L’économicité d’un médicament

TF, 14.12.15, 9C_417/2015*

Faits

Pour la prise en charge par l’assurance-maladie d’un certain médicament, l’Office fédéral de la santé publique (l’OFSP) fixe un prix inférieur à celui admis précédemment.

La société qui confectionne le médicament conteste cette décision au motif que le nouveau prix a été fixé sur la seule base d’une comparaison avec les tarifs pratiqués à l’étranger et non pas sur la base d’une comparaison avec d’autres médicaments suisses. Le Tribunal administratif fédéral lui donne raison et impose à l’OFSP de comparer le médicament litigieux avec d’autres médicaments disponibles en Suisse.

L’OFSP recourt auprès du Tribunal fédéral. La question topique est celle de la licéité de la méthode prévue par l’ordonnance sur l’assurance-maladie (OAMal) pour le contrôle de l’économicité d’un médicament.

Droit

Les prestations prises en charge par l’assurance-maladie (cpr. art. 25 LAMal) doivent être efficaces, appropriées et économiques, ces caractéristiques étant contrôlées périodiquement (art. 32 LAMal). Dans ce contexte, l’OFSP établit une liste des préparations pharmaceutiques et des médicaments confectionnés avec prix (la “liste des spécialités”) (art. 52 al. 1 let. b LAMal), laquelle est réexaminée tous les trois ans. Aux termes de l’OAMal, le caractère économique du médicament est, lors de sa première intégration à la liste des spécialités, contrôlé par le biais d’une comparaison tant avec d’autres médicaments qu’avec les prix pratiqués à l’étranger (art.Lire la suite

La qualité pour recourir des créanciers contre une suspension de faillite (art. 230 LP)

ATF 141 III 590 | TF, 10.12.2015, 5A_592/2015*

Faits

Le Tribunal de Meilen prononce la faillite d’une société à la suite de son surendettement. L’Office des faillites compétent informe le tribunal que la masse ne suffira pas à couvrir les frais de la procédure et propose la suspension de la faillite au sens de l’art. 230 al. 1 LP. Le Tribunal suspend alors la faillite.

Plusieurs créanciers recourent auprès de l’Obergericht zurichois contre la décision de suspension de la faillite. L’Obergericht considère que ces créanciers n’ont pas la légitimation active et n’entre pas en matière sur le recours.

Les créanciers exercent un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Celui-ci doit d’abord se prononcer sur la qualité pour recourir des créanciers contre une ordonnance de suspension de faillite, avant, cas échéant, de se prononcer sur le fond.

Droit

L’Obergericht a repris la pratique de Bâle-Campagne qui considère que les créanciers n’ont pas la légitimation active pour recourir contre une ordonnance de suspension. Depuis l’entrée en vigueur du CPC, la doctrine est divisée sur cette question.

En s’appuyant sur un arrêt de 1914 (ATF 40 III 344, c. 3), le Tribunal fédéral considère que les créanciers ont le droit recourir contre une ordonnance de suspension.… Lire la suite

La portée de la maxime inquisitoire sociale

ATF 141 III 569 | TF, 16.12.2015, 4A_179/2015*

Faits

Des locataires sollicitent une baisse de loyer en se fondant sur une diminution du taux hypothécaire de référence. Le bailleur refuse la réduction du loyer en estimant que le loyer actuel correspond aux loyers usuels du quartier (art. 269a lit. a CO). La tentative de conciliation échoue. Le Président du Tribunal des baux invite le bailleur à fournir l’adresse d’au moins cinq appartements situés dans le quartier afin de prouver que le loyer actuel correspond à ceux pratiqués dans la localité.

Après analyse des informations reçues, le Tribunal des baux estime que les cinq appartements ne sont pas comparables avec celui du bailleur et admet la baisse de loyer. Le bailleur recourt au Tribunal cantonal puis au Tribunal fédéral en invoquant notamment la violation de la maxime inquisitoire (art. 247 al. 2 CPC). Il soutient que le tribunal aurait dû l’avertir que les appartements qu’il a indiqués ne satisfaisaient pas les critères en la matière (art. 11 OBLF). Le Tribunal fédéral doit alors s’exprimer sur la portée de la maxime inquisitoire lors d’une procédure en réduction des loyers.

Droit

Lors d’une action en diminution du loyer, le tribunal saisi doit établir les faits d’office (art.Lire la suite

Le consentement à une mesure de surveillance rétroactive (art. 273 CPP)

ATF 142 IV 34 TF, 04.11.2015, 1B_256/2015*

Faits

Une adolescente porte plainte contre un policier et lui reproche de lui avoir assené plusieurs coups au visage. Afin de vérifier la pertinence de certains témoignages indirects, le Ministère public souhaite procéder à une surveillance rétroactive de la ligne téléphonique de la partie plaignante. La partie plaignante et les autres personnes concernées acceptent la mesure. Le Ministère public ordonne ainsi la surveillance.

Toutefois, le Tribunal des mesures de contrainte refuse d’autoriser la surveillance. Contre cette décision, le Ministère public forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit notamment se prononcer sur la question de savoir si une autorisation du Tribunal des mesures de contrainte à une mesure de surveillance rétroactive est nécessaire lorsque toutes les personnes concernées ont consenti à la mesure.

Droit

Avant de se prononcer sur la question topique, le Tribunal fédéral retient que la mesure de surveillance rétroactive était en l’espèce disproportionnée, car elle ne visait pas à apporter des éléments pertinents pour l’établissement des faits, mais simplement à remettre en doute la crédibilité de témoins indirects. Partant, le Tribunal des mesures de contrainte a eu raison de refuser l’autorisation.

Sur la question topique, le Tribunal fédéral rappelle que l’ordre du Ministère public de procéder à une surveillance rétroactive est soumis à autorisation du Tribunal des mesures de contrainte (art.Lire la suite

Le refus d’une commission rogatoire pour violation du droit d’être entendu

ATF 142 III 116 | TF, 21.12.2015, 4A_340/2015*

Faits

Un tribunal espagnol adresse au Tribunal de première instance de Genève (TPI) une requête d’entraide judiciaire internationale en matière civile, soit une commission rogatoire au sens de la Convention de La Haye de 1970 sur l’obtention des preuves à l’étranger en matière civile ou commerciale (CLaH70). Cette requête tend à obtenir la production de documents par une banque au sujet d’un compte bancaire.

La demande intervient en lien avec un litige espagnol concernant des versements en provenance de ce compte bancaire. Ni le titulaire du compte ni l’ayant droit économique ne sont toutefois parties au litige espagnol.

La banque informe le TPI que le titulaire du compte a refusé de la délier du secret bancaire, de sorte qu’elle ne peut pas transmettre les informations demandées.

Le TPI rend une ordonnance qui ordonne à la banque de produire les informations demandées dans la requête d’entraide.

Le titulaire du compte ainsi que l’ayant droit économique recourent contre cette ordonnance. La Cour confirme l’ordonnance en retenant notamment que le fait que les recourants n’étaient pas partie à la procédure en Espagne n’est pas un motif qui justifierait de refuser la requête d’entraide.… Lire la suite