Le droit de séjour fondé sur le droit à la vie privée (art. 8 CEDH)

ATF 144 I 266 | TF, 08.05.2018, 2C_105/2017*

Le refus de prolongation d’une autorisation de séjour peut constituer une atteinte au droit à la vie privée selon l’art. 8 CEDH. En principe, après un séjour légal d’une dizaine d’années ou plus, les relations sociales d’un étranger se sont intensifiées au point que des raisons particulières sont nécessaires pour mettre fin au droit de séjour. Il est également possible que le droit au respect de la vie privée soit violé si l’autorisation n’est pas renouvelée alors même que la période de résidence est inférieure à 10 ans. Dans ce cas, l’étranger doit être particulièrement bien intégré : en sus de relations sociales étroites, une maîtrise de la langue et une intégration sur les plans professionnel et économique sont nécessaires.

Faits

Un Argentin et une Allemande se marient en 2004. Le couple s’installe en Suisse en 2007, mais divorce en 2011. L’Office des migrations du canton de Zurich refuse alors de prolonger le permis de séjour du ressortissant argentin, décision confirmée par le Tribunal administratif zurichois.

Dans l’intervalle, l’Argentin s’installe en concubinage avec une Suissesse. Il obtient ainsi une nouvelle autorisation de séjour.

En 2016, le concubinage prend toutefois fin et l’autorisation de séjour de l’Argentin, alors âgé de 41 ans, n’est pas prolongée.… Lire la suite

L’autorité de chose jugée et la réclamation cantonale genevoise

ATF 144 I 208TF, 06.06.2018, 2C_792/2017*

Lorsque le Tribunal fédéral a rejeté un recours, l’instance cantonale n’a plus le pouvoir de revoir sa décision sur les frais et dépens, même si le droit cantonal prévoit expressément la possibilité de déposer une réclamation devant l’instance cantonale pour contester l’émolument de justice fixé par cette instance.

Faits

La Chambre administrative de la Cour de justice de Genève rejette un recours formé par trois personnes et fixe l’émolument à CHF 1’000. Les intéressés déposent un recours auprès du Tribunal fédéral (dans lequel ils ne critiquent pas l’émolument de justice) et une réclamation contre l’émolument auprès de la Cour de justice, conformément à l’art. 87 al. 4 LPA/GE.

La Cour de justice suspend la procédure jusqu’à droit jugé par le Tribunal fédéral. Après que ce dernier a rejeté le recours, la Cour de justice rejette également la réclamation sur émolument.

Les trois recourants déposent un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, lequel doit préciser la possibilité pour une instance cantonale de revoir une décision accessoire alors que le Tribunal fédéral a rejeté le recours contre la décision sur le fond.

Droit

L’art. 87 al.Lire la suite

La « Lozärner Bier Lager » non produite à Lucerne : tromperie au sens de la LDAI ?

ATF 144 II 386 | TF, 25.06.18, 2C_761/2017*

Une tromperie au sens de la législation sur les denrées alimentaires peut être due à des caractéristiques individuelles de la présentation d’un produit, mais également à son aspect global. Pour savoir s’il y a tromperie, il convient de se baser sur les impressions du consommateur moyen. Il suffit que le produit soit objectivement propice à tromper le consommateur (“objektive Eignung sur Täuschung”), sans qu’il faille prouver qu’un certain nombre de consommateurs ont effectivement été induits en erreur.

Faits

Lozärner Bier AG (LU) est une société commercialisant des bières, ne disposant toutefois pas de sa propre brasserie.

En 2016, le Service du contrôle alimentaire et de la protection des consommateurs lucernois (le « Service ») constate que l’étiquetage de l’un des produits distribués, la « Lozärner Bier Lager », n’indique ni le lieu de production de la bière en Suisse ni la brasserie. Sur l’étiquette figurent simplement un drapeau lucernois, la mention « produit et mis en bouteille en Suisse », de même qu’une référence à la société Lozärner Bier AG.

Dans son rapport d’enquête, le Service met alors en cause le produit en question, le considérant comme trompeur au sens de la législation sur les denrées alimentaires : l’étiquetage donnerait la fausse impression que la bière est produite à Lucerne alors que ce n’est pas le cas (n.d.l.r.… Lire la suite

La responsabilité en cas d’accident pendant l’examen d’auto-école

ATF 144 II 281 | TF, 15.06.2018, 2C_94/2018*

En cas d’accident pendant un examen d’auto-école, la responsabilité de l’État est difficilement engagée pour des raisons probatoires. S’agissant de la responsabilité civile, l’État ne peut être considéré comme étant le détenteur de la voiture (art. 58 al. 1 LCR) pour le temps de la course d’examen. Le dommage causé doit donc être supporté par la société d’auto-école, détentrice et propriétaire de la voiture.

Faits

Lors de son examen d’auto-école, un élève conducteur heurte un panneau routier en causant un dommage de CHF 107.75 à celui-ci ainsi que de CHF 1’839 au véhicule appartenant à la société d’auto-école. Pendant la course d’examen, l’instructeur d’auto-école était également dans la voiture avec l’examinateur.

La société d’auto-école actionne le canton d’Argovie en responsabilité et réclame le remboursement des frais précités en arguant que le comportement prétendument négligent de l’expert est en relation de causalité avec le dommage subi.

Déboutée par le tribunal administratif compétent, la société forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, lequel doit en particulier déterminer si un canton doit répondre, en qualité de détenteur, du dommage au véhicule survenu suite à un accident pendant un examen d’auto-école.Lire la suite

La restriction arbitraire au droit d’accès LIPAD/GE

TF, 28.05.2018, 1C_642/2017

Le droit d’accès prévu aux art. 44 ss LIPAD/GE ne peut être restreint au motif que le document visé par la requête n’a pas trait à l’accomplissement d’une tâche publique. De même, une restriction à ce droit d’accès ne peut se fonder sur le fait qu’une demande de production de pièces visant le même document a été rejetée dans le cadre d’une procédure civile.

Faits

Dans le cadre de l’assainissement de la Banque cantonale de Genève (BCGE), la Fondation de valorisation des actifs de la BCGE (la Fondation) est créée en 2000 afin de gérer, valoriser et réaliser les actifs à risques transférés par la BCGE. À cette fin, en 2002, une Convention est conclue entre la Fondation et un débiteur, par laquelle la Fondation accepte un versement de 21 millions pour solde de tout compte.

En 2010, l’État de Genève, soit pour lui le Département des finances, succède à la Fondation. Le Département dénonce la créance reconnue dans la Convention et ouvre action à l’encontre du débiteur.

En dehors de toute procédure, le débiteur demande au Département l’accès à son dossier personnel et aux autres conventions conclues par la Fondation en se fondant sur la LIPAD.… Lire la suite