La sentence rayant la cause du rôle en arbitrage interne

Télécharger en PDF

ATF 142 III 284 | TF, 16.03.2016, 4A_422/2015*

Faits

Un défendeur refuse de verser sa part d’avance de frais dans un arbitrage interne (art. 378 al. 1 CPC). Le tribunal arbitral impartit alors un délai au demandeur en lui donnant la possibilité de verser la part d’avance de frais due par le défendeur ou de lui communiquer sa décision de renoncer à l’arbitrage (cf. art. 378 al. 2 CPC).

Le demandeur ayant déclaré renoncer à la procédure d’arbitrage, le tribunal classe la procédure et la raie du rôle en mettant les frais à la charge des parties par moitié.

Saisi d’un recours du défendeur, le Tribunal fédéral doit se prononcer sur la nature de la décision querellée ainsi que sur le devoir du tribunal d’entendre les parties avant de rendre une décision sur les frais à la suite d’une procédure devenue sans objet.

Droit

Le recours contre une sentence rendue dans une procédure d’arbitrage interne est recevable pour les sentences partielles ou finales (let. a) et les sentences incidentes (let. b) pour les motifs énoncés à l’art. 393 let. a et b CPC (art. 392 CPC). La nature de la décision par laquelle il est mis fin à la procédure arbitrale après que la partie renonce à l’arbitrage conformément à l’art. 378 al. 2 1ère phr. CPC est contestée. Une partie de la doctrine y voit une décision d’irrecevabilité, une autre partie une décision de radiation. Le Tribunal fédéral se rallie à cette dernière opinion. Il considère que cette qualification exprime mieux la nature de la décision en question, dont le but n’est que d’entériner le choix opéré par une partie et de provoquer par là la fin de la procédure. S’agissant de la recevabilité du recours en l’espèce, le Tribunal fédéral constate que le prononcé touchant aux frais et dépens inclus dans la décision de radiation constitue de toute manière une véritable sentence en lui-même, partielle ou finale, qui est donc attaquable sans restrictions. Le recours est recevable.

Sur le fond, la partie défenderesse (recourante) fait grief au tribunal arbitral d’avoir violé son droit d’être entendue (art. 393 let. d CPC) en statuant sur la répartition des frais sans lui donner la possibilité de s’exprimer au préalable. La décision du Tribunal arbitral prise dans le cas d’espèce s’apparente à celle visée par l’art. 242 CPC, que le juge étatique rend lorsque la procédure est devenue sans objet, en rayant l’affaire du rôle et en statuant sur les frais et dépens (cf. aussi art. 107 al. 1 let. e CPC). Le Message relatif au CPC mentionne expressément le devoir d’entendre les parties avant de prendre cette décision. La doctrine retient la même chose. Dans une procédure LTF, le Tribunal fédéral applique par analogie l’art. 72 de la PCF (cum art. 71 LTF), qui prévoit également le devoir d’entendre les parties dans ce cas. Ainsi, en l’espèce, le tribunal arbitral aurait dû entendre la partie défenderesse avant de statuer sur la répartition des frais et de rayer la cause du rôle. Dans la mesure où il a rendu sa décision sans donner l’occasion aux parties de faire valoir leurs arguments à ce sujet, il a violé le droit d’être entendue de la défenderesse.

Le Tribunal fédéral admet le recours et annule la sentence.

Proposition de citation : Simone Schürch, La sentence rayant la cause du rôle en arbitrage interne, in : https://www.lawinside.ch/214/