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La responsabilité pénale du détenteur d’un compte Facebook pour des propos publiés par des tiers

ATF 148 IV 188 | TF, 07.04.22, 6B_1360/2021*

Le détenteur d’un compte Facebook ne peut pas être condamné pour discrimination raciale en raison de commentaires « postés » sur sa page en réaction à l’une de ses publications, faute de connaissance des commentaires litigieux et en l’absence d’une base légale spécifique.

Faits

Une personnalité publique engagée politiquement partage un article de journal sur son compte Facebook. La publication, librement accessible par des tiers, donne lieu à des commentaires litigieux sur le « mur » Facebook de l’homme politique. Une association dénonce les commentaires, estimant que ceux-ci incitent à la haine envers les citoyen·ne·s musulman·e·s.

Plusieurs personnes à l’origine des commentaires sont identifiées et condamnées pour discrimination raciale par le Ministère public neuchâtelois. Quant au détenteur du compte Facebook, celui-ci est acquitté du chef de discrimination raciale par le Tribunal de police du Littoral et du Val-de-Travers, ce que la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel confirme.

Le Ministère public forme un recours auprès du Tribunal fédéral, lequel doit se prononcer sur la question de savoir si le détenteur du compte se rend punissable de discrimination raciale faute d’avoir surveillé et effacé de son « mur » Facebook les commentaires litigieux de tiers.… Lire la suite

Un like peut-il être pénal ?

ATF 146 IV 23 TF, 29.01.2020, 6B_1114/2018*

Le fait de “liker” ou de repartager une publication sur un réseau social contenant une accusation ou un soupçon diffamatoire est constitutif de diffamation (art. 173 ch. 1 al. 2 CP) dès lors que la publication en question devient visible pour un tiers et que celui-ci l’a remarqué en raison du “like” ou du repartage de la publication. 

Faits

Le Bezirksgericht de Zurich condamne un prévenu pour diffamation (art. 173 CP) notamment en raison de “likes” et de repartages (share) de publications sur Facebook accusant des tiers d’être antisémites, racistes et misanthropes.

Après le rejet de son appel par l’Obergericht, le prévenu saisit le Tribunal fédéral qui doit préciser si le fait de “liker” et de repartager des publications antisémites sur Facebook peut être considéré comme de la diffamation.

Droit

L’art. 173 ch. 1 al. 1 CP prévoit que celui qui, en s’adressant à un tiers, aura accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l’honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, sera, sur plainte, puni d’une peine pécuniaire.… Lire la suite

Fashion ID, Facebook, le bouton “j’aime” et la notion de coresponsable du traitement

CJUE, 29.07.2019, C-40/17 (Fashion ID GmbH & Co. KG vs Verbraucherzentrale NRW eV)

Le gestionnaire d’un site Internet qui insère sur celui-ci le bouton “j’aime” de Facebook devient coresponsable (avec Facebook) du traitement des données personnelles des visiteurs de son site Internet pour la collecte et la transmission de ces données à Facebook . Si le gestionnaire désire se prévaloir du consentement comme motif justifiant le traitement, il doit l’obtenir et informer les visiteurs de leurs droits avant la collecte des données. 

Faits

Fashion ID est une entreprise de vente de vêtements de mode en ligne. Elle insère sur son site Internet le bouton « j’aime » de Facebook. Grâce à l’insertion de ce bouton, Facebook reçoit de Fashion ID des données personnelles de chaque visiteur du site de cette entreprise, sans que celui-ci en soit informé et indépendamment du fait qu’il soit inscrit sur Facebook ou qu’il clique sur le bouton “j’aime”.

La Verbraucherzentrale NRW, association d’utilité publique de défense des intérêts des consommateurs, reproche à Fashion ID d’avoir transmis à Facebook des données personnelles appartenant aux visiteurs de son site Internet, d’une part, sans le consentement de ces derniers et, d’autre part, en violation des obligations d’information prévues par les dispositions relatives à la protection des données personnelles.… Lire la suite

La production de preuve par Facebook Switzerland

ATF 143 IV 21TF, 16.11.16, 1B_185/2016*

Faits

Un journaliste fait l’objet de diffamations sur Facebook et dépose une plainte pénale contre inconnu. Le ministère public requiert de la société Facebook Switzerland Sàrl la production de l’identité du détenteur du compte et les adresses IP utilisées pour poster les commentaires injurieux sous menace de la peine prévue par l’art. 292 CP. Facebook Switzerland recourt au Tribunal cantonal, puis au Tribunal fédéral en soulevant qu’elle ne possède pas ces données et qu’une ordonnance de production de preuve ne peut pas être rendue à son encontre.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle qu’une décision de production de pièces est une décision incidente, sujette à recours notamment si elle cause un préjudice irréparable (cf. art. 93 al. 1 lit. b LTF). Tel est le cas lorsqu’une décision de ce type est assortie des peines prévues à l’art. 292 CP, comme en l’espèce. Partant, le recours en matière pénale est ouvert.

L’ordre de dépôt (art. 265 CPP) permet au ministère public d’obtenir auprès de leurs détenteurs les objets ou valeurs qui feront l’objet d’un séquestre. L’art. 265 CPP ne nécessite pas l’accord du tribunal des mesures de contrainte, contrairement à la surveillance de la correspondance par poste ou télécommunication (cf.… Lire la suite