l’appelé en cause.… Lire la suite