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La sanction de la violation du devoir de collaboration du requérant d’asile

ATF 148 IV 281 | TF, 28.03.2022, 6B_1361/2020*

Lorsqu’une procédure d’asile se termine par la notification au requérant d’une décision de renvoi exécutoire, le devoir de collaborer du requérant à l’établissement de documents de voyage valides est régi par l’art. 8 al. 4 LAsi. La sanction pénale de la violation de cette obligation est contraire au principe de légalité, la LAsi ne prévoyant pas de telles conséquences pénales.

Faits

Un requérant d’asile reçoit une décision de non-entrée en matière, confirmée par le Tribunal administratif fédéral. Dans ce contexte, il est reproché au requérant d’asile de n’avoir entamé aucune démarche afin d’obtenir des documents d’identité auprès de la représentation iranienne en vue de son renvoi.

Le Tribunal de district de Bülach condamne le requérant d’asile pour la violation de son obligation de collaborer à l’établissement de documents de voyage au sens des art. 90 let. c LEI cum art. 120 al. 1 let. e LEI et lui inflige une amende de Fr. 150.-.

Par la suite, l’Obergericht de Zurich confirme partiellement la décision de première instance, en faisant cependant référence non pas à la LEI mais à la LEtr. Le requérant d’asile demande l’annulation de ce jugement auprès du Tribunal fédéral en formant un recours en matière pénale.… Lire la suite

Inapplicabilité du principe “oui c’est oui” en l’état actuel du droit pénal suisse

ATF 148 IV 234 | TF, 28.03.2022, 6B_894/2021*

En l’état actuel du droit, l’absence de consentement ne permet pas de retenir un viol ou une contrainte sexuelle. La victime doit donner des signes évidents et déchiffrables de son opposition, qui doivent être reconnaissables pour l’auteur.

Faits

Lors d’une soirée, un homme et une femme se rencontrent dans un bar à Genève. Après avoir discuté et bu quelques bières, il se rendent ensemble au domicile du premier. Face à l’aspect peu invitant de l’appartement, la femme a eu envie de repartir, mais ne l’a pas fait. Tous deux se sont retrouvés sur le lit. Une fellation et un rapport sexuel pénétratif ont lieu.

Le lendemain, la femme dépose plainte pénale contre l’homme, notamment pour contrainte sexuelle et viol. Elle affirme s’être laissée faire par peur que son partenaire ne devienne violent, à la suite de morsures douloureuses qu’il lui aurait infligées avant les actes d’ordre sexuel et malgré ses protestations. Aux dires du prévenu, il ne s’agissait que de suçons qui étaient intervenus au cours des actes d’ordre sexuel. La plaignante avait fait état de douleurs liées à ces morsures ou suçons (“ça fait mal, arrête”, “aïe”), mais était restée pour le surplus passive, sans manifester verbalement un défaut de consentement avec des rapports intimes.… Lire la suite

Le prononcé pénal (art. 70 DPA) reste un acte interruptif de prescription (art. 97 al. 3 CP)

ATF 147 IV 274 | TF, 11.01.2021, 6B_786/2020*

Le Tribunal fédéral ne voit aucune raison de s’écarter de sa jurisprudence qui assimile le prononcé pénal (art. 70 DPA) à un jugement de première instance interruptif de prescription (art. 97 al. 3 CP), même au vu du récent revirement de jurisprudence concernant le jugement par défaut comme acte interruptif de prescription (ATF 146 IV 59).

L’interprétation évolutive de la notion de « soupçons fondés » (art. 9 LBA-2010) ne contrevient pas aux principes de la légalité (art. 1 CP) et de la non-rétroactivité (art. 2 al. 1 CP) : elle demeure suffisamment prévisible.

Faits

Par prononcé pénal du 5 avril 2018, le Département fédéral des finances condamne un intermédiaire financier pour violation de l’obligation de communiquer au sens de l’art. 9 LBA-2010 (dans sa version en vigueur jusqu’au 30 septembre 2012) (art. 37 al. 2 LBA-2010). Il retient que, du 16 mai au 6 juin 2011, cet intermédiaire n’a pas fait part de ses soupçons concernant l’origine criminelle de valeurs patrimoniales se trouvant sur un compte bancaire au Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent. Conformément à l’art. Lire la suite

Pas de violation du secret bancaire suisse à l’étranger

ATF 145 IV 144 | TF, 10.10.2018, 6B_1314/2016*

Lorsqu’une banque suisse sous-traite l’ensemble d’un secteur d’activité à une société étrangère, les données bancaires transmises à cette dernière ne sont plus protégées par le secret bancaire helvétique. Dès lors, un employé de la société étrangère qui publie des données clients ne commet pas une violation du secret bancaire lorsqu’il n’est pas employé de la banque suisse et que la société étrangère n’est pas mandataire de la banque suisse au sens de l’art. 47 LB.

Faits

En 1987, Rudolf Elmer commence à travailler pour la banque Julius Bär & Co SA à Zurich. En 1994, il est transféré aux îles Caïmans et devient Chief Operating Officer pour Julius Bar Bank & Trust Company Ltd., une filiale de Julius Bär & Co SA.

Entre 1999 et 2002, Rudolf Elmer est au bénéfice d’un Expatriate Agreement avec Julius Bär & Co SA, lequel règle en particulier des questions d’assurance. Dès 2002, ses droits et obligations sont principalement déterminés par un contrat conclu avec la filiale des îles Caïmans.

En 2011, le Ministère public du canton de Zurich ouvre une instruction pénale contre Rudolf Elmer notamment en raison de prétendues violations répétées du secret bancaire.… Lire la suite