La renonciation d’un commun accord à la procédure de conciliation

ATF 146 III 185TF, 05.02.2020, 4A_416/2019*

En dehors des exceptions prévues par le Code de procédure civile, les parties sont tenues de mener une procédure de conciliation. Si la défenderesse déclare à l’avance qu’elle ne participera pas à l’audience de conciliation, l’autorité de conciliation ne peut pas dispenser la demanderesse de participer à l’audience.

Faits

Une demanderesse dépose auprès de la justice de paix argovienne une requête de conciliation pour une action contractuelle d’un montant de CHF 30’000. Peu après le dépôt de la requête, la défenderesse informe le juge de paix que ni elle ni la demanderesse ne se présenteront à l’audience de conciliation. La demanderesse le confirme en envoyant une demande de dispense de comparaître à l’audience de conciliation et d’autorisation de procéder au fond. Le juge de paix accède à la requête de la demanderesse et délivre ladite autorisation de procéder.

La demanderesse dépose ainsi sa demande au fond au Tribunal de district de Kulm. Celui-ci ne se saisit pas de l’affaire faute de s’être vu remettre une autorisation de procéder valable, la demanderesse ne s’étant en effet pas rendue à l’audience de conciliation pourtant obligatoire au vu des art. 198 et 199 CPC.… Lire la suite

Les conséquences d’un cumul d’actions prohibé par la loi

TF, 07.04.2020, 4A_522/2019

Lorsqu’un cumul d’actions ne respecte pas les conditions prévues à l’art. 90 CPC, le tribunal peut disjoindre les causes (art. 125 let. b CPC).

Faits

Une employée ouvre action devant le Tribunal des prud’hommes du canton de Genève contre la société qui l’employait. Elle prend des conclusions à hauteur de CHF 538’157, dont CHF 21’285 à titre d’indemnité pour violation de la loi sur l’égalité.

La société soulève l’exception d’irrecevabilité. En effet, la procédure simplifiée s’appliquerait indépendamment de la valeur litigieuse dès lors que le litige relève de la loi sur l’égalité (art. 243 al. 2 let. a CPC). La demande cumulerait ainsi une action soumise à la procédure simplifiée et une autre action soumise à la procédure ordinaire. Or un pareil cumul serait prohibé selon l’art. 90 let. b CPC.

Son exception est rejetée tant par le Tribunal que par la Cour de justice.

Saisi par la société, le Tribunal fédéral en profite pour préciser les conséquences d’un cumul d’actions contraire à l’art. 90 let. b CPC.

Droit

L’art. 93 al. 1 let. b LTF prévoit que les décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l’objet d’un recours si l’admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d’éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.… Lire la suite

La notion d’infanticide et l’influence de l’état puerpéral (art. 116 CP)

L’art. 116 CP présume de manière irréfragable (fiction) que la responsabilité de la mère est diminuée durant l’accouchement ainsi que durant un certain temps après, tant que dure l’état puerpéral. Il n’est en revanche pas nécessaire de démontrer l’influence de l’état puerpéral sur la commission de l’acte, la preuve à rapporter reposant uniquement sur la subsistance de cet état.

Faits

Deux heures et demie après avoir accouché, une mère tue son nouveau-né. Celle-ci est condamnée à deux ans de privation de liberté avec sursis pour infanticide (art. 116 CP). Le Ministère public du canton du Valais interjette recours auprès du Tribunal cantonal valaisan, lequel confirme toutefois le jugement de première instance.

Le Ministère public saisit alors le Tribunal fédéral et demande à ce qu’une peine privative de liberté de 10 ans soit prononcée pour assassinat (art. 112 CP), se fondant sur une expertise psychiatrique. A teneur de cette dernière, l’état puerpéral dans lequel se trouvait la mère au moment des faits n’aurait pas eu d’influence sur l’acte.

Le Tribunal fédéral doit ainsi trancher si, lorsqu’une mère tue son enfant peu après avoir accouché et qu’elle se trouve encore dans l’état puerpéral, celui-ci doit avoir eu une influence sur la commission des faits pour qu’un infanticide selon l’art.Lire la suite

Le droit de visite du père présumé d’un enfant dont la mère se trouve en détention

TF, 26.03.2020, 1B_148/2020

Une action tendant à obtenir le droit de visite d’un père sur son nouveau-né, alors que la mère se trouve en détention, ne peut être intentée que par le père lui-même. La mère détenue n’a en effet pas d’intérêt juridique et personnel à une telle décision, étant donné qu’en raison du risque de collusion, les visites devraient se dérouler en son absence.

Faits

Une femme enceinte se trouve en détention provisoire dans le cadre d’une procédure pénale ouverte contre elle. Elle requiert des autorisations de visites et de téléphones en faveur de son compagnon – le père présumé de l’enfant –, demandant notamment qu’il puisse assister à son accouchement. Compte tenu du risque de collusion, ces demandes sont rejetées. Suite au recours de la prévenue, le Tribunal fédéral lui autorise un contact téléphonique avec son compagnon, confirmant toutefois que sa présence lors de l’accouchement est exclue (arrêt 1B_122/2020 du 20 mars 2020).

Le Ministère public refuse en outre que ce dernier puisse voir l’enfant à l’hôpital et que la famille de la prévenue lui rende visite après son accouchement. Le Tribunal cantonal vaudois confirme cette ordonnance, considérant par substitution de motifs que les mesures liées à la pandémie de Covid-19 impliquent la suppression de toutes les visites.… Lire la suite

Un like peut-il être pénal ?

ATF 146 IV 23 TF, 29.01.2020, 6B_1114/2018*

Le fait de “liker” ou de repartager une publication sur un réseau social contenant une accusation ou un soupçon diffamatoire est constitutif de diffamation (art. 173 ch. 1 al. 2 CP) dès lors que la publication en question devient visible pour un tiers et que celui-ci l’a remarqué en raison du “like” ou du repartage de la publication. 

Faits

Le Bezirksgericht de Zurich condamne un prévenu pour diffamation (art. 173 CP) notamment en raison de “likes” et de repartages (share) de publications sur Facebook accusant des tiers d’être antisémites, racistes et misanthropes.

Après le rejet de son appel par l’Obergericht, le prévenu saisit le Tribunal fédéral qui doit préciser si le fait de “liker” et de repartager des publications antisémites sur Facebook peut être considéré comme de la diffamation.

Droit

L’art. 173 ch. 1 al. 1 CP prévoit que celui qui, en s’adressant à un tiers, aura accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l’honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, sera, sur plainte, puni d’une peine pécuniaire.… Lire la suite