Le principe de la légalité et les prestations en espèces en tant que mesures disciplinaires visant des étudiant·es

TF, 08.09.2023, 2C_694/2021*

Une mesure disciplinaire qui prévoit des prestations en espèces allant jusqu’à CHF 4’000.- ne saurait être qualifiée de légère lorsqu’elle vise des étudiant·es, a fortiori lorsqu’une exclusion allant jusqu’à six semestres peut être prononcée en cas de non-paiement. Elle doit donc figurer dans une loi au sens formel et être édictée par l’organe compétent (art. 5 al. 1 Cst. cum art. 38 Cst./ZH).

Faits

Le 25 mai 2020, l’Université de Zurich rend une décision prévoyant l’entrée en vigueur, le 1er septembre 2020, d’une nouvelle ordonnance disciplinaire. Le §11 de l’ordonnance prévoit, parmi les mesures disciplinaires, des prestations en espèces au profit de l’Université de Zurich allant jusqu’à CHF 4’000.-, en tenant compte de la situation financière de la personne concernée (al. 1 lit. c et al. 3). Si, malgré un rappel, les prestations en espèces ne sont pas fournies, l’organe disciplinaire a le pouvoir d’ordonner une exclusion temporaire de l’Université de Zurich pour une durée allant jusqu’à six semestres (al. 4).

Représentés par deux titulaires de masters en droit, tant l’Association des étudiant·es de l’Université de Zurich que son coprésident saisissent le Verwaltungsgericht du canton de Zurich. Ce dernier admet le recours s’agissant des dispositions susmentionnées et les annule.… Lire la suite

La réduction du prix de pension d’un EMS comme sanction contre une rémunération non-conforme

TF, 12.07.2023, 2C_414/2022*

Une autorité peut fonder une réduction du prix de pension d’un EMS sur une application conjointe des art. 36 LGEPA/GE et 25 al. 2 RGEPA/GE sans sombrer dans l’arbitraire afin de sanctionner une rémunération non conforme aux principes qui valent pour le personnel de l’État.

Faits

Une association exploite un établissement médico-social (EMS) dans le canton de Genève. Dans ce canton, la loi sur la gestion des établissements pour personnes âgées (LGEPA/GE) prévoit que la rémunération du personnel des EMS suit les principes qui s’appliquent au personnel de l’État. Or, l’association accorde à sa direction un salaire qui dépasse de deux classes les directives officielles de rémunération. Le Département de la sécurité, de la population et de la santé du canton de Genève demande alors à l’association de modifier la rémunération qu’elle octroie ; cette dernière refuse. Le Département réduit alors le prix que l’EMS peut facturer à ses pensionnaires. L’association exerce recours auprès de la Cour de justice de la République et canton de Genève contre la diminution de son prix de pension, laquelle rejette le recours.

L’association forme recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, lequel est amené à se prononcer sur la légalité de la mesure de diminution du prix de pension.… Lire la suite

Non-conformité d’une loi cantonale sur l’encouragement linguistique préscolaire au droit à un enseignement de base suffisant et gratuit (art. 19 Cst. cum art. 62 al. 2 Cst.)

ATF 149 I 282 | TF, 31.07.2023, 2C_402/2022*

L’encouragement linguistique préscolaire obligatoire relève du droit constitutionnel à un enseignement de base gratuit. Partant, il doit être offert gratuitement. De plus, le canton est tenu de garantir l’accessibilité locale d’une telle offre ou de prendre en charge les frais de transport. Une réglementation cantonale prévoyant le contraire n’est pas compatible avec la Constitution, et plus particulièrement avec l’art. 19 Cst.

Faits

Le Grand Conseil du canton de Thurgovie introduit dans sa loi sur l’école obligatoire (VG/TG ; RB 411.11) un encouragement linguistique préscolaire pour les enfants qui atteignent l’âge de trois ans avant le 31 juillet de l’année concernée et qui présentent un besoin d’encouragement linguistique. La réglementation cantonale prévoit notamment que les titulaires de l’autorité parentale sont tenus de collaborer à l’évaluation des besoins de soutien et à la mise en œuvre de l’encouragement linguistique préscolaire (art. 41c al. 1 VG/TG). Ils sont également responsables des déplacements jusqu’au lieu où est offert l’encouragement linguistique préscolaire (art. 41c al. 2 VG/TG). Ils peuvent en outre être appelés à participer aux coûts de cet encouragement à concurrence de CHF 800.- par an au maximum (art.Lire la suite

L’indemnité pour expropriation matérielle en cas de classement en zone à bâtir réservée aux constructions publiques

TF, 13.07.2023, 1C_332/2022*

Le refus de classement (ou non-classement) d’un terrain existe également lorsque, dans le cadre de la première planification conforme à la LAT, ce terrain est classé en zone à bâtir réservée aux constructions publiques, de sorte que le propriétaire se voit empêché d’y construire à titre privé. Toutefois, le droit à une indemnité au titre d’une expropriation matérielle dépendra des conditions du cas d’espèce, examinées de manière approfondie.

Faits

Une société anonyme est propriétaire d’une parcelle sur le territoire de la commune de Lugano. En 1993, le Conseil d’État approuve la modification du plan d’affectation antérieur, datant de 1977. Une partie de la parcelle de la société est située en zone à bâtir, l’autre en zone à bâtir d’intérêt communal (zona edificabile di interesse communale ; ci-après « ZEIC ») destinée à favoriser l’implantation de résidences principales.

La société propriétaire ouvre action devant le Tribunale d’espropriazione contre la commune de Lugano, réclamant une indemnité de plus de CHF 7 millions, à titre d’expropriation matérielle due à l’affectation d’une partie de sa parcelle en ZEIC, sans succès. Sur appel, le Tribunale cantonale amministrativo admet un cas d’expropriation matérielle et renvoie la cause à l’autorité inférieure pour fixation de l’indemnité.… Lire la suite