La validité formelle de la clause d’arbitrage en cas de substitution tacite de parties

ATF 145 III 199 | TF, 17.04.2019, 4A_646/2018*

Seule la clause compromissoire d’origine doit satisfaire aux exigences formelles de la Convention de New York. La substitution de parties à la convention d’arbitrage et la prolongation de la durée de validité de celle-ci ne sont pas soumises aux mêmes exigences de forme. La portée ratione personae de la clause compromissoire – y compris la validité de la substitution de parties – se détermine selon le droit matériel applicable.

Faits

En 2009, une société slovène et une société suisse signent un contrat de distribution, selon lequel la première livre des denrées alimentaires à la seconde qui les distribue en Suisse. Ce contrat contient une clause arbitrale, le siège de l’arbitrage étant situé à Llubjana, en Slovénie.

En pratique, une autre entité du groupe (la “distributrice”) se substitue à la société suisse comme distributrice.

Le contrat est conclu pour une durée fixe, jusqu’à la fin de l’année 2014. Les parties poursuivent toutefois leur relation commerciale jusqu’au printemps 2016.

Ni la substitution de parties, ni la prolongation du contrat ne sont documentées. En particulier, aucun avenant au contrat n’est conclu.

En mai 2016, la société slovène agit en paiement au siège de la distributrice, en Argovie.… Lire la suite

L’homosexualité et l’interdiction de discrimination directe selon la LEg

ATF 145 II 153 | TF, 05.04.19, 8C_594/2018*

Une discrimination en raison de l’orientation sexuelle, notamment en cas d’homosexualité, ne constitue pas une discrimination directe fondée sur le sexe des travailleurs selon la LEg (art. 3 LEg).

Faits

Un homme conclut un contrat de travail à durée déterminée avec l’Armée suisse. Peu avant l’expiration de son contrat, le travailleur postule à nouveau pour le même emploi. L’Armée suisse indique alors au travailleur qu’une prolongation de son contrat n’est pas possible, le poste en question n’existant que jusqu’à l’expiration de son contrat.

Faisant valoir que son orientation sexuelle – soit son homosexualité – est la cause du refus de la prolongation de son contrat, l’ex-employé demande alors à ce qu’une décision concernant la non-prolongation soit rendue. L’Armée suisse rend alors une décision, niant toute discrimination. L’ex-employé recourt contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral (TAF). Débouté, l’homme interjette recours auprès du Tribunal fédéral faisant valoir des prétentions en dommages-intérêts et en réparation du tort moral.

Le Tribunal fédéral doit trancher la question de savoir si une discrimination en raison de l’orientation sexuelle peut constituer une discrimination directe selon l’art. 3 LEg.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par procéder à une interprétation de l’art.Lire la suite

L’absence de contestation par l’employé, la bonne foi et le degré de précision des allégations

TF, 27.02.2019, 4A_367/2018

Un employé qui, durant de nombreuses années, signe des relevés précisant son droit aux commissions ne peut pas par la suite les contester alors qu’il existait une entente cordiale avec son employeur.

La simple allégation d’un manque à gagner, appuyée par un tableau peu précis, ne revêt pas le degré de précision suffisant et doit ainsi être rejetée. La production d’un tableau plus précis après le second échange d’écritures ou son intégration dans une plaidoirie écrite ne permet pas de remédier à cette carence.

Faits

Une société en nom collectif engage un employé “en qualité de représentant”. Les parties conviennent que le salaire de l’employé sera composé de commissions entre 16 % et 22 % du chiffre d’affaires brut.

Durant plus de huit ans et demi, l’employé voit son employeuse au moins une fois par mois pour discuter du montant de ses commissions. Il reçoit alors un décompte mensuel sur lequel il appose sa signature pour approbation. La collaboration se déroule bien et il existe une entente cordiale entre les parties, jusqu’à ce que le chiffre d’affaires réalisé par l’employé baisse. En 2013, l’employé est licencié.

L’employé actionne la société devant le Tribunal civil de l’arrondissement de Lausanne en alléguant avoir touché plusieurs fois des commissions inférieures à 16 %, ce qui représentait le taux minimum convenu par les parties.… Lire la suite

La fixation de la peine en cas de concours rétrospectif partiel

ATF 145 IV 1TF, 27.12.2018, 6B_1037/2018*

L’ancienne jurisprudence du Tribunal fédéral relative aux concours rétrospectifs partiels est abandonnée. Le juge doit désormais procéder en deux étapes. Il fixera d’abord une peine complémentaire ou cumulative sur la base des infractions commises avant le premier jugement. Cela fait, il prononcera une peine indépendante pour sanctionner les infractions commises après le premier jugement.

Faits

Le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l’Est vaudois condamne un prévenu à une peine privative de liberté de 14 mois pour escroquerie, tentative d’escroquerie, faux dans les titres et induction de la justice en erreur. Il révoque en outre le sursis octroyé par le Ministère public en lien avec une précédente condamnation de 2013 et ordonne l’exécution de la peine pécuniaire correspondante.

En appel, le Tribunal cantonal du canton de Vaud réduit la peine privative de liberté à 12 mois mais confirme le jugement de première instance pour le surplus. Il ressort des faits retenus par le Tribunal cantonal  que les agissements du recourant sanctionnés dans le cadre de la procédure sont en partie antérieurs à la condamnation de 2013 dont le sursis a été révoqué.

Le prévenu recourt au Tribunal fédéral, lequel est amené à revoir sa jurisprudence relative au concours rétrospectif partiel.… Lire la suite

Le for du lieu de la prestation caractéristique en présence de plusieurs prestations non-monétaires

ATF 145 III 190 | TF, 13.03.2019, 4A_444/2018*

En présence de plusieurs prestations contractuelles caractéristiques, les tribunaux des différents lieux d’exécution de ces prestations sont en principe compétents à raison du lieu pour statuer sur les actions découlant du contrat. Il n’est pas utile de rechercher avec quel lieu le contrat a les liens les plus étroits. Le Tribunal fédéral ne tranche pas si en présence de tels fors multiples, il convient d’agir exclusivement au for de la prestation litigieuse .

 Faits

Une société construit une station-service dans le canton de Berne. Elle confie la direction des travaux et d’autres tâches à une entreprise spécialisée en la matière.

Pendant les travaux, un incendie se déclare sur le site. Or, aucune assurance immobilière n’a été conclue pour les travaux en cours.

Le maître d’ouvrage agit en responsabilité contre la société chargée de la direction des travaux auprès du Tribunal de commerce du canton de Berne, au motif que la conclusion d’une assurance immobilière aurait incombé à la défenderesse.

Sur demande de la défenderesse, le Tribunal de commerce limite la procédure (art. 125 CPC) à la question du for. Par décision incidente (art. 237 CPC), il se déclare compétent à raison du lieu et entre en matière sur le fond.… Lire la suite